Réalité numéro 70 du mercredi 12 novembre 2003 |
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Sommaire
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Directeur de Publication :
ALI MAHAMADE HOUMED Codirecteur : MAHDI IBRAHIM A. GOD Dépôt légal n° : 70 Tirage : 500 exemplaires Tél : 25.09.19 BP : 1488. Djibouti Site : www.ard-djibouti.org Email : realite_djibouti@yahoo.fr
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Éditorial
VOL AU-DESSUS DE TOUT SOUPÇON
Au moment où nous révélons un détournement de l’aide alimentaire perpétré au sommet de l’État djiboutien, il n’est absolument pas étonnant que la presse gouvernementale ait préféré passer sous silence un événement que Kofi Annan qualifie pourtant de « tournant décisif » : il s’agit de l’adoption par l’Assemblée Générale de la Convention des Nations Unies contre la corruption. « A l’avenir, les fonctionnaires et autres responsables politiques auront plus de mal à dissimuler leurs gains illicites. C’est particulièrement important pour de nombreux pays en développement où de hauts responsables ont pillé les richesses nationales et où les nouvelles autorités ont grand besoin de ressources pour la reconstruction et la remise sur pied de la société » commentait même, euphorique, le Secrétaire général de l’ONU. Ceci expliquant peut-être cela, il convient donc de relier la récente contrebande gouvernementale du riz indien et le refus tout aussi gouvernemental d’une réelle reconstruction du pays après une décennie de conflit civil.
Mais le problème n’est pas là : en attendant un miracle de ce nouvel instrument international de lutte contre la corruption, nationale ou transnationale, il s’agit de s’interroger sur l’impact d’une telle dénonciation. Car, en politique comme ailleurs, il faut éviter l’erreur consistant à surestimer l’impact du coup porté à l’adversaire. En l’espèce, quelles pourraient bien être les retombées de ce scoop ? Plus précisément, quel serait le vecteur de translation entre la médiatisation d’un délit et ses conséquences, tant politiques que judiciaires ?
Pour y répondre, il faut avoir au préalable clairement posé le problème : s’agit-il vraiment d’un scoop ? Non : ce qui généralement surpris nos lecteurs, ce n’est pas que la Présidence ait été impliquée dans ce détournement d’une aide alimentaire. Nul n’est ici assez naïf pour croire qu’il n’y a jamais eu de corruption à Djibouti : les richesses ex nihilo de certains dignitaires du régime sont là pour démontrer qu’il s’agit bien d’une pratique courante.
Non, ce qui a étonné nos lecteurs et concitoyens, c’est surtout le fait que nous ayons osé évoquer ce délit. Car, la banalité de la corruption renvoie à une impunité qui traduit tout un ensemble de dysfonctionnements institutionnels, au premier rang desquels il convient de placer ceux de l’appareil judiciaire. Tout le paradoxe de la situation djiboutienne est donc là, montrant dans toute son absurdité l’absence d’un État de droit : le soupçon, ou l’accusation, de vol suppose qu’il y ait possibilité, pour ne pas dire obligation, de poursuites judiciaires. Il faut donc qu’une Morale, incarnée par le Droit, soit en vigueur pour qu’une pratique délictueuse se transforme en scandale politique puis en affaire judiciaire. Le silence petit du régime au sujet du détournement de l’aide alimentaire indienne par l’administration présidentielle montre ainsi toute la virtuelle étendue comme toutes les réelles limites, que nous avons souvent évoquées, de la démocratie version RPP : cause toujours !
Dans ces conditions, il est absolument improbable que ce délit soit d’une quelconque manière sanctionnée : quand elle est grosse, comme pour la Tour Eiffel, il faut une certaine distance pour appréhender la corruption. Or, dans cette affaire, les ramifications sont de toute évidence trop nombreuses pour qu’un simple fusible soit sacrifié. L’inertie institutionnelle est la parade par excellence des régimes menacés et fragiles. Mais déjà une certitude : la République de Djibouti ratifiera la récente Convention des Nations Unies contre la corruption. On n’est jamais trop prudent, cela n’engage à presque rien et rapporte gros.
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Brèves nationales
Port de Doraleh :
Anguille sous roche ?
En écho à notre brève de la semaine dernière consacrée au retard des travaux sur le chantier de Doraleh, le journal gouvernemental « La Nation » titrait en une de son édition de jeudi dernier : « Le projet du Port de Doraleh en bonne voie ». A l’appui de son affirmation, notre confrère relatait la récente rencontre entre le Chef de l’Etat et le Président-directeur général de Dubaï Port Authority. Djebel Ali, qui gère déjà la Port et l’Aéroport de Djibouti, a fort à faire dans notre pays, et le déplacement de son responsable entre peut-être dans ce cadre et rien ne prouve qu’il concerne la relance des travaux du port de Doraleh. Ce dernier projet, comprenant le terminal à conteneurs le plus moderne d’Afrique et dont les travaux devaient se terminer dans les deux ans, a pris un retard considérable que n’explique pas le journal gouvernemental se bornant à prétendre qu’un appel d’offres sera bientôt lancé pour la réalisation de la partie terminal à conteneurs, sans même évoquer le terminal pétrolier ou la raffinerie. Mystère ! Décidément, il semble qu’il y ait anguille sous roche à Doraleh. Quoique, dans la chaude mer qui borde Doraleh, il faille plutôt parler de murène… de la finance !
Tadjourah :
L’unique pharmacie privée a fermé
Les habitants de la ville blanche s’enorgueillissaient depuis quatre ans d’avoir à leur disposition une pharmacie privée bien approvisionnée et bon marché. Le propriétaire, natif de la ville, était particulièrement disponible, acceptant même d’ouvrir au milieu de la nuit en cas d’urgence.
Cette semaine, cette pharmacie très appréciée a été contrainte de fermer suite à une décision écrite du Commissaire du district. Les Tadjouriens, furieux de ne plus avoir accès aux médicaments, se concertent actuellement en vue d’élever une vigoureuse protestation auprès des pouvoirs publics.
Affaire à suivre…
Awr-Awsa :
Scènes quotidiennes dans un camp insolite
Des milliers de réfugiés et clandestins s’entassent depuis fin août dans ce camp du district d’Ali-Sabieh, malgré des conditions de vie difficiles. A l’insuffisance de la nourriture s’ajoute la précarité des abris et les piètres conditions d’hygiène. Les procédures administratives pour filtrer ceux qui remplissent vraiment les conditions d’accès au statut de réfugiés et les vrais clandestins devant être rapatriés prennent du retard. La déprime et le désarroi sont le lot quotidien de ces pensionnaires dont beaucoup ont déjà fui vers la Capitale, profitant du manque de vigilance des forces de sécurité.
De plus, ces dernières semaines, l’on signale que des épouses de dignitaires du régime viennent sur les lieux pour recruter des femmes de ménage qu’elles réussissent à emmener dans leur foyer à Djibouti. Dernièrement, c’est l’épouse d’un haut gradé de l’armée nationale qui serait venue sur place pour repartir avec des bonnes « clandestines » bien sûr. Si des dérogations sont ainsi permises pour les familles des oligarques, pourquoi avoir privé des honnêtes citoyens d’employer des femmes de ménage très difficiles à trouver dans la communauté djiboutienne? les Djiboutiens n’en finissent pas de maudire cette lutte maladroite contre l’immigration finalement devenue une esbroufe de mauvais goût.
Obock :
Le district sacrifié ?
Deux mois après le pompeux séminaire sur le développement décentralisé, la fatalité quotidienne a repris ses droits dans ce district sacrifié depuis de longues années, malgré ses énormes potentialités. L’injuste enclavement auquel il reste soumis explique son considérable retard dans tous les domaines. C’est le seul de tout le pays à connaître de manière chronique des pénuries en produits de première nécessité et en carburant. Ses infrastructures de base restent dans un état lamentable et tout porte à croire que l’État s’est durablement désengagé de cette région. Si l’enclavement durable et la pauvreté extrême de la population obèrent toute possibilité de développement rationnel, il n’a échappé à aucun observateur que le désenclavement préalable n’a pas été retenu dans les pieuses recommandations adoptées à l’issue du pseudo-séminaire tenu sur place les 20 et 21 septembre 2003. Tant que persistera cette situation de mépris, les envoyés du régime seront éconduits comme l’ont été les deux pontes du RPP à s’y être rendus le 1er novembre dernier…
Ali-Sabieh :
Chronique de la mauvaise gouvernance
La capitale du pays Assajog, frondeuse de nature, a quelques raisons d’être particulièrement mécontente ces derniers jours. Ainsi, l’on apprend sur place que le stock des dattes destinées aux malades du dispensaire et aux nécessiteux, n’a pas encore quitté les entrepôts du district et ce plus de deux semaines après le début du Ramadan. Ces dattes seront-elles au moins distribuées pour le Zakat-el-Fitr ?
Au plan sanitaire, les Assajogs s’insurgent contre l’entrave aux évacuations sanitaires, soumises à une autorisation préalable du Commissaire de la République, chez qui les ambulances sont parquées. Des malades munis d’une autorisation d’évacuation délivrée par les autorités médicales de ce district sont encore obligés de passer chez le Commissaire pour accéder aux ambulances. Est-ce cela, la décentralisation promise par la mauvaise gouvernance ?
Les Assajogs sont également remontés contre l’Éducation Nationale boiteuse. Élèves et parents d’élèves du lycée Arrey n’en finissent pas de se plaindre des mauvaises conditions d’étude dans cet établissement, faute de mobilier suffisant. Il n’y aurait pas assez de tables et de chaises pour le nombre d’élèves accueillis dans chaque classe . « L’Éducation pour tous », credo de la mauvaise gouvernance, a laissé un goût amer au lycée Arrey victime de ce régime de pénurie et de gâchis.
Presse indépendante :
Le Renouveau Djiboutien paraît à nouveau
Après une injuste interdiction de plus de trois mois, notre confrère le Renouveau Djiboutien, organe de presse du MRD, est de nouveau disponible dans les kiosques depuis jeudi dernier. « Réalité » salue le retour de ce pionnier de la presse indépendante, bête noire du régime, mais aussi organe de lutte particulièrement apprécié par les militants de l’opposition regroupée au sein de l’UAD. Encore une fois, toutes nos félicitations et bon vent au voilier du Renouveau Djiboutien !
Assistance technique à la Pêche :
La FAO pèche-t-elle par ignorance ?
Le journal gouvernemental « La Nation », toujours à l’affût de la moindre louange adressée au Chef de l’État, rapporte dans son édition de lundi dernier qu’à l’occasion de la cérémonie de signature d’un accord de financement entre le ministère de l’Agriculture et la FAO, le représentant de cette organisation onusienne aurait déclaré : « Djibouti est reconnu pour sa volonté de développer le secteur agricole, ainsi que ceux de l’élevage et de la pêche. En témoignent les reconnaissances faites au Président Ismael Omar Guelleh lors de son dernier séjour à Tokyo ». Et le journal de poursuivre (pour ceux qui ne l’auraient pas compris ) : « Il s’agit bien évidemment du doctorat honoris causa attribué au Président Guelleh par la prestigieuse université d’agriculture de Tokyo ». Ouf, nous voilà rassurés ! Bien évidemment, nous sommes d’accord avec « La Nation » et la FAO : la meilleure et unique preuve de la volonté présidentielle concernant le développement du secteur agropastoral se résume au grigri rapporté de Tokyo.
Mais, pour rafraîchir la mémoire de tous ceux ne péchant pas par ignorance, rappelons tout de même que la plus grande réalisation en matière de développement agricole sous l’actuel mandat présidentiel, reste sans conteste la plantation de khat située à la lisière de la forêt primaire du Day… Une manière écologique de régénérer cette forêt menacée de disparition. Il fallait y penser, en attendant peut-être de demander à l’UNESCO de l’inscrire au patrimoine universel de l’humanité.
Audiovisuel :
Djibnet ne serait-elle pas toujours nette ?
Confrontée il y a deux ans à l’arrivée de nouveaux concurrents sur le marché, la société Djibnet, proposant un abonnement payant à un bouquet numérique, avait dû baisser ses tarifs et adopter une stratégie commerciale plus attractive. Ainsi, cette entreprise avait lancé sur le marché un nouveau produit sous la forme d’une antenne vendue à 10.000 FD sans décodeur ni abonnement et permettant de recevoir gratuitement quatre chaînes de télévision : TV5, MBC, CFI et la RTD. Des centaines de foyers djiboutiens, au revenu modeste mais désireux de s’informer et de se distraire, avaient opté pour cette solution peu coûteuse pour accéder aux chaînes satellitaires francophones les plus regardées à Djibouti que sont CFI ou TV5, ou arabophones comme MBC.
Mais curieusement, depuis quelques semaines, l’antenne miracle ne reçoit plus CFI et TV5. Malgré les multiples protestations des usagers, la direction de Djibnet n’a jusqu’à présent fourni aucune explication plausible à cette situation. Comme il fallait s’y attendre, les médias publics n’ont pas jugé utile de se faire l’écho des frustrations des clients de Djibnet. Les mauvaise langues avancent une raison à cela : ce prestataire de services télévisuels serait lié à certains oligarques du régime…
De guerre lasse, plusieurs dizaines de clients mécontents ont téléphoné à la rédaction de notre journal, s’estimant floués par cette publicité mensongère et cette rupture de contrat. Ils exigent des explications de Djibnet. En l’absence d’une association de défense des consommateurs digne de ce nom, « Réalité » qui se veut le porte-voix des sans-voix, amplifie donc les cris de colère des milliers de téléspectateurs djiboutiens et demande sans passion à Djibnet d’apporter de vraies réponses aux inquiétudes de ses clients.
Pour leur part, les abonnés disposant d’une décodeur et bénéficiant de la réception de plusieurs chaînes satellitaires pour la somme mensuelle de 7.000FD, se demandent après la disparition de certains concurrents de Djibnet si cette dernière, en situation de quasi-monopole, ne projette pas d’augmenter à nouveau ses tarifs. Affaire à suivre…
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Coopération internationale : palliatif ou levier ?
Le retour de l’USAID à Djibouti nous offre l’occasion de nous exprimer à nouveau sur ce sujet d’une importance vitale pour notre petit pays et expliquer ce que de notre point de vue elle doit impérativement devenir : un levier de développement, et ce qu’elle doit cesser d’être : un palliatif utile !
Sans nous livrer à un bilan de la coopération bilatérale ou multilatérale, qui fera l’objet d’une série d’articles l’année prochaine, Inch Allah, il suffit d’observer l’échec des différents projets financés par l’APD (Aide Publique au Développement) des pays riches, ainsi que par la coopération multilatérale et singulièrement par le Système des Nations Unies cette dernière décennie, pour s’interroger sur l’opportunité, le volume, la nature et l’affectation des ces aides et en tirer quelques conclusions. Interrogé par notre confrère L.N.A (Les Nouvelles d’Addis) sur la coopération, le Président de l’ARD en avait distingué et décrit trois sortes : la coopération-connivence, la coopération-continuité et la coopération-rupture. Nous ne nous étalerons pas ici sur ces différentes définitions, pour nous contenter d’exposer la forme d’aide que nous souhaitons voir s’établir avec tous nos partenaires impliqués dans notre développement économique.
Une coopération-rupture, c’est-à-dire une aide substantielle, structurelle, soutenue et suivie, qui nous permette de nous passer de la mendicité à laquelle se résume malheureusement la coopération avec nos partenaires suscités. Au lendemain de l’Indépendance, Djibouti a été, suite à la Conférence des donateurs de 1983, le pays le plus aidé au monde à l’époque, non pas en volume, mais en termes de dollars par tête d’habitant. En dehors de la rénovation des infrastructures portuaires et aéroportuaires, et du remarquable développement de l’outil des télécommunications, ainsi que plus tard sur financement du Royaume d’Arabie Saoudite, l’exécution par une société yougoslave de la Route de l’Unité reliant la Capitale à Tadjourah, il ne subsiste plus rien de cette volumineuse manne financière : c’est presque tout et dérisoire en 26 ans d’Indépendance.
Au prétexte de notre prétendue incapacité à gérer nous-mêmes nos instruments économiques, l’actuel Chef de l’Etat a, de son propre chef et en toute opacité, concédé la gestion de ces leviers de développement économique que sont le Port et l’Aéroport au capital privé étranger. La concession et la privatisation d’autres établissements publics à caractère industriel et commercial sont en concoction, toujours dans la même opacité. Aucun de nos souverains députés n’a osé demander des éclaircissements sur cette concession…
La multitude de projets (que nous n’énumérerons pas ici) financés par les pays amis et le Système des Nations Unies ont tous capoté. L’échec de ces projets et la faillite des sociétés d’État ne seraient pas uniquement dus, même si elle y est pour beaucoup, à la seule mauvaise gestion. Dans ce contexte de délitement de l’État (corruption généralisée, choix budgétaires irrationnels aggravés par l’absence de contrôle, parlementaire ou autre, impunité de la délinquance financière …) la coopération bilatérale et multilatérale conditionne toute aide à la bonne gouvernance depuis une décennie. Du coup, nos gouvernants ont-ils été obligés de recourir aux institutions de Bretton Wood, autrement plus sourcilleux sur les anomalies de la gestion du bien public. C’est sous la pression conjuguée de la coopération internationale et des luttes intestines que le gouvernement s’est finalement résolu à initier uniquement sur le papier une ouverture démocratique de façade.
Si le multipartisme a été conquis de haute lutte, les entraves à son bon fonctionnement sont multiples et répétés, et la violation par le gouvernement de l’Accord de Paix définitive du 12 mai 2001, par son refus de traiter les causes du conflit (Décentralisation et Réformes Démocratiques) et soigner ses conséquences (Réhabilitation) recrée telles quelles les conditions qui ont conduit à la guerre civile : la bonne gouvernance n’ est toujours pas au rendez-vous des pratiques politiques à Djibouti !
Dans ce contexte, il n’est pas étonnant que ni les retombées financières des présences militaires française et américaine, ni la coopération multilatérale ne servent de leviers de développement économique et social tant attendu par notre Peuple. Il en va pourtant de l’intérêt bien compris des deux parties. Pour les pays donateurs, c’est sans doute la meilleure « containment policy », quant aux bénéficiaires, il en va de leur statut de pays (et d’êtres humains) dignes et responsables, car il est moralement dégradant et économiquement impossible de vivre ad vitam aeternam de la mendicité.
Si la coopération que nous souhaitons n’a toujours pas vu le jour, c’est par manque de volonté politique de nos régents pour créer le climat et les conditions institutionnelles favorisant son avènement. Aussi, notre malheureux Peuple en est-il réduit à constater la poursuite de cette forme de coopération palliant ici ou là, ici puis là, les errements et les insuffisances de nos gouvernants, leurs choix budgétaires irrationnels aggravés par l’opacité dans la gestion du bien public et la prédation. Avec la croissance démographique et le chômage endémique, le Peuple djiboutien se contentera-t-il longtemps de constater et de subir la mauvaise gouvernance et les injustices, sans les contester de différentes façons ? La patience humaine ayant des limites, il faut être inconscient ou aveugle pour ne pas se l’imaginer…
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Somaliland : Une reconnaissance sabotée
La fin de la guerre froide n’a pas été simplement marquée par l’éclatement de l’ex-puissance soviétique mais a aussi remis en cause les équilibres des Etats dits sous-développés tant à l’intérieur qu’entre eux. La dislocation de l’ancienne République Démocratique de Somalie reste une exception planétaire. « Le malheur des uns faisant le bonheur des autres », aujourd’hui plus qu’hier, l’état du monde est plus que menacé, surtout en ce qui concerne les pays non impliqués directement, par les conséquences directes ou indirectes de la guerre menée contre le terrorisme par les puissances militaires, États-unis en tête. Le déséquilibre entre États de la Corne de l’Afrique consécutif à son évolution spatiale des années 1990 marque davantage l’enjeu posé par la géopolitique régionale, dans ce qui semble être une redéfinition des rapports dans un environnement occupé par les puissances en lutte contre le terrorisme.
Toujours absente réellement sur la scène internationale et en proie aux affrontements meurtriers entre clans, la Somalie du Gouvernement issu de la Conférence d’Arta semble plus discréditée par les attentats perpétrés dans les pays de la région que l’incapacité du Gouvernement de Transition à pacifier la Capitale. Face à cette partie du pays considérée comme le bastion des terroristes de tout bord, la République du Somaliland autoproclamée en 1991 a pu évolué depuis avec sérénité, en marge d’une communauté internationale influencée par des dogmes ne répondant pas à la situation présente et qui continue à vouloir attacher utopiquement et injustement le sort de ce pays à une grande somalie dont la réalisation demeure toujours incertaine.
Pacifiée, la Somaliland, Etat de fait de plus de 250.000 km2 et d’un peu plus de trois millions d’âmes, même si elle a su s’assurer des institutions démocratiques, un redressement économique fiable, une reconstruction courageuse, une situation sanitaire et scolaire honorable, enfin une sécurité responsable, son existence n’est, cependant pas particulièrement appréciée par certains de ses voisins immédiats.
Ces derniers, tout comme sur leurs vues de la problématique de paix en Somalie, divergent fondamentalement sur la reconnaissance officielle ou non de cette République, les intérêts particuliers y étant pour beaucoup.
L’évolution récente de la énième conférence de réconciliation entre factions somaliennes du Kenya et les maigres chances d’un succès après celui d’Arta n’augurant en rien pour asseoir la paix d’une somalie unifiée, les antagonismes des pays dits « de première ligne » de l’Igad sont sortis au grand jour, au détriment malheureusement des populations victimes de la guerre civile. Aussi, le départ avec fracas de la délégation djiboutienne et de délégations des certaines factions en plus d’une partie de la société civile, les accusations échangées sur l’existence d’un sabotage de la conférence de pays organisateurs de l’Igad dénotent le probable aboutissement de ses assises.
Pourquoi ? La chute du régime de Siad Barré n’étant pas une exception aux bouleversements constatés de part et d’autre du globe en cette fin des années 1990, la nouvelle donne politique avait engagé aussi, certains États de la région à faire d’une pierre deux coups : Contribuer directement ou indirectement au départ du dictateur, se positionner pour influer sur le pouvoir à venir.
Or, les départs successifs des deux dictateurs (Siad et Mengistu) de deux grands pays de la région laissaient incertaine toute appréhension d’une politique cohérente dans un espace pluriculturel et pluriethnique en proie à une situation conflictuelle perpétuelle. Les précipitations politiques des uns et des autres des états de la sous-région ayant été pour quelque chose dans cette crise somalienne, en ce début des années 1990, malgré la disponibilité et la générosité de la communauté internationale, les multiples maladresses, pas toujours innocentes, qui ont présidé à la première Conférence de Réconciliation Somalienne tenue à Djibouti en 1991 ont été le principal élément catalyseur du naufrage somalien.
En effet, cette conférence réunissant dans sa présidence une brochette d’hommes politiques somaliens d’envergure, elle s’était tenue après l’auto-proclamation de la République du Somaliland logiquement absente de ces assises. Des concertations sérieuses avec un délai d’appréciation suffisant n’auraient été engagées avec les parties somaliennes concernées comme avec les États membres du Conseil de Sécurité, de l’OUA, de la Ligue Arabe, de l’IGAD, etc. En ce sens que la nomination par le pays organisateur de la Conférence avec l’appui d’autres pays aussi intéressés, de M. Ali Mahdi à la tête de ce qui restait de la Somalie entamait la vraie guerre civile au sud de ce pays toujours déchiré. Depuis, les conférences se suivant et se ressemblant, celle tenue en 2000, encore en République de Djibouti, à Arta précisément, diffère uniquement des précédentes par l’énormité des propositions aussi impensables que dangereuses, du nouvel homme fort de la République.
La proposition la plus ahurissante consistait à écarter les Chefs de guerre, à les arrêter et à les faire condamner par un Tribunal Pénal International pour crimes contre l’humanité, y compris le Président de la République autoproclamée du Somaliland d’alors. Cette initiative du Chef de l’État Djiboutien faite devant la plus haute instance internationale, l’Assemblée Générale des Nations Unis, incitait à la prudence toutes les diplomaties dont certains confiaient en privée « l’échec avant l’heure et le risque qu’engendraient cette position de Djibouti pour la tenue d’une réelle assise pour une paix définitive en Somalie ».Chacun suivait donc, sans vraiment partager l’initiative djiboutienne, l’issue de cette rencontre qui abouti, après les multiples remous causés par les influences contradictoires des diplomaties et des clans, à la formation d’une Assemblée Constituante et de l’élection d’un Président intérimaire en la personne de Abdilkassim Salad Hassan et d’un Gouvernement de Transition pour une durée de trois ans. La suite, tout un chacun le sait.
Pour autant, il faut le rappeler, feu Président Egal avait effectué deux séjours en République de Djibouti, en 1994 et 1997, sans succès face à l’intransigeance du pouvoir djiboutien, partisan inconditionnel d’une Grande Somalie. De même que la récente auto-exclusion de notre pays de la Conférence du Kenya, suivie du rapprochement spontané avec le Somaliland et de la visite officielle à Djibouti, à la mi-octobre 2003, d’une délégation conduite par le nouveau Président Daher Rayaleh Kahin donnent toute la mesure du revirement de la politique régionale de notre diplomatie.Ce passage de la délégation somalilandaise de haut niveau, bien que médiatisée à outrance avait tout l’air d’une reconnaissance après les embûches et les multiples entraves à la libre circulation des biens et des personnes par la partie djiboutienne.Des accords de coopération entre les deux États furent signés, en plus de la mise en place prochaine de commissions ministérielles. De réels actes que confirmaient les différentes conférences de presse tenues à Djibouti et à Hargeisa.
Malheureusement, habitué à la politique de « Shitara », voilà qu’en moins de deux semaines l’interview du 29 octobre dernier du numéro un djiboutien à l’Agence Onusienne IRIN remettait en cause l’ensemble du processus tant sur la paix en somalie que sur l’éventuelle reconnaissance du Somaliland, pour générer du coup une polémique avec ses autorités. Refusant toute crédibilité au gouvernement formé par lui à Arta et à Conférence du Kenya, le Président djiboutien considère que le sort du Somaliland, pays très inquiétant en raison de la présence d’intégristes dit-il, est lié à celui du Sud. Retour à la case départ donc. Ces propos ont choqué le peuple et les politiques du pays voisin dont l’ancien candidat à la Présidence de la République M. Ahmed Mahamoud dit « Silanyo» déclare à la BBC que « le Président Djiboutien Ismaël Omar Guelleh est opposé à la décision souveraine du peuple somalilandais pour son indépendance ». Il ajoute en substance que les propos du djiboutien sont destinés à saboter la paix qui existe dans son pays dont lie le sort à celui de Mogadiscio où les violences et les actions intégristes ont condamné tout processus de réconciliation.
Par ailleurs, il accuse Djibouti d’ingratitude vis-à-vis de la Somalie qui avait énormément contribué à son indépendance et dit n’avoir jamais vu notre pays aidé la Somalie depuis Ali Mahdi sinon le troubler, en plus des provocations permanentes contre le Somaliland autoproclamé. Il accuse simultanément le pouvoir en place dans son pays pour avoir crû si vite aux accords signés avec Djibouti. Ce dernier s’est expliqué par la voix de son ministre chargé des relations avec le Parlement, M. Abdi Hassan Bouni, en ces termes : « Aujourd’hui nous nous rapprochons de la reconnaissance de notre pays, il nous faut être unis. L’espoir viendra de la Conférence du Kenya dont, si l’issue aboutit à la formation d’un Gouvernement, permettra aux deux parties Somalienne et Somalilandaise de se reconnaître mutuellement et de dresser un calendrier pour le partage des avoirs intérieurs et extérieurs laissés par le pouvoir déchu de Siad Barré ».
Si aucune issue n’est trouvée pour la formation d’un direction somalienne, alors nous sommes certains que la communauté internationale ne veut plus nous faire attendre la résolution du problème du Sud et qu’elle reconnaîtra aussitôt la République du Somaliland ».
Cette conduite politique de nos gouvernants dans notre contrée troublée risquerait à terme d’empoisonner gravement nos relations dans la région. L’inconscience et la politique de l’autruche ne pourront que compromettre notre crédibilité diplomatique, déjà affaiblie par une gestion aussi douteuse qu’opaque des derniers de l’Etat : cause de la pauvreté grandissante du peuple djiboutien.
Quant à nous, il nous semble que pour la pacification de la région, la communauté internationale se doit désormais de reconnaître le Somaliland qui a fait ses preuves en tant qu’entité stable séparée de la Somalie depuis 1991. D’autant plus que la communauté internationale s’ inquiète sérieusement de ce que Mogadiscio soit aujourd’hui devenue un véritable sanctuaire du terrorisme international.
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Djibouti-Mogadiscio, via Al Qaïda
En complément à l’article publié pages 5-6, voici le résumé du rapport S/2003/1035 que le Groupe d’experts des Nations Unies dresse de l’implantation du réseau d’Al-Qaida en Somalie et de ses sources de ravitaillement en armes. Ce rapport, officiellement remis le 4 novembre 2003, est l’oeuvre du Comité du Conseil de sécurité, créé par la résolution 751 (1992) concernant la Somalie. Chacun verra que le journal gouvernemental « La Nation » n’a pas tout dit à ce sujet : Djibouti est explicitement cité comme une des sources de ce trafic d’armes à destination de Bosaso et Mogadiscio. Tout comme chacun peut alors répondre à la question qui se pose : qui est capable de mettre sur pied à Djibouti un tel trafic d’armes ?
1. Malgré la déclaration de cessez-le-feu d’octobre 2002 et le processus de réconciliation en cours, la Somalie est en proie à des violations de l’embargo sur les armes établi par la résolution 733 ( 1992) du Conseil de sécurité. Le rapport qui suit, basé sur une surveillance attentive au cours des six derniers mois, dépeint une situation inquiétante. un courant continu de petites quantités d’armes et de munitions arrive dans le pays, alimentant les marchés locaux, où des armes peuvent être achetées et vendues ouvertement, et les entrepôts des chefs de faction. On constate ces six derniers mois une diminution, par rapport aux années précédentes, des grosses violations de l’embargo par des grands navires ou des avions cargos lourds Mais ce petit courant incessant d’armes et de munitions représente en six mois des centaines de tonnes d’articles parvenant dans le pays en violation de l’embargo.
2. Le problème des courants d’armes à destination de la Somalie et transitant par ce pays est un problème dont les conséquences retentissent sur la sécurité et la stabilité de la région au sens large. Le Groupe a constaté qu’il y avait des liens entre les violations de l’embargo sur les armes et les courants illicites d’armes à destination des pays voisins, la piraterie dans les eaux somaliennes et les eaux internationales, et les activités de groupes armés et d’extrémistes au-delà des frontières somaliennes.
3. Les envois d’armes à destination de la Somalie proviennent généralement de Djibouti, des Émirats arabes unis, d’Érythrée, d’Éthiopie et du Yémen ou transitent par ces pays, d’où il est simple d’acheminer des armes en Somalie. Les principaux points d’entrée sont les ports qui desservent Puntland (Bosaso), Mogadishu (Marha et El Ma ‘an) et Kismayo, ainsi que les terrains d’aviation situés aux alentours de Mogadishu. La méthode habituelle, pour tourner les sanctions, consiste à acheminer les armes par un petit bateau de pêche, ou cachées dans la soute d’un avion La marchandise est ensuite distribuée dans l’ensemble du pays en passant par une longue chaîne d’intermédiaires.
4. Une bonne partie de ce trafic est assurée par des dhows (voiliers traditionnels), du Yémen à la côte nord-est de la Somalie. La plupart des envois, en majorité vers le principal port de la région, Bosaso, ne sont ni remarqués ni signalés. Le gros en est destiné à Mogadishu, plaque tournante du commerce somalien des armes. En moyenne, il arrive du Yémen en Somalie des dhows chargés d’armes et de munitions deux à trois fois par semaine.
5. Quelque 1250 vols arrivent chaque mois en Somalie, en provenance pour la majorité d’entre eux des pays voisins et d’autres États de la région. II est rare que leur chargement soit inspecté. Il n’y a guère de réglementation de l’espace aérien somalien, et les opérations aériennes à destination et en provenance de la Somalie arrivent facilement à passer inaperçues lorsqu’elles violent les sanctions. De même, la frontière entre la Somalie et l’Éthiopie, longue de 1600 kilomètres, est pour l’essentiel laissée sans surveillance, et la circulation est libre dans les deux sens.
6. Les chefs de factions somaliennes paient leurs armes de diverses manières. par exemple, au moyen d’espèces reçues de leurs protecteurs étrangers, ou tirées des impôts et redevances perçus dans les ports et les aéroports et aux barrages routiers, en khat, ou en faux shillings somaliens imprimés à j’étranger. Le Groupe a enquêté sur plusieurs tentatives récentes d’imprimer des milliards de shillings somaliens (l’équivalent de millions de dollars des États-Unis) en faux billets.
7. Les violations de l’embargo sur les armes ont permis à des terroristes transnationaux de se procurer non seulement des armes légères, mais même des systèmes portatifs de défense aérienne, des armes légères antichar et des explosifs. Les terroristes responsables en 2002 de la destruction à l’explosif du Paradise Hôtel de Mombasa, et de la tentative visant le vol 582 (Mombasa- Tel-Aviv), avaient acheminé leurs missiles au Kenya depuis le Yémen, en passant par la Somalie. Le Groupe a établi qu’il restait relativement facile de se procurer des missiles surface-air et de les importer en Somalie.
8. Des États de première ligne et des acteurs extérieurs régionaux jouent un rôle essentiel dans les affaires somaliennes. Même s’ils ont manifesté plus de respect pour l’embargo sur les armes ces six derniers mois qu’ils ne l’avaient fait les années précédentes, ils sont nombreux à persister dans leurs violations, et rares à s’être activés pour faire cesser les envois commerciaux d’armes en Somalie. Le Groupe a constaté souvent qu’ils ne soutenaient pas ses travaux, mais même lorsqu’ils lui apportaient leur aide, nombre des États de la région n’avaient pas les moyens de surveiller suffisamment les marchandises exportées ou réexpédiées passant par leurs ports, leurs aéroports, leurs points de passage aux frontières terrestres, leurs eaux territoriales et leur espace aérien.
9. Les observateurs sont nombreux à attribuer la diminution des courants d’armes, ces derniers mois, au contrôle actif des violations de l’embargo exercé par le Conseil de sécurité. Au moment où le processus de paix en Somalie entre dans une phase critique, et difficile, l’imposition effective de l’embargo et un contrôle robuste peuvent contribuer à renforcer l’attachement des parties au dialogue, limiter les possibilités d’une reprise du conflit armé et en atténuer les conséquences si elle se produisait.
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Combien coûte la Paix ?
Vraies dépenses pour fausse consolidation
Fidèles à notre posture d’observateurs vigilants de toutes les anomalies dans la gestion du bien public, nous versons cette semaine un nouveau dossier au chapitre du mensonge permanent. Puisque nos souverains députés ne sont pas sourcilleux sur ce sujet et n’étant pas habilités à saisir la Chambre des Comptes (qui n’est d’ailleurs légalement pas autorisée à rendre un compte public de ses conclusions et recommandations…), nous avons jugé utile d’interpeller le gouvernement sur ce dossier qui nous et vous concerne au premier chef : « la consolidation de la paix ».
Dans un très bref exposé des motifs introduisant le projet de loi des finances rectificative pour l’exercice 2003 (LFR 2003), nous apprenons effarés (même habitués à la permanence et à la grossièreté des mensonges de l’Etat) que «les dépenses de personnels sont en hausse suite à l’intégration de 300 éléments du FRUD au sein des forces armées. Le report au mois d’octobre du programme de démobilisation entraîne un surcoût qui se traduit par une croissance des crédits des mobilisés». Curieusement, ces « surcoût et croissance des crédits des mobilisés » ne sont pas mentionnés au titre II : Dépenses du personnel, dans la ligne budgétaire libellée « mobilisation-démobilisation AND–05/0013/61/1 (traitements et salaires) et 05/003/61/6/9 (primes de démobilisation) qui reste égale dans le budget 2003 et la L.F.R 2003 (743,048 millions fd). Ils ne sont pas non plus mentionnés dans les dépenses de personnel de la gendarmerie nationale 05/005/61/1 dont le montant des dépenses est égal dans le budget 2003 et la L.F.R 2003 (34,8 millions fd).
Ces surcoût et croissance des crédits des mobilisés sont portés au titre IV «Transferts » du projet de la L.F.R 2003. Cette ligne budgétaire 07/64/4/1 est libellée « Consolidation Accords de paix-Contribution nationale » : son enveloppe est passée d’un montant de 350 millions fd dans le budget prévisionnel 2003 à 767millions FD dans celui rectificatif 2003, soit une différence de 417 millions fd. Rappelons que dans le Budget prévisionnel 2002, une ligne budgétaire 07-6441 était pourvue d’un montant de 350 millions FD.
Les comptes définitifs pour l’exercice 2002 n’ayant toujours pas été adoptés par notre souveraine Assemblée Nationale, ce sont au total, à en croire nos pacifiques décideurs, un milliard cent dix-sept millions FD qui auraient été dépensés en deux ans pour consolider la Paix. Emmuré dans cet unilatéralisme que nous continuons de dénoncer, et en violation de l’article 24 stipulant en son point b : « les deux parties signataires du présent accord conduiront de concert l’application stricte et honnête de la totalité de son contenu et de toutes les autres mesures entreprises dans son cadre ou en rapport avec ses objectifs », le gouvernement aurait donc engagé en 2003 767 millions fd (sur fonds propres comme l’affirme le libellé) pour consolider la paix.
Le conditionnel est de rigueur. Parce que nous sommes les mieux placés pour le faire, nous nous inscrivons en faux contre ces affirmations et exigeons des responsables chargés d’exécuter cette ligne budgétaire d’apporter dans les plus brefs délais, les preuves matérielles et la démonstration que ces dépenses ont été engagées à cet effet (dates, montants, affectations et bénéficiaires…). En attendant, nous portons à la connaissance de nos lecteurs que le programme de consolidation comporte trois volets entraînant une incidence budgétaire : la réinsertion des combattants du Frud-armé, la réintégration des anciens cadres dans leur administration d’origine et l’engagement des combattants du FRUD dans les différents corps armés. Aucun de ces trois volets nous concernant n’a trouvé une application concrète et totale.
L’Association des Démobilisés du Frud-armé s’est vue opposer un refus systématique à toutes ses démarches entreprises en ce sens auprès du gouvernement pour la réinsertion de ses démobilisés, qui hantent la Capitale et les districts et grossissent les rangs des désœuvrés. A ce jour, ni les recrues dans la FNP, ni celles de la gendarmerie n’ont été officiellement engagées dans ces deux corps alors que dans l’exposé des motifs il est officiellement (et mensongèrement) question de 300 combattants du Frud-armé. S’agissant de la réintégration dans leur administration d’origine des anciens fonctionnaires, est-il besoin de rappeler qu’ils sont aujourd’hui les seuls à totaliser 20 mois d’arriérés de salaire, malgré une correspondance officielle de protestation des intéressés auprès des différents ministères de tutelle.
Il ressort de toutes ces violations de l’Accord de Paix définitive depuis sa signature que, loin d’être consolidée, la paix civile est gravement menacée par le maintien du statu quo ante qui a conduit au douloureux conflit armé…
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