Une mission du Fonds monétaire international(FMI) dirigée par Brett Rayner vient de terminer son travail à Djibouti. La mission est principalement consacrée à l’impact des investissements publics lourds injectés dans la construction d’infrastructures de ce pays de l’est africain.
Les conclusions peuvent servir de canevas en termes de succès et d’écueils à d’autres pays africains qui ont fait des infrastructures un modèle de développement.
Que retient-on des conclusions de cette mission du FMI à Djibouti ? Il apparaît que les grands investissements dans les infrastructures portuaires des dernières années ont stimulé la croissance, mais ont également accru les facteurs de vulnérabilité macroéconomique tout en générant peu d’emplois et de recettes fiscales. Que la pandémie de Covid-19 et le conflit éthiopien ont eu un impact significatif sur l’activité économique et ont révélé les vulnérabilités macroéconomiques de ce pays qui fait des émules pourtant en matière de développement. Comme solutions proposées, celle consistant en l’instauration d’une politique budgétaire visant à augmenter les recettes intérieures et une surveillance plus stricte des entreprises publiques contribuerait à restaurer la viabilité de la dette et à aménager un espace pour les dépenses sociales.
«Les investissements à grande échelle de Djibouti dans ses infrastructures ont insufflé une forte croissance économique ces dernières années, mais les bénéfices n’ont pas été largement partagés», indique Brett Rayner, chef de la mission du FMI à Djibouti. En effet, le pays a investi massivement dans d’importantes infrastructures portuaires et routières, ce qui a généré une croissance annuelle de près de 7% entre 2013 et 2019, avant la crise du Covid. Paradoxalement, ces investissements centrés sur des projets à forte intensité de capital ont généré peu d’emplois au niveau national et peu de recettes fiscales, et le chômage reste élevé. Par conséquent, les progrès en matière de résultats sociaux ont été lents. Il faut noter également que l’augmentation des investissements portuaires a accru les facteurs de vulnérabilité macroéconomique. La dette publique a augmenté pour atteindre environ 70% du PIB. «Les investissements étant de plus en plus réalisés par des entreprises publiques et le nouveau fonds souverain, une grande partie de l’activité budgétaire est désormais hors budget», explique Brett Rayner.
Plus récemment, la pandémie de Covid-19 et le conflit en Éthiopie voisine ont eu un impact significatif sur l’activité économique et révélé les vulnérabilités macroéconomiques du pays. L’activité portuaire a chuté, d’abord en raison des perturbations du commerce mondial liées à la pandémie, puis en raison du recul de la demande en Éthiopie. La croissance de la production a donc ralenti pour atteindre environ 1% en 2020. «Les perspectives économiques sont assombries par le conflit en Éthiopie. La croissance devrait se redresser en 2021 pour atteindre 4% grâce à un rebond des investissements et de la construction, mais les perspectives pour 2022 sont moins favorables et sujettes à des risques baissiers en raison du conflit éthiopien et d’une possible recrudescence de la pandémie. Une fois la sécurité régionale et la situation sanitaire rétablies, les perspectives de croissance sont solides, avec un secteur portuaire compétitif bien placé pour bénéficier d’un redressement du commerce régional et mondial», note la mission du FMI dans ses conclusions. «Le principal défi de Djibouti est de soutenir une reprise durable et inclusive après la crise du Covid-19 et le conflit éthiopien. Le gouvernement devrait donner la priorité à la mobilisation des recettes intérieures pour restaurer la viabilité de la dette et aménager un espace pour les dépenses sociales. Pour augmenter les recettes, les autorités devraient réduire les exonérations fiscales, y compris pour les entreprises publiques. Des réformes de la gouvernance et de la gestion des finances publiques seront également de mise pour préserver la stabilité économique », poursuivent les conclusions du FMI.
Enfin, les réformes structurelles devraient contribuer à créer des emplois. Des améliorations du système éducatif devraient permettre de remédier aux asymétries entre la main-d’œuvre et les compétences. Les investissements actuels dans la production solaire et éolienne devraient permettre de réduire le prix de l’électricité et de stimuler la compétitivité du pays. En outre, la privatisation partielle de Djibouti Télécom, récemment annoncée, pourrait contribuer à réduire le prix des TIC et à élargir l’accès aux services de téléphonie mobile.