Réalité numéro 123 du mercredi 26 janvier 2005 |
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Sommaire
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Directeur de Publication : ALI MAHAMADE HOUMED Codirecteur : MAHDI IBRAHIM A. GOD Dépôt légal n° : 123 Tirage : 500 exemplaires Tél : 25.09.19 BP : 1488. Djibouti Site : www.ard-djibouti.org Email : realite_djibouti@yahoo.fr |
Éditorial
LIBERTÉ IMMUABLE :
APRÈS LE DISCOURS, LA MÉTHODE ?
Le discours d’investiture est au chef d’État ce que l’ablution est au musulman. Ce rituel propiatoire était particulièrement attendu jeudi dernier lorsque, se succédant à lui-même, le président américain George W. Bush, y a défini les grands axes de la politique étrangère qu’il entendait mener lors de son second mandant à la Maison-Blanche.
Et il avait bien besoin de rassurer : pour compréhensible que soit le traumatisme provoqué par les attentats du 11 septembre, l’unilatéralisme guerrier de son instrumentalisation dans le cadre d’une agression prévue bien avant contre l’Irak, a profondément fragilisé la légitimité d’un multilatéralisme fondé sur la primauté du droit international. Accessoirement, par les choix budgétaires qu’il implique, cet effort de guerre a précipité la chute du billet vert, menaçant toute l’économie mondiale d’une récession sans précédent.
A contexte exceptionnel, propos messianiques : le discours inaugural du second mandat de Bush s’est voulu nouveauté dans la continuité.
Continuité. La menace terroriste justifiera, comme par le passé, une sorte d’activisme préventif qui a déjà causé la chute du dictateur Saddam Hussein, à défaut d’avoir instauré la démocratie en Irak :
« Aussi longtemps que des régions entières du monde seront plongées dans le ressentiment et la tyrannie, soumises à des idéologies qui nourrissent la haine et pardonnent le meurtre, la violence augmentera, deviendra puissance destructrice, et franchira les frontières les mieux défendues, se transformant en menace mortelle… Les événements et le bon sens nous mènent à une conclusion : la survie de la liberté dans notre pays dépend de plus en plus du succès de la liberté dans d’autres pays. Le plus grand espoir pour la paix chez nous est le développement de la liberté dans le monde entier.»
Si nul ne conteste le bien-fondé de cette vision, son mode opératoire situé en dehors de la légalité internationale et surtout les réalités concrètement vécues dans certaines régions, que ce soit en Irak ou dans les Territoires Occupés, suscitent pour le moment quelques inquiétudes tout aussi bien fondées. Un sondage effectué entre le 15 novembre 2004 et le 3 janvier 2005 par GlobeScan pour le compte de la BBC sur un échantillon international réparti sur 16 pays, donne à cet égard toute la mesure de la méfiance des opinions publiques. Ainsi, 58% des personnes interrogées considèrent la réélection de Bush comme un événement négatif, tandis que 48% d’entre elles estiment que les États-Unis ne jouent pas un rôle positif dans le monde. C’est regrettable : si l’administration républicaine est si sévèrement sanctionnée, son incapacité à normaliser la situation en Irak, où l’on ne parle plus d’armes de destruction massive, et sa mansuétude envers l’État sioniste, qui viole les accords d’Oslo et qui bafoue la fameuse « feuille de route » y sont certainement pour quelque chose.
Nouveauté. Le second mandat ne peut être présenté comme copie conforme du premier :
« Aujourd’hui, l’Amérique adresse un nouveau discours aux peuples du monde. Que tous ceux qui connaissent la tyrannie et le désespoir le sachent : les États-Unis n’ignoreront pas votre oppression, ni n’excuseront vos oppresseurs. Lorsque vous vous lèverez, nous nous lèverons avec vous… »
N’ignoreront pas ou n’ignoreront plus ? Même circonstanciels, il y a des futurs pleins de sous-entendus antérieurs. Car, des peuples opprimés plaçant beaucoup d’espoirs dans ce devoir d’ingérence, il ne doit pas être très difficile d’en identifier quelques-uns. Il suffirait, pour concrétiser ce discours, que l’administration américaine tire des leçons des rapports pertinents sur la situation des droits de l’homme que le Département d’État dresse chaque année pour chaque pays.
Dont Djibouti. A l’heure où ses relations avec l’ancienne puissance coloniale s’enveniment à la suite des derniers développements judiciaires d’une affaire en forme de serpent de mer, ou de fantôme, et sa nature despotique étant continuellement mise à l’index, nul doute que la position des États-Unis ne sera pas dictée par les considérations géostratégiques de sa nouvelle présence militaire sur notre sol.
Car, nul n’en doute ici : tôt ou tard, le Peuple djiboutien se lèvera contre un régime qui lui dénie le droit au changement démocratique. Et, ce jour-là, nul doute que ses véritables amis seront à ses côtés.
Djibouti-France :
Escalade ou désescalade ?
Les récents rebondissements de la ténébreuse affaire Borrel ont particulièrement assombri le ciel peu serein des relations franco-djiboutiennes. Dernièrement, nos confrères parisiens parmi les plus réputés avaient largement commenté les nouveaux développements de cette affaire qui empoisonne les relations entre Djibouti et Paris. Cela n’a pas été du goût des autorités djiboutiennes sourcilleuses, qui manient depuis l’invective et les menaces à l’adresse du gouvernement français.
Après avoir brutalement interrompu les émissions de RFI en FM, le pouvoir djiboutien a, dans la foulée, procédé à l’expulsion de six coopérants Français. Poursuivant l’escalade anti-française, le régime s’est fendu hier d’un communiqué, attribué au porte-parole par intérim du ministère des Affaires Étrangères. Le ton virulent du texte ne doit pas faire oublier que, cette fois, la Présidence ne s’est nullement mise en avant : Gbagbo est-il passé par là? Notons également que ce communiqué ne met pas directement en cause le gouvernement français, mais les milieux parisiens. Alors, prudence ou désescalade ?
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Campagne présidentielle dans les districts :
Ni figue, ni raisin
La tournée présidentielle commencée le 21 décembre à Arta a pris fin mardi dernier à Obock. Durant quatre semaines le candidat solitaire a vainement tenté de remobiliser ses concitoyens autour de sa personne. Dans l’ensemble des districts visités, les populations locales semblaient peu concernées par cette campagne électoraliste marquée par le gâchis et finalement contre productive pour le candidat unique fatigué, de l’être. Tout comme lui, les populations des districts de l’intérieur sont restées déçues de la prétendue démocratie pastorale version Rpp. Le docteur honoris causa tirera-t-il les leçons de ses échecs ou maintiendra-t-il le mauvais cap ? Quoi qu’il en soit sa marge de manœuvre semble vraiment réduite ! Tout en se refusant à dramatiser la situation, certains de ses proches admettent en privé que cette fois la partie est difficile pour leur héros. Normal, en désaccord sur l’essentiel, ses collaborateurs n’en finissent pas de s’étriper.
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La soif tenaille Yoboki :
La population prise à la gorge
Pendant que le sourcier national en campagne disserte sur sa lutte tapageuse contre la soif, la population de Yoboki perd patience. Ainsi, mercredi dernier, les habitants assoiffés de cette localité aurait bloqué la route de Galafi et des jeunes ulcérés auraient brûlé des pneus sur cette voie très fréquentée. La citerne desservant cette bourgade n’y suffit plus. La population réclame également la mise à leur disposition d’une deuxième citerne de ce district, celle là-même qui serait réquisitionnée depuis août 2000 par le Commissaire du district. Cette citerne est dit-on stationnée dans la résidence du Commissaire lequel en ferait un usage privé. Par ailleurs, on raconte qu’une équipe du génie rural tenterait actuellement de réparer la motopompe défaillante. En attendant que ces messieurs réussissent l’exploit, la population n’en finit pas de protester contre l’absence d’eau courante et la mauvaise gouvernance responsable de cette situation. Rappelons que Yoboki est privé d’eau courante depuis plus de deux semaines. Pendant ce temps, les médias gouvernementaux nous apprennent que le Commissaire d’Arta vient d’inaugurer un nouveau forage réalisé par les Américains à Ali Faren, à l’ouest de Wéa. Les Yobokois devront-ils faire appel aux Américains pour être sauvés de la soif ?
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As-Eyla :
L’électricité a disparu ?
La localité d’As-Eyla dans le sud de Dikhil se plaint de l’absence de courant électrique depuis plusieurs semaines faute de gasoil pour alimenter le générateur électrique. Dans ce gros village fortement peuplé, seuls de petits groupes électrogènes privés appartenant aux boutiques fonctionneraient quelques heures par jour. Le village est plongé dans l’obscurité totale et les moustiques feraient des ravages dans la population. Le Président électrogène aurait-il abandonné cette localité qu’il avait pourtant visitée en catimini en juillet 2003 ?
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Pôle Universitaire :
Monologue ministériel
Lundi dernier, le Ministre de l’Éducation nationale aurait rencontré les étudiants du pôle universitaire pour vanter les bienfaits de la réforme du système de l’Éducation entrepris sous l’actuel mandat présidentiel. Les idées lumineuses du régime en matière d’Éducation sont, on le sait, consignées dans une somptueuse plaquette publicitaire récemment éditée par ce ministère. Durant son monologue, le ministre se serait refusé à répondre aux questions de la future élite nationale, l’enjoignant tout simplement de prendre connaissance de la brochure gouvernementale consacrée à ce sujet. Cela s’appelle la démocratie pastorale en pratique. C’est ainsi que les « démocraties » meurent.
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Dopage politique au khat :
Le régime y a souvent recours
Le journal gouvernemental « La Nation » nous apprend dans son édition de lundi dernier qu’un athlète kenyan David Munyasia a été exclu des Jeux Olympiques de 2004 pour avoir été contrôlé positif au khat. Ainsi, notre confrère gouvernemental peu suspect de blues post khatique écrit le plus sérieusement du monde : « le khat est classé dans la catégorie de produits dopants qui peuvent vous valoir de sanctions sans appel de la part des fédérations internationales ». Quand on songe à l’usage politique que le régime RPP fait de cette plante pour abrutir les citoyens et vu les sommes colossales dépensées à chaque déplacement présidentiel dans la distribution de ce cadeau électoral, on reste dopés.
Sans rappeler que le candidat solitaire, alias docteur honoris causa en agriculture, a investi des centaines de millions de nos francs pour acclimater le khat dans son ranch agropastoral du Day où plus de 10.000 pieds de khat Awaday engloutissent plus d’eau que toute la population de ce village. Khat et 4×4 restent les cadeaux préférés de ce régime alimentaire.
Le peuple devra sanctionner sans appel cette politique de la misère.
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Meeting de l’Aïd-El-Adha :
L’UAD des grands jours
Le traditionnel rassemblement populaire de l’UAD, à l’occasion de l’Aïd, s’est tenu jeudi dernier à l’Avenue Nasser. Dès 8h30, les militants et sympathisants de l’UAD, venus de tous les quartiers de la Capitale, s’étaient massés devant le siège de l’UDJ. La direction de l’UAD est arrivée vers 9h et a aussitôt rejoint la tribune, sous les vivats d’une foule enthousiaste.
Plusieurs dirigeants se sont succédé au micro durant plus de deux heures. Dans leurs différentes interventions, les leaders de l’opposition n’ont pas manqué de critiquer le triste bilan de l’actuel mandat présidentiel, tout en appelant la population à faire barrage au candidat solitaire, responsable de la régression de notre pays. Ce meeting a été ponctué de chants et poèmes des militants. Un poète sexagénaire a même réussi à résumer, dans un Gabay épique, la régression tous azimuts imposée à notre pays par ce régime irresponsable : « Ne voyez-vous pas, chers compatriotes, que ce régime de malheur a précipité notre pays au bord du gouffre ? Sauvons notre patrie avant qu’il ne soit trop tard ! Levons-nous pendant qu’il en est encore temps ! »
Spoliée de sa victoire lors des législatives de janvier 2003, l’Union pour l’Alternance Démocratique a décidé d’ignorer la prochaine mascarade électorale, tant que les conditions de transparence resteront sabotées par le candidat solitaire, spécialiste mondial des hold-up électoraux. L’heure est à la mobilisation pour imposer l’alternance démocratique et non à la compétition faussée d’avance.
Que le candidat à sa propre succession se le tienne pour dit ! La dynamique unitaire est plus solide que jamais, quoi qu’en pense le régime alimentaire et divisionniste. L’union à la base se renforce de jour en jour. L’unité d’action reste notre seul credo.
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Centre informatique de Tadjourah :
Le virtuel est encore virtuel
Lors de la dernière tournée du chef de l’État à Tadjourah, les médias gouvernementaux ont généreusement rapporté les propos d’une mal élue de la région, présentée comme une actrice de développement. Les Jeunes de Tadjourah se demandent toujours si le régime se moque d’eux en vantant l’existence de ce centre informatique qui n’a jamais fonctionné.
Rappelons que le matériel informatique, offert à l’AFT par les Américains il y a plus de deux ans, n’a jamais servi. Les ordinateurs n’ont jamais été branchés et le local demeure douloureusement fermé.
De qui se moque-t-on ? Des donateurs ou des Jeunes chômeurs ? Ainsi va l’esbroufe et le gâchis du RPP.
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Assainissement du quartier 4 :
Enfin des gestes concrets
Nous avions évoqué il y a quelque temps la déplorable condition d’insalubrité imposée aux habitants du quartier 4. Nous apprenons cette semaine que, suite à une réunion interministérielle consacrée à l’insalubrité criante de notre Capitale, les pouvoirs publics auraient commencé à nettoyer ce quartier. Les mères de famille de ce quartier abandonné avaient, à plusieurs reprises, alerté les autorités, en vain.
Depuis quelques jours, des camions et une pelleteuse s’activent dans les rues devenues impraticables de ce quartier, au grand soulagement des riverains qui espèrent, cette fois-ci, que le travail sera bien fait.
La politique « Qushi » du RPP a transformé notre Capitale en dépotoir à ciel ouvert ; c’est là une réalité qui crève les yeux. Le régime en campagne réagira-t-il à temps, avant que les eaux apparemment stagnantes ne l’emportent ?
NÉCROLOGIE |
Nous avons appris avec tristesse le décès survenu à Djibouti lundi 24 janvier 2005 de Dilleita Mohamed Moussa.
Le septuagénaire qui vient de nous quitter était une personnalité politique connue et respectée de Djibouti. Dilleita Mohamed Moussa a été député de Tadjourah durant plus de deux décennies.
Tous ceux qui l’ont connu garderont de lui l’image d’un homme bon, pieux et discret. Il laisse une importante famille composée de veuves, plusieurs enfants et petits enfants.
La Rédaction de Réalité adresse ses condoléances attristées à toute la famille de Dilleita Mohamed Moussa.
Qu’Allah l’accueille en son paradis éternel. Amin.
Les comptes de la Chambre des Comptes (fin)
L’INCOHÉRENCE DES DÉPENSES DE MATÉRIEL
Les dépenses de matériel concernent les biens destinés à servir de manière durable ou ceux consommés de premier usage par les différents services des ministères. Les plus grandes anomalies constatées par la Chambre des Comptes et de Discipline Budgétaire, et les plus fréquentes, sont relevées dans leur consommation, qui ne respecte aucune règle des finances publiques.
Même si, dans l’ensemble, de 1996 à 2001, les dépenses de matériel ont connu une évolution à la baisse, celle-ci n’a pas été constante, connaissant en 1999 un taux de variation à la hausse de près de 60%. D’autre part, cette baisse n’a pas concerné tous les ministères.
Comme nous pouvons le constater dans le tableau retraçant ces dépenses pour l’exercice 2002, c’est l’ensemble des services de l’État qui sont en dépassement. Dans ce domaine comme dans d’autres, le mauvais exemple est montré par la Présidence, qui a plus que doublé avec un écart de près de 115%. Les magistrats de la Chambre prennent bien soin de préciser que tous ces dépassements concernent des chapitres dotés de crédits limitatifs.
Or, la loi consacrant le caractère limitatif des crédits dispose explicitement l’interdiction des dépassements. Leur caractère systématique, leur fréquence et leur importance nous conforte dans la conviction que, parce que la loi est délibérément violée (par le Parlement et par l’Exécutif) tout l’arsenal juridique et juridictionnel dont s’est doté l’État djiboutien ne constitue, pour reprendre la formule désormais célèbre d’un ministre en exercice, que des « parures institutionnelles ». Lequel ministre ne se distingue pas de ses semblables, puisque le ministère dont il a la charge ne fait pas exception en matière de dépassement.
Chacun pourra constater les disparités anormales en dotations entre les différents ministères. Entre la Présidence qui se taille la part du lion et, par exemple le ministère de l’Équipement, l’écart est du simple au sextuple, qui peut se comprendre eu égard au parc (automobile et aérien) de la Présidence qui trouve, malgré tout, le moyen d’être en pôle position en dépassement de crédit. Au total, les dépassements de crédits se chiffrent à près de 58%. Il est anormal que ces dépassements prennent de telles proportions et soient systématiques pour une seule ligne budgétaire.
Banalisées, elles traduisent un mépris du denier public dans un pays sous ajustement structurel.
Tant qu’elle se contentera de constater les anomalies et de les consigner dans un rapport, officiel ou confidentiel, la Chambre des Comptes et de Discipline Budgétaire (CCDB) pourra indéfiniment verser des larmes de crocodile. Nous ne pouvons que compatir à ses états d’âme lorsqu’elle confie que :
« l’analyse effectuée sur l’exécution des dotations du Titre II –Moyens de service- laisse penser que le ministère des Finances fait peu de cas des injonctions de la Chambre et de la manière par laquelle il banalise la gestion des autorisations parlementaires. Dans le rapport sur l’exécution des Lois de Finance de 1999 à 2001, la Chambre des Comptes avait déjà soulevé ces pratiques, dont la récurrence finit par porter préjudice à la crédibilité des autorisations budgétaires. Ce manque d’intérêt est perceptible eu égard aux pratiques énumérées ci-dessous à titre d’illustration… »
Au non respect des autorisations de dépenses et son corollaire le dépassement de crédits, s’ajoutent :
– les mouvements contradictoires et incohérents des crédits : sous ou surévaluation des dotations initiales; lois de Finances rectificatives qui gonflent artificiellement et en pleine gestion les crédits initiaux; crédits sans aucun emploi reconduits dans chaque budget.
– les imputations budgétaires irrégulières : outre qu’elle constitue une infraction à la règle de la spécialité des crédits, elle a pour effet de nuire à la transparence des comptes.
La plus flagrante que nous relatons ici est le crédit de 100.000.000 FD (cent millions FD) ouvert par la loi de Finances 2002 destiné à la « Réhabilitation des zones de conflit » et consommé dans le cadre du projet de développement urbain de Djibouti. Lequel était déjà très largement doté.
Ce seul exemple de délinquance politique dénote avant tout le mépris à l’endroit des zones et des populations concernées, comme il discrédite les alliés du RPP qui, la tête plongée dans le mangeoire, ne disent mot et donc consentent.
– les avantages en nature et en espèces non réglementaires : les magistrats ayant pris note des diverses mesures tendant à ajuster les dépenses de personnel aux ressources du pays depuis plus d’une décennie, ont relevé en 2002, comme les années précédentes, de nombreuses irrégularités dans ce domaine et constaté :
« une fois de plus, que le ministère des Finances ne semble se fier ni à la réglementation, ni aux recommandations de la Chambre et qu’en dépit de tout cela, il persiste à octroyer des avantages en espèces et en nature à certains agents de l’administration qui n’y ont pas droit.» Comme de bien entendu, aucun nom de griot n’est cité.
Ajoutons que les investigations de la Chambre des Comptes ne portent curieusement pas sur les années fastes, pour certains (1995-1996) et les millions de dollars engloutis par les projets de réhabilitation (Obock notamment) et financés par le don multi et bilatéral.
Nos magistrats n’ont pas trouvé anormal que n’ait pas été versée au Trésor National la manne providentielle que constituent les loyers payés par les puissances militaires alliées présentes sur notre sol.
Les missions de la CCDB ne se limitent pas à l’assistance et au conseil du Parlement et de l’Exécutif, comme elle s’en est, sans doute à son corps défendant, contenté depuis sa création. Ni au répertoriage des irrégularités constatées et à l’émission de recommandations aux malentendants qui nous gouvernent.
Faute d’exercer ses missions juridictionnelles inhérentes à sa mission en sanctionnant les infractions commises et leurs auteurs ( de la condamnation à l’amende à la poursuite judiciaire, en passant par la mise en examen et la sanction administrative, la Justice dispose d’un large éventail de moyens pour obliger l’Exécutif et les justiciables à se conformer à la règle), la CCDB est appelée à être un ornement de plus dans les parures institutionnelles et à laquelle semble la destiner le sommet de l’État.
Mais le travail de fourmi exécuté par les magistrats ne sera pas tout à fait vain : son rapport général public n’étant pas tombé dans l’oreille que de malentendants du pouvoir, « Réalité » en ayant pris bonne note, nous ne nous lasserons pas d’œuvrer, d’une manière ou d’une autre, à l’observance de ses recommandations ; pour faire de notre pays ce qu’il doit être : un État de droit.
Cautionner la fraude ? Non merci !
La stricte application du principe de réciprocité aurait voulu que nous n’écrivions pas cette lettre : depuis les élections législatives de janvier 2003, le régime s’est inscrit aux abonnés absents en refusant impoliment de répondre aux lettres de l’UAD. Que ce soit le chef de l’État ou son ministre de l’Intérieur, ils n’étaient apparemment pas au courant qu’une opposition digne de ce nom puisse exister ici. Surtout que l’organe de presse du parti au pouvoir affirme sans hésiter que l’opposition djiboutienne est antinationale : pourquoi donc nous avoir alors autorisé à exister et pourquoi nous tolérer encore ? Toujours est-il que, par courrier adressé à chacun des partis regroupés au sein de l’UAD, le ministre de l’Intérieur nous a gentiment invités à participer à la prochaine malversation de la prétendue Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI). Invitation à laquelle l’UAD a répondu par le courrier ci-dessous reproduit.
Le prix d’achat
JE T’ACHÈTE, TU TE VENDS
Nous avons toujours dit que ce régime n’était pas tribaliste : il est tout bêtement méchant. Surtout quand des prétendus opposants le rejoignent parce qu’une posture d’opposition ne rapporte rien financièrement, à eux ou à leur famille. Et tant pis pour ceux qui, naïvement, avaient pensé comprendre que ces opposants de circonstance défendaient une cause dans laquelle tous nos concitoyens se reconnaîtraient. C’est ce que dénonce ce communiqué du président de la Ligue Djiboutienne des Droits Humains (LDDH).
Djibouti, le 24 janvier 2005
Au Ministre de l’Emploi et de la Solidarité Nationale.
Monsieur le Ministre,
Dans le cadre de la solidarité nationale, je tiens à attirer votre aimable attention sur le licenciement abusif de Monsieur Hassan Ali Djama qui a pris en plus l’allure d’une disparité inadmissible doublée d’un flagrant délit de discrimination sociale avec la réintégration pour des raisons uniquement familiales du fils de M. Ahmed Boulaleh. Intégration qui fait suite au ralliement du PSD à la Mouvance Présidentielle.
C’est triste de l’écrire mais hélas c’est la stricte vérité.
Rappelant :
Que monsieur Hassan Ali Djama, fils de famille modeste, ainsi que Fayçal, le fils d’Ahmed Boulaleh Barre ancien Ministre de l’Intérieur puis de la Défense, homme d’affaire très important, ont travaillé tous les deux au Trésor National durant la période de cinq ans de privation des droits civiques de l’ancien opposant ;
Que M. Fayçal Ahmed Boulaleh et M. Hassan Ali Djama durant une période de dépression ont été hospitalisés à l’Hôpital Peltier en 1999 ;
Que, malgré les certificats médicaux, une Décision de révocation du 10 avril 2000 prise par le Président de la République, stipule en ses articles 5 et 6 :
Article 5 : M. FAYCAL AHMED BOULALEH inspecteur 2 classe – 5° échelon du Corps du Trésor et des Contributions, en service au Trésor National, est révoqué de son emploi à compter du 1er janvier 2000.
Article 6 : M. HASSAN ALI DJAMA, contrôleur 2 classe- 5° échelon du Corps du Trésor et des Contributions, en service au Trésor National, est révoqué de son emploi à compter du 1er janvier 2000.
Que malgré le certificat médical de reprise du Travail aucune considération n’a été donnée suite à cet abus de pouvoir !
Que les raisons de ces licenciements ne visaient uniquement que le fils d’Ahmed Boulaleh ancien Ministre de la Défense nationale, puis traîné et jeté en prison, tandis que Hassan Ali Djama dont le père est un simple retraité apolitique a été victime d’une injustice « collatérale » du fait qu’il a travaillé dans le même service et surtout qu’il était hospitalisé et en congé de maladie, tout comme le jeune Fayçal, à la même époque ;
Que dans le cadre des négociations entre d’une part, le Président du Parti RPP, et d’autre part, MM. Moumin Bahdon et Ahmed Boulaleh respectivement Président et Vice-président du GDR puis ensuite du PSD, seul M. Fayçal Ahmed Boulaleh a bénéficié de la réintégration dans son service d’origine, alors que M. Ahmed Boulaleh s’était engagé en ma présence lors d’une réunion des responsables du GDR d’insérer dans ses négociations la situation de ses fils AMIN et FAYCAL ainsi que le jeune HASSAN ALI DJAMA qui avait été abusivement révoqué comme son fils et ce dans le cadre des répressions politiques contre les familles des opposants;
Que jusqu’à présent, malgré les différentes promesses des membres dirigeants du PSD le statu quo persiste sur la réintégration de M. HASSAN ALI DJAMA. Aucune poursuite judiciaire pour abus de pouvoir et prise de Décision non seulement hâtive mais surtout arbitraire, n’est possible car la juridiction concernée est totalement muselée ;
Qu’il est bon à faire remarquer que Monsieur Hassan Ali Djama est très connu à Arta pour avoir vécu lorsque son père y travaillait, et qu’il est très apprécié par les jeunes des quartiers où vous et votre collègue des Affaires Etrangères seront prochainement appelés à faire campagne pour votre candidat lors des prochaines élections présidentielles.
POUR CES RAISONS
La Ligue Djiboutienne des Droits Humains (LDDH) vous saisit Monsieur le Ministre et vous demande d’intervenir auprès du Chef de l’Etat, afin que justice soit faite en réintégrant dans son corps d’origine M. Hassan Ali Djama ;
La LDDH lance un Appel pressant à la Communauté nationale et internationale pour que cessent ces discriminations à caractère sociales voire tribales ;
La LDDH demande à la FIDH, à Amnesty Internationale, au Haut Commissariat des Droits de l’Homme, à l’UIDH et au BIT de faire pression afin d’accorder la Totale Indépendance à la Justice en République de Djibouti, et d’exiger, notamment la relance de la Juridiction habilitée à pénaliser toutes les formes d’Abus de pouvoir. Dans le cas contraire prévoir une juridiction internationale pour sanctionner de tels abus.
Avec mes sentiments déférents et amicaux
Signé : NOEL ABDI Jean-Paul
Pour information :
Le Ministre de la Justice, des Droits de l’Homme ;
Le Ministre des Affaires Etrangères, de la Coopération, des Relations avec le Parlement.
Pour notre part, étant donné que le salaire de certains membres de notre Rédaction a été suspendu dès la parution de notre journal, il est de notre devoir de dénoncer cette prime à la reptation par laquelle le régime veut favoriser tous ceux qui, sans état d’âme le rejoignent en sacrifiant les sacrifices consentis par les autres.
De plus, le ministre de l’Intérieur nous ayant gentiment invités à cautionner la pitoyable facétie de la CENI, nous ne pouvons manquer de rappeler les propos du président de la LDDH qui, y ayant participé au nom du parti dont il se désolidarise aujourd’hui, avait reconnu dans une interview publiée par notre journal qu’« Il n’y a jamais eu de rapport final officiel… Le rapport final a tout simplement été soumis au président de la République avec « un chèque en blanc » de la Commission Électorale Nationale Indépendante » Inutile d’insister.
Ne jamais oublier Auschwitz
Le monde commémore demain 27 janvier le soixantième anniversaire de la libération d’Auschwitz. Pour mieux marquer la gravité de l’instant, et inviter toute la planète à un devoir de mémoire constamment actualisé par les génocides qui menacent encore, l’Assemblée générale de l’ONU a, pour la première fois, tenu à s’associer à l’événement. Car la dénonciation du sionisme qui opprime le Peuple palestinien ne peut aucunement servir de prétexte pour le négationnisme qui tente vainement de nier l’Holocoste.
« Et j’aimerais maintenant le dire en ce jour mémorable peut-être pas seulement pour nous, Allemands : j’ai été dans ma vie très souvent prophète et ai été le plus souvent raillé. À l’époque de mon combat pour le pouvoir, c’était en première ligne le peuple juif qui accueillait avec des rires mes prophéties selon lesquelles je serais un jour, en Allemagne, à la tête de l’État, que, par là, je prendrais en charge le peuple tout entier et qu’ensuite, parmi bien d’autres problèmes, je donnerais également une solution au problème juif. Je crois que ce rire, à l’époque retentissant, du judaïsme en Allemagne a été sur ces entrefaites déjà ravalé dans la gorge. Je veux à nouveau aujourd’hui être prophète : si la finance juive internationale en Europe et hors d’Europe devait parvenir encore une fois à précipiter les peuples dans une guerre mondiale, alors le résultat ne serait pas la bolchevisation du monde, et par là la victoire du judaïsme, mais au contraire l’anéantissement de la race juive en Europe » Ainsi parlait Adolf Hitler à la tribune du Reichstag le 30 janvier 1939.
«Parmi les quelque 10 millions de juifs européens se trouvent, selon mon impression, au moins 2-3 millions d’hommes et de femmes tout à fait aptes à travailler. Au vu des extraordinaires difficultés auxquelles nous pouvons nous attendre sur la question du travail, mon point de vue est que ces 2-3 millions de personnes sont dans tous les cas à retirer et à conserver. Bien entendu, cela ne vaut que si on les rend en même temps incapables de se reproduire. Il y a à peu près un an déjà, je vous avais indiqué que certains de mes mandataires avaient réalisé toutes les expériences nécessaires pour atteindre ce but. Je voulais rappeler une nouvelle fois cet état de fait. Il n’est pas question, dans ce cas, de stérilisation du type de celles pratiquées sur des dégénérés, parce qu’elles sont aussi voraces en temps qu’en argent. Une castration par rayon X, cependant, n’est pas seulement relativement peu coûteuse, mais peut aussi être appliquée sur des milliers et des milliers de personnes dans le temps le plus bref. » Ainsi suggérait froidement Victor Brack dans une lettre en date du 23 juin 1942 adressée à Himmler.
Mais c’est à la Conférence de Wannsee, tenue le 20 janvier 1942, que fut systématisé le génocide du Peuple juif : la purification de l’espace vital allemand devait impérativement passer par la déportation des quelque 11 millions de Juifs d’Europe. Dans sa volonté s’instaurer un 3ème Reich « nettoyé des Juifs », Hitler conçut la « solution finale » après que d’autres alternatives eurent échoué, dont la déportation vers Madagascar. C’est avec l’occupation de la Pologne que des camps d’internement ont été installés ou agrandis, dont celui tristement célèbre d’Auschwitz-Birkenau, libéré par l’Armée soviétique le 27 janvier 1945.
Les massacres à la mitrailleuse étant trop artisanaux et pas assez rentables, ces camps étaient destinés à donner une dimension industrielle à la folie meurtrière nazie. Ainsi, à Auschwitz-Birkenau, plus d’un million de personnes furent exterminées : 960.000 juifs, 75.000 Polonais, 21.000 Tziganes et 15.000 prisonniers de guerre soviétiques. Mais ce camp n’était pas le seul à accueillir les convois de condamnés à mort déportés de toute l’Europe : Treblinka (750.000 victimes), Belzec (550.000) Sobibor (200.000), Chelmno (150.000), etc. Et dire qu’il a fallu attendre les années soixante pour que les témoignages des rescapés de ces camps d’extermination soient enfin pris en considération et donnent toute la mesure de l’horreur.
Dès leur arrivée à Auschwitz, les prisonniers étaient sélectionnés en fonction de leur endurance physique. Les plus résistants servaient de main-d’œuvre à Auschwitz I et dans les usines de la région ; tous les autres, c’est-à-dire l’immense majorité, étaient immédiatement tués, jusqu’à 20.000 par jour, au Zyklon-B ou dans des fours crématoires, dans d’atroces douleurs. Au total, ce seront près de six millions de juifs qui auront été tués dans ces camps d’extermination.
C’est pour rappeler la permanence de cette folie génocidaire que les Nations Unies ont tenu à participer cette année au soixantième anniversaire de la libération d’Auschwitz. Parce que l’Holocauste, « Ce n’est pas quelque chose que nous pouvons consigner dans un passé lointain et oublier. Le mal qui a exterminé six millions de juifs, et d’autres, dans ces camps, est le même qui nous menace encore tous aujourd’hui » a rappelé Koffi Annan.
Ce rappel de l’Histoire prend une dimension particulière, à l’heure où s’enlise le processus de paix au Proche-Orient : au prétexte de se défendre contre un terrorisme qui n’est que l’expression désespérée de la résistance, l’État sioniste perpètre quotidiennement des crimes ordinaires qui sont autant d’arguments au service des négationnismes de tous bords.
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