Réalité numéro 93 du mercredi 21 avril 2004 |
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Sommaire
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Directeur de Publication :
ALI MAHAMADE HOUMED Codirecteur : MAHDI IBRAHIM A. GOD Dépôt légal n° : 93 Tirage : 500 exemplaires Tél : 25.09.19 BP : 1488. Djibouti Site : www.ard-djibouti.org Email : realite_djibouti@yahoo.fr
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Éditorial
BORREL M’A TUER
LA FRANCE, SES MORTS, NOS PROBLEMES…
On l’a vu avec un certain 11 septembre, qui n’a pas le même sens à Santiago et à New York, le 7 février est perçu différemment selon que l’on est du régime ou de l’opposition éprise de paix. Ainsi, alors qu’il se passait des choses à Paris qui intéressaient au plus haut point nos compatriotes fatigués de la guerre, et tandis que le Parquet djiboutien prenait officiellement position à propos d’une affaire Borrel en cours d’instruction ailleurs, cependant que telle jeunesse d’Etat manipulée et autres first class Sittizen scandaient « Touche pas à mon Président », un illustre invité débarquait discrètement à l’aéroport d’Ambouli et s’installait dans une suite luxueuse du Sheraton, aux frais du contribuable djiboutien bien entendu. Mais ce n’était certainement pas trop cher payer, puisqu’il s’agissait tout simplement de Son Excellence Monsieur l’Ambassadeur de France à Addis-Abeba, surtout connu pour avoir accessoirement été le grand patron de la DGSE, la Piscine. Hasard ? Piscine dans laquelle semble aujourd’hui se noyer, à voir le communiqué surréaliste (restons polis) que la Présidence djiboutienne a rendu public à la suite de la levée du secret-défense qui frappait jusque-là certains rapports d’un agent du contre-espionnage français (son prénom n’est pas Jacques) relatifs à la mort du juge Borrel aux environs du Goubet. Par décence, nous ne reprendrons pas l’outrance des propos : TF1 est une chaîne privée, il y a plus de grèves à RFI qu’à la RTD et insulter un mort n’est guère glorieux. Tout comme il est évident que la France n’a nullement besoin de nous pour se défendre : tout juste devons-nous, au nom du Peuple Djiboutien, lui faire part de notre profonde désapprobation face à un communiqué présidentiel aussi irresponsable.
Par contre, en accusant tous azimuts l’ancienne puissance de tutelle, la Présidence a du même coup procédé à un révisionnisme historique que nous devons dénoncer avec véhémence : parler de « la stratégie de partition du pays conçue et développée par la France » relève de la plus extrême légèreté politique. Même si une telle négation des causes profondes du conflit civil auquel nous pensions avoir définitivement mis fin renvoie immanquablement aux propos que tenait en 1992 le Chef de Cabinet de la Présidence dans les colonnes du journal Al Hayat : les Afar constituent une minorité nationale outrageusement favorisée par la France. Trouver aujourd’hui une coloration tricolore à la naissance du FRUD est proprement indigne de qui prétend œuvrer à la réconciliation nationale : nier les injustices n’est qu’une autre façon d’inciter à la division, donc à la résistance des victimes. A terme, la violation systématique de l’Accord de paix porte les germes d’une future discorde aux conséquences incalculables : uniquement préoccupé par sa réélection, le Chef de l’Etat n’en a cure pour l’instant. A ses risques et périls !
Surtout, oser prétendre qu’ « il est permis de supposer donc que si le Président Ismael Omar Guelleh gêne la France, c’est parce qu’il s’est toujours posé à ses interlocuteurs comme un dirigeant qui a veillé à la promotion de l’intérêt national », et sans prendre la défense d’une France dont il serait bien difficile de démontrer en quoi l’instabilité de notre pays assurerait la stabilité de sa base, nous mettons sans trop de difficultés ledit Président au défi de démontrer la plus petite de ses contributions en faveur de cette paix civile. Violation systématique des principales dispositions de l’Accord du 12 mai 2001, fraudes électorales institutionnellement organisées, corruption généralisée, abandon complet des districts de l’Intérieur dont la réhabilitation des rares infrastructures publiques est laissée à la générosité de l’Armée française : on chercherait vainement une circonstance atténuante pour expliquer un tel acharnement à saper l’Unité du pays et à entacher notre fierté nationale.
Aux dernières nouvelles, Maître Vergés, le défenseur de Saddam qui a tué et d’Omar qui n’a pas tuer, ne serait pas du tout disposé à défendre les intérêts de l’Etat djiboutien dans cette affaire : entre l’originalité et le mercenariat, il y a le fossé de la décence militante, petit pour certains, infranchissable pour d’autres.
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Brèves nationales
Le khat héliporté :
L’autre opération de secours ?
Mardi 13 avril, jour noir pour notre pays à cause des inondations meurtrières et destructrices : le réseau routier reliant la Capitale au reste du pays était coupé à hauteur de Wéa suite à l’effondrement d’un petit pont stratégique.
Alors que les hélicoptères de l’armée française (six selon le Général Pons, gérés par une cellule de crise installée bien avant celle du plan orsec national) participaient activement aux opérations de secours, celui de l’armée djiboutienne aurait effectué pendant ce temps une mission peu glorieuse dans ces circonstances aussi dramatiques.
En effet, si l’on en croit de nombreuses sources à Dikhil et à Djibouti, tandis que d’autres se noyaient à Ambouli, un hélicoptère des FAD se serait posé à Dikhil dans l’après-midi avec à son bord des sacs de khat destinés aux consommateurs de cette ville et de cette région.
Décidément, sous ce régime de blabla et de mauvaise gouvernance, l’inévitable et précieuse plante verte semble être aussi importante que les opérations de secours aux sinistrés. Time is money, dit-on. Sauver la vie d’un Djiboutien en danger ne serait-il pas plus urgent que de nuire à sa santé en livrant le khat de peur qu’il ne flétrisse ? Honte à ce régime insouciant préférant abrutir son peuple en faisant de la distribution du khat une priorité nationale, aux dépens des droits de la personne humaine.
Le devoir d’assistance :
L’armée française en première ligne
A la suite des pluies torrentielles qui se sont abattues sur notre pays, le petit pont vieillissant datant des années soixante et situé côté Djibouti-ville à l’entrée du petit village de Wéa, a cédé sous la pression des eaux. Cet ouvrage d’une dizaine de mètres de long sur environ cinq de large, a certainement été fragilisé par le passage quotidien de centaines de poids lourds. Mal entretenu, malgré les sommes colossales engrangées par le Fonds d’Entretien Routier, sa rupture a isolé la Capitale de tous les districts de l’Intérieur, interrompant également le trafic commercial routier avec l’Ethiopie.
Une fois de plus, ce sont les engins de génie de l’armée française qui sont arrivés les premiers sur les lieux pour mettre en place une déviation de plusieurs centaines de mètres et rétablir la circulation sur cette voie vitale.
Par ailleurs, la pénurie d’eau courante qui a frappé la localité d’Arta à la suite de ces inondations a été évitée grâce à l’assistance technique de l’Armée française qui a mis plusieurs de ses camions-citernes à la disposition des habitants de cette ville.Après cela, les autorités djiboutiennes pourront toujours clamer sans crainte du ridicule leur prétendu nationalisme sourcilleux et leur indépendance orgueilleuse.
Il est prétentieux et irresponsable de narguer les autres quand on est à ce point inefficace : la souveraineté, cela se voit d’abord sur le terrain de la réalité concrète.
Après les inondations catastrophiques :
La déroute de la pensée… officielle
Emu ou déphasé ? Après une ballade en hélicoptère au-dessus de la Capitale sinistrée, le Chef de l’Etat est brutalement redescendu sur terre pour se rendre compte sur le terrain de l’étendue du désastre. Dans une déclaration recueillie et copieusement diffusée par les médias officiels éberlués, et suivie par les citoyens auditeurs et téléspectateurs écœurés par un tel mépris, le chantre du développement agropastoral a livré clés en main sa solution-miracle face aux dangers représentés par les crues de l’oued d’Ambouli.
Selon notre illustre expert en développement tous azimuts, son gouvernement compte prochainement installer des retenues d’eau tout le long de l’oued meurtrier. Une solution qui aurait à ses yeux (son troisième œil, comme dirait le lama Lobsang Rampa) un triple avantage : reconstituer la nappe phréatique, permettre l’installation de nouveaux périmètres agricoles et enfin briser l’élan dévastateur des crues de l’oued d’Ambouli. Vaste programme ! Il fallait y penser. Comme quoi son séjour au Japon et son diplôme de docteur honoris causa sont largement profitables à son petit et malheureux pays.
Le seul hic : dès le lendemain, son incorrigible gouvernement lançait un appel à l’aide internationale, non pour venir au secours d’un pays et d’une population sinistrés, mais pour la mobilisation de 20 millions de dollars (américains) devant servir à sécuriser et à réaménager le lit de l’oued d’Ambouli. Il faudrait savoir : y a t-il deux politiques différentes de mendicité dans ce régime présidentialiste de non-droit et de mauvaise gouvernance ?
Echaudés par les multiples et criminels détournements de l’aide internationale dont s’est rendu coupable ce pouvoir prédateur et malfaisant, il est fort improbable que les donateurs se bousculent pour mettre leur obole dans la tirelire gouvernementale.
Surtout que, tout le monde n’ayant pas la mémoire courte, certains se souviennent encore que toutes les promesses gouvernementales consécutives aux crues de 1994 sont restées lettre morte. Ceausescu adorait les titres ronflants tels que « Génie des Carpates » ou « Danube de la pensée » : notre grand penseur local devrait se faire appeler « Oued de l’impensé » et ses fans deviendraient les mauvais «Génies des carpettes ».
Affaire Borrel :
Matraquage et bourrage de crâne
Dans une réaction épidermique et disproportionnée qui fera certainement date dans les annales de la diplomatie menaçante, la Présidence djiboutienne (sinistrée ?) s’est fendue d’un communiqué rageur à l’encontre du gouvernement français coupable à ses yeux de n’avoir pas réussi à museler ses médias. Si, dans une logique despotique, le régime djiboutien confond TF1 et RTD, libre à lui de délirer en pure perte. Mais, quand il en vient à se réclamer de la légitimité populaire pour hausser le ton et gonfler ses poumons, nous disons ça suffit !
Ce communiqué maladroit et suffisant ose ainsi conclure : « Djibouti est déterminée à forger sa destinée propre. Le peuple djiboutien conscient des enjeux soutient le Président et son gouvernement dans la poursuite des objectifs de développement ».
Comme si la France investissait à perte à Djibouti depuis 1977 ! Pour l’heure, les seuls objectifs de développement visibles, privilégiés par le régime RPP, c’est le matraquage politicien et le bourrage de crâne. Pour notre part, nous resterons sourds aux lamentables lamentations d’un pouvoir condamné par l’Histoire.
Djibnet :
Programme pas net !
Le seul monopole normalement admissible devrait être celui contracté par les liens sacrés du mariage. Pour tout le reste, sérieux comme frivole, travail comme loisir, c’est la libre concurrence qui peut seule garantir la meilleure défense des consommateurs. Malheureusement à Djibouti, rien ne fonctionne selon ce sain principe. En politique, c’est l’ancien parti unique au pouvoir qui revendique le monopole du sérieux, reléguant les partis d’opposition et tous leurs sympathisants dans l’ignorance et l’insignifiance : drôle de conception de la démocratie.
Dans le domaine du ludique, lui fait écho le monopole de Djibnet sur la prestation de services satellitaires, avec son bouquet numérique à géométrie variable.
Pour éviter tout malentendu, rendons tout d’abord hommage aux techniciens de cette société pour la qualité et la constance dont ils font preuve depuis le lancement de cette technologie.
Ce problème n’est pas de cet ordre, il relèverait plutôt d’une politique commerciale qui gagnerait à mieux être définie. Ne parlons même pas des changements inopinés de programmation, quoique certains abonnés rouspètent contre une valse des chaînes souvent injustifiée.
Ainsi, les téléspectateurs auraient aimé être prévenus que la diffusion de FR3, sur laquelle était retransmise la finale de la ligue opposant Nantes à Sochaux serait interrompue dès… le coup de sifflet annonçant le début du match. Passons, car il y a plus grave.
Ainsi, profitant de la fermeture de CFI-Afrique, Djibnet a modifié la composition de son bouquet, en y introduisant quatre autres télévisions accessibles sous le nom de superbouquet au prix de 10.000 FD. Il y a fort à parier que peu d’abonnés se sont rués sur cette formule peu attractive : débourser 3.000 FD supplémentaires pour 4 télés ne diffusant que films et séries (dont 13ème rue spécialisée dans les policiers) et pour une qualité de réception fortement parasitée par des interférences transformant, dans certains secteurs, le plaisir de regarder la télévision en calvaire pénible pour les yeux.
De plus, pour mieux fidéliser ses clients à ses débuts, Djibnet distribuait gratuitement une petite brochure détaillant l’essentiel de la grille mensuelle des principales télévisions de son bouquet numérique.
Le problème, c’est que la gratuité ne s’imposant nullement pour une telle prestation (avec une incidence non négligeable sur le bénéfice de la société), Djibnet l’a interrompu un temps pour en faire depuis ce mois-ci une marchandise payante, au prix modique de 200 FD. Il s’agit là d’une véritable arnaque contre laquelle nous tenons à mettre en garde nos lecteurs, ce qui aurait dû relever de la vigilance militante de telle association de défense des consommateurs, car l’acheteur n’en a nullement pour son argent.
En effet, seuls les programmes de quatre ou cinq chaînes (sur les 25 officiellement disponibles) sont concernés : TV5, Canal+, Movie Channel, 13ème rue et la moitié de RTL9. c’est vraiment peu, et en tous les cas indigne de s’appeler programme mensuel du bouquet Djibnet ! Avec le développement de l’Internet, nous invitons les personnes concernées à se rendre sur le web ( par exemple sur le site fr. yahoo. Com) pour y consulter toute la programmation qu’elles désirent.
Il y a même possibilité de recevoir quotidiennement les différentes grilles de programme.
En attendant qu’une concurrence s’organise, pour le plus grand bénéfice des consommateurs, il serait dommage que cette dynamique société déçoive aujourd’hui sa clientèle avec de telles approximations commerciales : le marché est là pour son expansion, à condition de se démocratiser et de gagner en prévisibilité.
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Cinquièmes propos du Président (2)
La démagogie contre la vérité (Seconde partie)
« L’Economie dérape : Quand le régime nous donne raison » titrait Réalité dans son édition du 17 avril dernier ; analyses du Budget de l’Etat en partie corroborées par celles du pouvoir en place, dont la politique du mensonge ne peut continuellement tromper le monde. Non seulement les incohérences entretenues par le pouvoir, concernant surtout la gestion des deniers publics, ne peuvent rehausser le niveau de vie de la population, mais engendrent aussi des difficultés quant à nos rapports avec les institutions de Brettons Wood, le sérieux et la transparence n’étant pas une culture du parti au pouvoir. La confrontation entre la dure réalité quotidiennement vécue par nos concitoyens et l’imaginaire succès économique d’un Président au terme de son mandat, appelle quelques commentaires supplémentaires sur les propos du numéro djiboutien.
Le Chef de l’Etat croyant que les retombées financières engendrées par la lutte contre le terrorisme allait mettre à l’abri de tout besoin notre pays ruinée par sa mauvaise gestion, pérorait en juin 2003 dans « Marchés Tropicaux » à propos du FMI «qu’il nous fiche la paix».
Rajoutées aux différentes recettes et plus-values opaques tirées des cessions-concessions des complexes aéroportuaires et autres privatisations des entreprises publiques, en plus des projets d’investissement engagés à Doraleh, Djibouti pouvait se passer des institutions financières internationales, voilà que cette-fois, le Président de la République tente de corriger sa « gaffe » de l’été dernier lors de sa dernière Conférence-bilan.
Or, le FMI connaissant les pratiques budgétivores du régime, ne l’entend pas de cette oreille et demeure très explicite avec Djibouti dont le Chef de gouvernement considère maintenant que le pays a « besoin de réformes et de discipline plus que la Banque Mondiale et le FMI ».
Malgré ces aveux, le Document de Réduction Stratégique de la Pauvreté présenté par notre gouvernement ne peut recevoir l’aval du FMI pour la simple raison que les réformes engagées depuis six ans n’ayant pas été rigoureusement suivies, la situation économique et sociale du pays reste encore fragile.
Les experts du FMI, après avoir décortiqué le dossier économique du pays en décembre dernier, ont constaté que ni le Budget 2003 ni celui de 2004, en cours, ne garantissaient pas une croissance économique soutenue, encore moins une quelconque réduction de la pauvreté.
Partant de là, ces experts ne comprennent pas comment un pays qui privatise des entreprises publiques et met en concession d’autres, devenues défaillantes pour mauvaise gestion, puisse en créer de nouvelles sur financement public, ces dépenses alourdissant davantage un Budget déjà déficitaire : une folie en somme.
Concernant les recettes tirées de la présence des forces étrangères dans notre pays et celles (opaques) reçues de Dubai Port Authority pour les complexes aéroportuaires et portuaires, le FMI suggère que le bon sens serait d’arrêter les investissements non-générateurs de richesses, donc de croissance et d’éponger l’énorme dette publique intérieure en procédant à la démobilisation, en honorant les salaires et retraites gelés, les cotisations sociales des fonctionnaires, les factures impayées dues aux entreprises publiques et privées du pays, en remboursant les prêts contractés auprès des banques de la place, etc.
En effet, la rigueur économique imposée depuis des années ayant eu pour conséquence d’instaurer une pauvreté structurelle (estimée à 74% de la population) il est encore plus choquant de voir la propension du régime à l’endettement auprès des Etats et des institutions financières. Choquantes ont aussi été pour les experts du FMI les dotations budgétaires au profit d’une diplomatie « inconsidérablement mobile et mobilisante » et l’augmentation exponentielle des « dépenses courantes ». Un choix à l’opposé de toute logique économique et qui a conduit le FMI à «conseiller» au gouvernement de dévaluer notre monnaie par rapport au dollar. Et ce pour attirer des investisseurs étrangers.
Tout cet amer constat ne semble pourtant pas atténuer les prétentions du Chef de l’Etat qui, dans ses « cinquièmes propos » de sa conférence-bilan, maintenait que son document présenté aux institutions de Brettons Wood avait été discuté à tous les niveaux du pays depuis deux ans, avec la société civile, les administrations civiles et le secteur privé. Ce qui est totalement faux, puisque ni les associations indépendantes ni les syndicats indépendants n’ont eu bien entendu l’honneur de participer à ce programme engageant le pays.
Toutefois, les conditions posées par le FMI sur le nouveau dossier du gouvernement (qui d’ailleurs avait été « prié » de clairement budgétiser toutes les recettes tirées de la présence des forces étrangères dans le pays) partent du postulat que ni les coûts exogènes du pétrole, ni les raisons climatiques invoquées par le Président n’expliquent la situation de délabrement économique et social du pays. Les causes sont à rechercher ailleurs…dans la mauvaise gouvernance.
Sans disserter sur une fausse stabilisation des finances publiques, ni sur l’inexistante réduction de la dette et du déficit, encore moins sur une imaginaire relance économique, le piteux état de l’économie nationale est malheureusement ressenti par tout un chacun. Le paraître étant le point fort de ce régime, les prétentions présidentielle et électoralistes relèvent essentiellement de la mystification. Pour preuve, le Premier magistrat du pays considère encore que « la corruption relève d’une question d’éducation… ». Une conception du vol somme toute compréhensible de la part de ce régime prédateur. En y regardant de plus près, si la corruption relève d’une question d’éducation, il en est de même pour l’impunité.
Pour contredire une telle abbération, rappelons que notre culture de nomade n’a jamais toléré le vol, de bétail ou autre,considéré comme acte illicite engageant la responsabilité de la famille, du clan, de la tribu et donc réprimé en conséquence. Que le vol soit individuel ou collectif, outre l’indiscutable restitution du bétail, la réparation du dommage causé aboutissait selon des règles de droit coutumier précis, à défaut par la force.
Cependant, là ou le bât blesse, c’est quand les médias du régime prétendent que le Président a engagé une lutte féroce et productive contre la corruption. Une telle conception tendant à présenter la corruption comme un fait de culture trahit une aliénation culturelle que l’opposition ignore totalement et condamne.
Les voleurs de bétail étaient traduits devant une juridiction traditionnelle. Des règles de conduite, des lois non-écrites mais bien connues régissaient la vie intercommunautaires et celle entre communautés.
Comme le bétail n’est pas du tout la propriété du chamelier ou du berger rémunérés, les biens publics ne sont pas non plus la propriété des responsables politiques ou administratifs qui en ont la charge. Le vol de bétail comme la corruption relèvent d’une expropriation illicite, un abus de biens sociaux ou un détournement devant être sévèrement sanctionnés par la justice.
Ainsi, la tolérance active ou la mansuétude passive étant autant d’incitations à la délinquance financière, la conception que se fait de la corruption le Président de la République rejoint le dicton somali qui dit : « Dameeri isku halayn bay hooyadeed dabada uga nuugtaa » (Bébé-âne tète sa maman ânesse par le derrière). Comme le bébé ne craint pas les coups de sabot de sa mère-ânesse, il est normal que détourner les fonds publics particulièrement sous cette présidence relève de la même moralité que celle du diction suscité. En conclusion, la banalisation de la corruption ainsi présentée ne peut que nuire tant aux corrompus qu’aux corrupteurs. Il est de notoriété publique que certains dignitaires de ce régime auraient même été mêlés à des malversations dépassant nos frontières.
Autre leitmotiv présidentiel : la cherté de l’énergie. L’Electricité de Djibouti, naguère sérieusement gérée, a connu une altération de son potentiel humain et matériel depuis une décennie. Elle est aujourd’hui ruinée par les ponctions perpétuelles et le financements de la guerre.
Une solution de rechange pour pouvoir attirer des investisseurs étrangers relève encore de l’utopie. Le plus sage serait déjà que l’Etat paie ses arriérés à cet établissement pour que la population ne puisse pas supporter les problèmes de trésorerie de cette énergie gâchée, au détriment du développement.
Nous ne saurions comprendre les cinquièmes propos d’un Président adepte de projets sans lendemain.
Les institutions financières internationales constatent pour leur part que depuis 1996, la pauvreté s’est fortement accrue à Djibouti. Que la pauvreté relative et la pauvreté extrême sont évaluées à respectivement 67,9% et 34,7%. Elle s’est davantage généralisée entre 1999 et 2002 puisqu’elle touche toutes les zones géographiques et toutes les couches sociales du pays.
En somme, c’est parce que la pauvreté est devenue structurelle que les experts constatent que la croissance avancée par le régime ne se traduit nullement par un amélioration du niveau de vie des Djiboutiens.
Il est communément admis que la croissance économique dont se vante le Chef de l’Etat a été négative, le PIB par tête d’habitant se dépréciant de –3,2% entre 1991 et 2001. Alors, à l’entendre prétendre que la situation des jeunes sans emploi s’est nettement améliorée depuis qu’il préside à la destinée de ce pays, est une assertion totalement dénuée de tout fondement.
En ce sens que, ni la libéralisation du marché de l’emploi, ni la mise en place d’un ersatz dénommé Service National Adapté, ne seront d’une quelconque efficacité dans la baisse du taux de chômage des jeunes, qui serait de l’ordre de 60 à 65%.
Notre prétendu incapacité à gérer nous-mêmes les instruments de développement économique est en fait un prétexte fallacieux invoqué pour brader au capital privé étranger ou national des pans entiers de notre tissu productif.Et ce en toute opacité. Drôle de transparence !
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Communiqué de l’UAD
UNION POUR L’ALTERNANCE DEMOCRATIQUE
(ARD, UDJ, MRD, PDD)
UNION POUR L’ALTERNANCE DEMOCRATIQUE
(ARD, UDJ, MRD, PDD)
Djibouti, le 19 avril 2004
COMMUNIQUE DE PRESSE
L’Union pour l’Alternance Démocratique (UAD) présente tout d’abord ses condoléances les plus attristées aux nombreuses familles victimes des inondations de la nuit du 12 au 13 avril 2004.
Pour la troisième fois en quinze ans (1989, 1994, 2004) l’oued d’Ambouli a fait encore plus d’une centaine de morts, des milliers de blessés, des centaines de maisons emportées et un nombre indéterminé de disparus.
L’UAD remercie tous ceux, qui ont, de près ou de loin, soulagé les souffrances des victimes durant ces épreuves et particulièrement l’Armée française qui a hélitreuillé de nombreuses personnes et mis tous ses moyens humains et matériels à la disposition de la population.
Une fois de plus, c’est la mauvaise gouvernance qui est responsable du nombre élevé des victimes. En effet, l’oued d’Ambouli a connu ces derniers temps des occupations sauvages (jardins, villas, puits, décharges, etc…) qui ont rétréci le lit de l’oued, provoquant une crue dévastatrice qui a inondé de nombreux quartiers.
C’est dans ces circonstances dramatiques que la Présidence de la République a publié hier un communiqué condamnant le gouvernement français pour n’avoir pas fait taire les médias et la justice dans l’affaire du juge Bernard BORREL.
Cette manœuvre de diversion est destinée à tromper l’opinion nationale et faire oublier la coupable négligence des autorités dans la gestion de cette catastrophe sans précédent. Le peuple djiboutien demeure reconnaissant pour l’assistance de l’armée française qui a généreusement contribué aux côtés de nos militaires et policiers sans moyens techniques et eux-mêmes sinistrés.
L’UAD regrette un tel comportement du pouvoir en place et dénonce son irresponsabilité, son inefficacité autant que son insouciance.
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Trop vieux ? Trop jeune ? Trop gros ?
LE LIÈVRE RPP CONTRE LA TORTUE UAD
Pendant que de nombreuses familles djiboutoises pataugent encore dans la boue, suite aux récentes inondations, la premier responsable de la mauvaise gouvernance à laquelle nos compatriotes doivent l’essentiel de leurs malheurs quotidiens, fait annoncer dans sa presse qu’il a fermement l’intention de briguer un second mandat. S’il ne lui est pas interdit de rêver, l’argumentaire développé quant à ses prétendues prouesses, ainsi que les appréciations discourtoises portées contre l’opposition, commandent que nous répondions brièvement au griot qui s’est fendu de cet article dithyrambique sous la plume ABS dans « La Nation » de jeudi dernier.
« La politique, dit-on, est un art qui demande du doigté et de l’imagination. M. Guelleh ne donne pas l’impression d’en manquer » : ainsi se termine la pleine page consacrée, sous le titre évocateur « le compte à rebours a déjà commencé » au lancement officiel de la campagne par le candidat à sa propre succession. On aurait pu se demander tout de suite de quel compte à rebours il s’agit : celui du début de la fin ? On le verra très bientôt. Nous ne relèverons pas pour l’instant le fameux doigté : tout djiboutien sait si le candidat RPP a fait carrière dans la diplomatie ou dans la défense de droits de l’homme, ou s’il a eu la main un peu… lourde en certains sombres épisodes de la vie politico-militaro-policière de notre pays.
Puisque l’Histoire est toujours là, en dépit de toutes les tentatives de manipulation, occupons-nous du véritable problème qui est ailleurs que dans cette pathétique réécriture de ce qui fut. Rappelons tout d’abord que son malheureux challenger lors de la présidentielle de 1999, M. Moussa Ahmed Idriss, auréolé d’une longue et inlassable lutte pour l’accession de notre pays à l’indépendance, est un saint homme qui ne s’est pas enrichi par la politique et qui n’a jamais accusé quiconque à tort : s’il avait été battu à la régulière, il aurait certainement été le premier à reconnaître sa défaite et à féliciter son tombeur.
Le fait est que, hier comme aujourd’hui, des listes électorales falsifiées à la composition partisane des bureaux de vote (sans oublier le toujours folklorique Conseil Constitutionnel), les consultations électorales relèvent très largement de la mascarade à seul usage externe : les Djiboutiens n’ont jamais accordé grand crédit à la légalité, encore moins à la légitimité, du pouvoir en place. Passons !
Le candidat précoce (quand le bilan est si catastrophique, il faut bien partir avant les autres) aurait d’une part à son actif une glorieuse liste de réalisations. Par la magie de la ventriloquie politique, on apprend en lisant sur les lèvres immobiles d’un prétendu sympathisant (accessoirement entrepreneur vivant certainement de quelque commande publique) que « le Président a aujourd’hui un bilan sur lequel on ne peut l’attaquer. Les retards de salaire ? Un vieux souvenir. La guerre ? Un cauchemar oublié. La corruption ? Efficacement combattue. On ne peut vraiment pas l’accuser d’immobilisme… ».
Non, en toute honnêteté, ce serait plutôt de régression qu’on l’accuserait : retards de salaire persistants (peut-être que cet entrepreneur fait partie des privilégiés privés pas concernés par la colossale dette publique intérieure), un conflit civil dont les causes s’aggravent et les conséquences s’éternisent, une corruption généralisée à tous les niveaux, donnant à notre pays la configuration d’un narco-Etat.
Mais, inutile de montrer quoi que ce soit à qui ne veut pas voir la flagrante réalité. C’est ce déni du réel qui autorise alors le griot réquisitionné (peut-être parce qu’il est un des très rares démobilisés de la Paix d’Ab’a sur des milliers à avoir bénéficié d’une réinsertion socioprofessionnelle, à vêtir les habits du bookmaker politique en pariant sur les chances et les malchances des candidats potentiels de l’opposition. Le raccourci est aussi saisissant que bref : « Dini ? Un peu trop âgé ! serait-on tenté de penser. DAF : un peu trop jeune, non ? dirait la ménagère de 50 ans en fronçant les sourcils ». Heureusement, ladite ménagère ne dit pas cela : elle froncerait plutôt les sourcils devant sa difficulté à remplir son panier.
Rappelons, pour les ignorants officiels, que M. Gouled avait 70 ans au moment de l’Indépendance, et que l’actuel Président de la Géorgie est un trentenaire, beaucoup plus jeune que notre fringant et souriant Premier ministre, et avec énormément plus d’expérience politique et d’engagement militant. Curieusement, le thuriféraire de service a préféré passer sous silence les Présidents des deux autres partis politiques d’opposition, MM. Ismael Guedi Hared et Mohamed Daoud Chehem. En temps utile, l’UAD déterminera souverainement sa stratégie et choisira son candidat unique.
Parce que nous sommes une civilisation couchitique, la morale des fables y est prégnante, dans la pure tradition du philosophe Luqman. Ainsi, le lièvre dont le candidat-Chef de l’Etat endosse si précipitamment le rôle, est synonyme dans nos cultures, non pas de responsabilité ou de sérieux, mais de ruse, de traîtrise et de félonie. Par contre, la tortue qui symbolise si bien l’attitude responsable des dirigeants et des militants de l’UAD, renvoie quant à elle à la persévérance et à la foi en un destin transcendant: « Dieu fait-il partie du complot ? » demanda-t-elle un jour que sa mort prochaine lui était annoncée, bien avant que sa carapace protectrice ne la recouvre. Assurément, Dieu ne participera jamais à ce qui n’est qu’un minuscule complot contre le peuple djiboutien.
Pour qui douterait encore que cette prétention à un second mandat relève d’un intolérable complot contre les intérêts vitaux du Peuple Djiboutien, il suffit de laisser la parole au griot qui explique le pourquoi de la cession des biens nationaux à des intérêts étrangers : « dans un pays comme le nôtre où la perle rare qui évite de manger de ce pain-là est considérée comme une poule mouillée et où le bon vivant se servant à bras raccourcis passe aux yeux de sa famille, de ses voisins et de ses amis pour un « lion » (libah, louback ou assad, c’est selon) on ne doit pas se demander pourquoi le chef de l’Exécutif s’empresse de sauver ce qui peut l’être en en confiant la gestion à des compétences étrangères ». Donc, c’est parce que ses compatriotes seraient culturellement des voleurs patentés que le Chef de l’Etat brade notre patrimoine national aux intérêts privés étrangers. Nos compatriotes apprécieront.
Deux questions enfin : qui nomme tous ces voleurs à des postes où ils peuvent voler ? Alors que des lois existent en matière de répression de la délinquance financière, qui est en position d’assurer l’impunité aux voleurs patentés ? Une seule personne : le candidat prématuré et imprudent à sa propre succession.
Mais il semble oublier un seul détail, mais de taille : l’opposition n’a pas vocation à être sans cesse spoliée de sa victoire. Tendre l’autre joue n’est pas dans notre culture.
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Israël/Etats-Unis : Tsahal cherche aide de camp de concentration
Mitrovitca, samedi 17 avril 2004 : commentant avec virulence les récents développements de la situation au Proche-Orient et au Moyen-Orient, suite au soutien de George Bush au plan de séparation et d’annexion préparé par Sharon, des policiers de la force d’interposition des Nations Unies, des Américains et des Jordaniens, se tirent dessus. Bilan : au moins deux morts et six blessés. Tension gravissime quand on sait tout ce que les États-unis ont sacrifié pour empêcher le massacre de Musulmans dans les Balkans au cours des années 90. L’actuel soutien inconditionnel apporté par l’administration républicaine aux agressions sionistes et son enlisement dans les sables d’Irak n’ont pas fini de déployer leurs conséquences dramatiques pour la stabilité internationale.
« Bush donne ce qui ne lui appartient pas à ceux qui n’y ont pas droit » : ainsi résumait poliment un palestinien le soutien que l’administration américaine venait d’accorder au plan de séparation unilatéralement concocté par Sharon. Le marché proposé par le chef du Likoud est aussi clair que machiavélique : démanteler quelques minuscules colonies pour en épargner d’énormes et, du même coup, annexer une large portion d’un territoire palestinien délimité comme un vaste camp de concentration à ciel ouvert par un mur et des barbelés. Ce que l’Autorité Palestinienne a bien évidemment condamné avec la plus extrême vigueur : ceci constitue une remise en cause de toutes les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies, des Accords d’Oslo et de la fameuse feuille de route, pourtant instaurée par les Etats-Unis quelques mois auparavant et internationalement saluée pour sa cohérence.
Qu’est-ce qui a bien pu pousser le Président Bush à un revirement aussi spectaculaire qu’inédit ? C’est la dernière once d’impartialité que l’on serait en droit d’attendre d’une telle superpuissance qui disparaît ainsi. Car les responsables politiques palestiniens et européens sont fondés à dire que ce n’est pas entre Israël et les Etats-Unis qu’un accord de paix doit intervenir, mais plutôt entre Israël et l’Autorité Palestinienne. On est en effet bien loin des miracles qu’avait produits en son temps la célèbre « diplomatie des petits pas » chère à Henry Kissinger.
Comme on est bien loin de la solidité des positions tenues par Madeleine Albright : la politique étrangère américaine semble aujourd’hui connaître, spécialement au Proche et au Moyen-Orient, ses heures les plus sombres. Pour en revenir aux motivations qui ont poussé George Bush à cautionner un unilatéralisme sioniste dangereux pour la suite des événements, une réponse viendrait tout de suite à l’esprit : des considérations aussi pressantes que conjoncturelles de politique intérieure. En d’autres termes, c’est le retour du bâton : les déboires des Coalisés (de moins en moins solidaires puisque plusieurs pays retirent leurs troupes ) en Irak semblent négativement peser sur la campagne électorale du candidat républicain à sa propre succession. C’est donc son besoin impérieux de s’attirer les bonnes grâces du très influent lobby juif qui aurait poussé George Bush à un tel déni de la légalité internationale et du droit des peuples à l’autodétermination.
Ce n’est certainement pas rendre service au Peuple d’Israël, qui a le droit d’exister au moins autant que les autres. Mais tant que la légitimité de l’État sioniste relèvera de la théodicée ( justification religieuse du besoin d’espace vital pour un Peuple élu autorisé à s’installer sur la terre des autres et à l’annexer en toute impunité), et en déniant tout droit de retour dans leur patrie aux millions de réfugiés et expulsés de 1948, il sera difficile de trouver un modus vivendi entre Israéliens et Palestiniens. Le sacré doit être général ou ne doit pas être invoqué à sens unique.
En donnant un tel blanc-seing au plan sioniste de séparation unilatéral, en cautionnant une aussi grave remise en cause de la légalité internationale et du processus de paix, l’administration américaine s’est du même coup ôté le peu de légitimité qu’elle aurait pu être en droit de se prévaloir pour justifier sa guerre d’Irak. Ce serait en effet sous-estimer la capacité de mobilisation d’Al Qods pour les masses musulmanes que d’ignorer les ravages causés par ce dramatique revirement de la diplomatie américaine. Comment prétendre remplir une mission civilisatrice dans les sables irakiens (installer la démocratie) tout en violant les droits inaliénables du Peuple Palestinien martyrisé ? Avec la meilleure bonne volonté du monde, aucun Irakien ne pourra plus sérieusement croire que les soldats américains sont chez lui pour le sauver malgré lui. Du coup, devant une telle injustice, c’est le soldat américain qui ne se trouvera plus aucune raison sérieuse de mourir en Irak.
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