Réalité numéro 65 du mercredi 8 octobre 2003 |
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Sommaire
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Directeur de Publication :
ALI MAHAMADE HOUMED Codirecteur : MAHDI IBRAHIM A. GOD Dépôt légal n° : 65 Tirage : 500 exemplaires Tél. : 25.09.19 BP : 1488. Djibouti Site : www.ard-djibouti.org Email : realite_djibouti@yahoo.fr
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Éditorial
LE CIRQUE POLITIQUE BIENTÔT EN REPRÉSENTATION A YOBOKI
Terminator, Gouvernator, Exterminator, Doctor : ce n’est certainement pas un hasard si les comédiens et autres acteurs de cinéma sont statistiquement (par rapport à d’autres métiers) les plus nombreux à être attirés par une carrière politique. Sans parler de la candidature de Coluche, même la reconversion réussie de Bernard Tapie en sens inverse le montre clairement : la politique est inséparable du spectacle. Mais si la concurrence électorale entre les partis et l’alternance des régimes, qui définissent une véritable démocratie, tempèrent ailleurs le recours abusif à la mise en scène mystificatrice, l’action politique est le plus souvent réduite, dans les situations de parti unique comme à Djibouti, à la seule imagerie officielle exagérément produite par des médias dociles, avec tout ce que cela implique de retouches ou de trucages.
Au moment où, dans le cadre de ses activités, l’ARD projette pour bientôt une tournée dans le Sud et le Sud-Ouest, c’est essentiellement dans cette optique symbolique (au sens de nulle) qu’il convient de comprendre les récentes et prochaines attentions que le régime feint d’accorder à Yoboki et sa région. A régime sans dessein, coopération sans envergure : tout le monde, à commencer par les habitants de Yoboki, aura noté le ridicule consistant à financer aujourd’hui une étude aux fins d’installation d’un réseau électrique alimenté par un groupe électrogène qui s’ennuie sur place depuis plus d’un an. Mettre la charrue avant les bœufs, c’est la meilleure trouvaille du régime pour simuler le mouvement au point mort.
Pourquoi le spectacle tient-il donc ici lieu d’action et de pensée politiques ? Principalement parce qu’il s’agit, sous la conduite peu éclairée du Chef de l’État en campagne électorale anticipée, de violer les dispositions de l’Accord de paix du 12 mai 2001 relatives à l’indemnisation des biens civils détruits et à la Réhabilitation des zones affectées par le conflit. On saisit alors toute la mesure de la démagogie en action, surtout quand il s’agit d’une région comme celle de Yoboki qui, bien que sécurisée d’un point de vue militaire dès les Accords d’Ab’a en 1994, n’a jamais bénéficié du moindre programme de reconstruction de ses infrastructures. Et si nous rappelons sans cesse cette violation, c’est surtout parce que partout dans le monde, elle s’est terminée par un nouveau conflit : seul un régime irresponsable peut l’oublier.
Comme pour Obock ou Randa, aucune visite ministérielle ou présidentielle n’y changera rien : le triste spectacle des artifices politiques, servi jusqu’à la nausée par les médias gouvernementaux, ne sert qu’à masquer la réelle absence d’un programme tendant à restaurer dans leur dignité, dans leurs biens et dans leurs droits les habitants de ces régions dévastées et visant à durablement arracher toutes les masses défavorisées au dénuement dans lequel les maintiennent prédation et mauvaise gouvernance généralisées.
Le pain et le cirque, disaient déjà les Latins. A défaut d’assurer le pain quotidien en améliorant leurs conditions d’existence, le régime est en tout cas très généreux dans la promotion de son cirque politique : bientôt à Yoboki. Les invités de la région sont rassurés : aucune carte nationale d’identité ne sera exigée pour pouvoir assister au spectacle.
C’est déjà cela de gagné !
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Brèves nationales
Présidence de la République :
Bailleur de fonds national ?
Le Chef de l’État a récemment inauguré une unité de dialyse du service de santé des FAD. Cet appareillage coûteux mais très utile n’a été financé ni sur le budget de la Défense ni sur celui de la Santé, mais par la Présidence. Mais d’où proviennent alors les fonds apparemment inépuisables et non budgétisés de ce nouveau bailleurs de fonds national ? Rappelons qu’il y a plus d’un an la première dame avait « fait don » à l’Hôpital Peltier d’un coûteux appareil de mammographie, au cours d’une cérémonie médiatisée à outrance.
Nous ne serions pas étonnés d’apprendre dans quelques mois que la Présidence a financé l’acquisition de nouveaux équipements pour la RTD fragilisée après l’incendie de samedi dernier. A quoi servent les départements ministériels et leurs budgets respectifs, si les projets relevant de leur compétence sont concoctés et financés par la Présidence, seul îlot de prospérité dans un océan de précarité ?
Sud-Ouest :
Visite de l’agronome volant ?
Dans le cadre de la promotion du développement agropastoral, le Chef de l’État, frais émoulu de l’Université d’agriculture de Tokyo, s’apprêterait à effectuer une visite médiatique dans la région Yoboki Galafi à la mi-octobre.
Après ses visites éclairs du mois de juillet dernier à Assamo et As-Eyla au cours desquelles il avait prodigué ses conseils éclairés aux cultivateurs de ces deux localités, nul doute que cette fois, « le numéro un djiboutien » s’entretiendra avec les nomades du Sud-ouest, de la riziculture en milieu aride. A moins que ce ne soit de l’autosuffisance en kath…
A ce chapitre, le jardin d’acclimatation du Day, propriété privée de notre agronome volant, accueille déjà plus de 2000 plants de khat tout droit venus de la région de Dire-Dawa. Une façon comme une autre de lutter contre l’érosion des hauts plateaux djiboutiens !
Yoboki :
Réhabilitation élec…toraliste ?
Après les réhabilitations ébranlées de Randa et d’Obock, le régime planche actuellement sur l’électrification bien tardive de Yoboki. Neuf ans après les accords d’Ab’a, cette localité abandonnée végète encore dans l’obscurité. Pré-campagne présidentielle oblige, les autorités semblent à présent décidées à la sortir des ténèbres dans lesquelles elle était injustement maintenue depuis 1992. Le groupe électrogène livré en 2002 attend peut-être la visite du Président lui aussi électrogène pour fonctionner.
Dans une logique d’esbroufe, le Commissaire de Dikhil évoque déjà la mise sur pied d’un comité de gestion du futur réseau électrique dont la mise en service est prévue dans trois mois. On se souvient du groupe électrogène de Randa qui a cessé de fonctionner, faute de carburant, dès le lendemain de son inauguration en grande pompe. Les habitants de Yoboki restent pantois devant ce qu’ils considèrent comme une gageure électoraliste. Après tout, ces populations n’oublient pas qu’à leur retour d’exil, elles ont dû attendre près de dix ans pour entendre à nouveau parler d’électricité.
En attendant, il reste les habitations détruites à reconstruire, les démobilisés à réinsérer, toutes les victimes ayant perdu leurs biens à indemniser. Pari impossible à tenir par ce régime se nourrissant de la détresse de ses concitoyens en les abrutissant avec du khat financé avec les deniers publics. Pur délire que prétendre pouvoir convaincre ainsi une population oubliée depuis si longtemps. Avant de renouer avec la lumière, la vraie, Yoboki entend se libérer de l’obscurantisme imposé pour ce régime paternaliste et sectaire.
Education Nationale :
Le triangle de l’ignorance
Hanlé, Galafi, Gagadé, Assal, toutes ces régions bien peuplées du district de Dikhil se singularisent par un injuste et criminel abandon dans le domaine de l’Éducation. En effet, aucune école n’y a été construite en un quart de siècle d’indépendance. Les habitants de ces contrées n’ont ni école, ni dispensaire, ni même de pièces d’identité. Ils se considèrent comme les damnés de notre pays.
En février 2002, lors d’un pompeux séminaire sur l’action gouvernementale, le Vice-président du Conseil régional coopté de Dikhil avait courageusement évoqué la gravité de la situation dans ces régions, sans être entendu. Un véritable développement respectueux des populations commence par la lutte contre l’ignorance, en un mot par l’éducation des enfants, avant le GSM et la Télévision !
Damerjog :
Futur ranch agropastoral ?
Nul n’est censé l’ignorer, notre Président est un amoureux de la terre. Anticipant sur l’installation à Damerjog d’un Centre Régional d’Exportation de Bétail, notre illustre paysan y disposerait déjà d’une propriété à finalité agropastorale. Les méchantes langues affirment même qu’il compte y pratiquer la riziculture apprise au Japon paraît-il. La future rizière serait irriguée à partir de l’eau de mer dessalée par une usine devant être installée su la côte et destinée à fournir de l’eau douce pour les millions de tête de bétail qui transiteront par cette localité de Damerjog.
On n’arrête pas le progrès agropastoral de notre pays et de son Président. Pour l’heure, Damerjog reste reliée à la Capitale par une piste qui attend d’être goudronnée comme celles des autres zones rurales.
Port pétrolier de Doraleh :
En attendant l’Oléoduc ?
Les ports d’Aden (Yémen) et de Salalah (Oman) n’ont qu’à bien se tenir. Le futur port de Doraleh (voulu par le Chef de l’État) et dont le Conseil d’Administration déjà en place est présidé par un très proche du « promoteur », deviendra à n’en pas douter le plus performant de la région, et pour cause : des gisements de pétrole découverts paraît-il dans la zone côtière du nord-est du Somaliland, seraient bientôt mises en exploitation. Il s’agit donc à présent de plancher sur la faisabilité d’un projet d’oléoduc qui relierait cette région pétrolifère du Somaliland au futur terminal pétrolier de Doraleh. Il fallait y penser ! Depuis que l’Emirat de Dubaï est devenu notre modèle…
Clandestins :
Retour à la case départ
Le régime a beau claironner que des centaines d’étrangers en situation irrégulière ont été refoulés depuis le début des rafles, on observe depuis plusieurs jours un mouvement en sens inverse. Les immigrés reviennent dans la Capitale. Il suffit pour s’en convaincre d’observer la cohorte des mendiants et autres sans domicile fixe qui errent en ville. Ce mouvement de retour est rendu possible par l’existence de trois facteurs : la porosité de nos frontières, le dynamisme des passeurs professionnels et le dépeuplement progressif du camp d’Awr-Aoussa au profit de la Capitale.
A ce rythme, d’ici le mois du Ramadan, Djibouti retrouvera son visage d’avant le mois d’Août. Conçue dans une logique démagogique et électoraliste, la brutale et maladroite lutte contre l’immigration clandestine mise en œuvre par le régime ne pouvait que lamentablement échouer.
Ce docteur m’abuse :
L’honneur sans cause
La communauté internationale est décidément ingrate : bien qu’il ait inventé une approche révolutionnaire dans le règlement des conflits (faire la paix sans ceux qui font la guerre) et bien que le Budget du pays ait beaucoup souffert de la générosité d’Arta, le prix Nobel de la paix n’a pas été décernée au Chef de l’Etat djiboutien pour son inestimable contribution à la réconciliation intersomalienne. Les ingrats l’auraient même oublié, lui préférant d’ombrageux voisins, puisque notre pays ne semble pas avoir été le bienvenu à la énième conférence des chefs de guerre qui se tient actuellement au Kenya.
Qu’à cela ne tienne ! l’intolérable injustice ainsi commise est aujourd’hui réparée : une illustre université japonaise reconnaît enfin ses incommensurables qualités, qui vient de lui accorder le titre de docteur honoris causa. Le quidam national est sommé de gober la plaisanterie internationale, même s’il sait qu’une telle distinction est généralement une sorte de transaction au terme de laquelle une université rehausse son propre prestige en distinguant une personnalité ayant elle-même un cursus académique et une action politique incontestables.
Sans avoir à évoquer la prétention présidentielle d’introduire à Djibouti la culture du riz jaune (sans rire, bien entendu !), les motifs invoqués pour cette distinction honorifique laissent perplexes : c’est à se demander si l’honorable université nippone ne s’est tout simplement pas trompé d’impétrant.
En effet, comment rester sérieux lorsque l’on apprend, dans les colonnes de « La Nation », que le Chef de l’État a été distingué pour « son encouragement à l’égard de l’Université d’Agriculture de Tokyo dans son projet intitulé ‘’le reboisement du désert’’ » ? Il y a une nouvelle coopération Sud-Nord dont nous ne sommes apparemment pas au courant.
Quant à « ses efforts entrepris dans la lutte contre la famine et la désertification, son combat pour l’autosuffisance énergétique, son initiation d’une grande campagne « vert » visant la régénération de la végétation et la lutte contre la pauvreté, son rôle actif dans le développement et l’amélioration de l’agriculture, dans la lutte pour la préservation de l’environnement » (excusez du peu), au-delà des répétitions qu’impose l’hagiographie officielle, il est malheureux de constater que la réalité nationale ne corrobore absolument pas de tels exploits.
La dégradation des conditions de vie, de l’environnement, l’état d’abandon des régions de l’Intérieur démontrent tout le contraire. A moins que l’auguste institution ait pris le projet présidentiel d’acclimatation du khat et du café au Day pour une action visant à l’autosuffisance alimentaire et à la protection de cette forêt unique en son genre.
Il faut être irresponsable RPP ou quelque fonctionnaire international pour prétendre que tout va bien. Heureusement, si les Djiboutiens ont beaucoup moins de raisons que les Irakiens d’être désespérés de l’impuissance des Nations Unies, le Japon est pour nous un partenaire de développement constant et efficace qui vaut bien que lui soit pardonné ce doctorat de circonstance.
Service National Adapté :
Le grand bluff de l’insertion sociale des jeunes
Dans un pays où le chômage frappe la quasi totalité des jeunes en âge de travailler et vu le mécontentement grandissant de cette catégorie sociale, le régime en panne d’imagination n’a rien trouvé de mieux que de tenter l’embrigadement. Ce projet loufoque œuvre de l’imagination débordante de notre Einstein national a été confié pour explication à deux spécialistes de « la gestion de vraie problématique» : le Premier Ministre et le Ministre de la Défense. Ce dernier, au gouvernement depuis plus de 8 ans et de surcroît signataire d’un accord de paix avec le régime, oublie que plus d’un millier de démobilisés du Frud d’Ab’a attendent une vraie réinsertion.
Quant au numéro deux virtuel du régime, par ailleurs négociateur de l’accord cadre de réformes et de concorde civile de février 2000, et responsable de tutelle du Prac (Programme de Réinsertion des Anciens Combattants) , se souvient-il des 774 démobilisés du Frud-armé qui ne bénéficient d’aucune réinsertion sociale ?
En cette période préélectorale, le régime ne sait plus à quel saint se vouer pour appâter les jeunes. La formation professionnelle n’a jamais constituée une priorité gouvernementale. La preuve: l’Éducation nationale fabrique elle-même chaque année des milliers de chômeurs.
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Géostratégie du légionnaire
du mercredi 24 septembre 2003
C’est le bordel à Djibouti
On savait depuis longtemps que ce n’était pas la réussite de ce régime qui propulsait notre pays sur le devant de l’actualité internationale. On apprend aujourd’hui, aux dépens de notre honneur national, que ce n’est pas non plus les seuls attraits géostratégiques qui attirent l’attention internationale sur les manœuvres de la présence militaire étrangère. Loin des considérations tactiques de la lutte antiterroriste, le scandale qui secoue actuellement les sphères galonnées tricolores, et que révèle le document ci-dessous reproduit du Canard Enchaîné, concerne le commerce des corps, souvent mineurs. Et interpelle sur la responsabilité du régime en place dans cette intolérable prostitution.
Alors qu’ils travaillaient sur une affaire de corruption qui éclabousse l’armée à Djibouti, les pandores sont tombés sur plus surprenant encore. Dans l’une de ses dépositions, un officier gardé à vue a craché le morceau sur la gestion du bordel qui jouxte l’enceinte du camp militaire de la Légion étrangère.
Ce « pouf », selon l’expression en vigueur chez les képis blancs, avait déjà eu les honneurs du « Canard » le 18 juin dernier. Pour y avoir abusé de gamines dont la plus âgée avait onze ans, un caporal répondant au nom de Colin Powell (rigoureusement sic) avait été interpellé par les gendarmes. Mais, bien que relevant du tribunal aux armées de Paris, selon les accords franco-djiboutiens, l’intéressé avait récupéré fissa par la Légion et remis aux autorités locales. Lesquelles l’avaient condamné à… 3 mois de prison (pour ce genre de facéties, c’est 10 ans, selon le Code pénal français).
Or la déposition récente de cet officier mis en garde à vue dans une autre affaire éclaire d’un jour nouveau l’obligeance de ces messieurs à képi blanc envers un des leurs. « Quand je suis arrivé à la division, explique le mouchard, j’ai été mis au courant de l’existence d’un cahier qui devait être tenu secret et que chaque chef de corps remettait à son successeur. Ce cahier relatait tout l’historique financier des différents « poufs » (maison close militaire). Sur ce cahier apparaissaient les noms des différents chefs de corps ayant autorisé cette activité au sein du régiment. »
Et le naïf de narrer par le menu le malaise du nouveau patron du régiment découvrant le fameux « cahier » avec les noms de « généraux actuels qui y figuraient », et demandant, après l’avoir mis au coffre, « que personne n’en parle». « Toutes les personnes dont le nom figure sur ce cahier pourraient être accusées de proxénétisme aggravé et de détournement de fonds. » Des généraux maquereaux, quelle affiche !
L’ambiance est telle, sur place, qu’en sortant de sa garde à vue le témoin a souscrit une assurance-vie ! Mais les pandores, qui travaillent sur commission rogatoire, sont bien décidés à mettre la main sur l’encombrant brûlot. Car, depuis la fin de la guerre d’Algérie, les bordels sont interdits dans les armées. Une exception avait été faite pour la Légion étrangère, jusqu’en 1978, époque à laquelle Bourges avait ordonné la fermeture de tous les établissements. Au grand dam des anciens.
A Djibouti pourtant, le petit commerce a perduré jusqu’en 1993. mais, lors d’une inspection, un général a finalement exigé que le pouf soit installé à l’extérieur du camp militaire. On l’a donc collé de l’autre côté du grillage. « Dans le cadastre, ce n’est plus une emprise française », se marre un gradé. Mais le nom des généraux, lui, est bien à l’intérieur… du cahier.
B.R.
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COMMENTAIRE
A moins de supposer une extraterritorialité, une sorte de « zone franche sexuelle », il est légitime de penser que ce bordel est une société commerciale de droit djiboutien, appartenant à des Djiboutiens et dont les bénéfices vont à des Djiboutiens : le régime RPP est au moins son complice, sinon son actionnaire. Qui sont donc ces malheureuses prostituées, souvent mineures ? Françaises : strictement impossible ! Immigrées clandestines : quelques-unes, mais certainement majeures. Djiboutiennes : au moins les mineures, à n’en pas douter. Beaucoup de bruits courent à propos de réseaux djiboutiens de prostitution, dont un à Ambouli.
Le mode de recrutement de la Légion étrangère ainsi que la misère sexuelle des garnisons peuvent largement expliquer de tels comportements déviants. Mais que la Justice djiboutienne ne réprime pas ces perversions, surtout le trafic de mineures, en dit long sur la moralité qui règne dans certaines sphères dirigeantes et de leur prétendue « promotion de la femme ». Réalité mène son enquête et livrera bientôt ses conclusions.
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En hommage à Edward Saïd
L’œuvre du grand intellectuel, Edward Saïd, récemment décédé, mérite d’être connue. Son origine palestinienne donnait à ses écrits une impression d’écorché vif, tandis que sa citoyenneté américaine d’adoption se retrouvait dans sa totale liberté de pensée, loin du conformisme ambiant. Voici un texte publié dans Le Monde Diplomatique d’août 1998 dans lequel il invite les intellectuels arabes à éviter les explications trop faciles dans la recherche d’une solution au problème israélo-palestinien.
RÉPONSE AUX INTELLECTUELS ARABES FASCINÉS PAR ROGER GARAUDY
Israël-Palestine, une troisième voie, par EDWARD SAÎD
La décision prise, cet été, par le gouvernement israélien d’accélérer la judaïsation de Jérusalem-Est confirme l’échec des accords d’Oslo. Cette impasse ravive le débat entre intellectuels arabes sur les responsabilités qui leur incombent. Ainsi nombre d’entre eux – à de très rares et courageuses exceptions près – saluent en Roger Garaudy, dont souvent ils ne connaissent pas les derniers livres, un défenseur de l’islam victime de la censure occidentale. Très critique envers ce dernier ainsi qu’à l’égard de ses partisans arabes, notamment égyptiens, Edward W. Saïd revient ici sur la question de l’engagement moral et politique de l’intellectuel arabe ou israélien.
MAINTENANT qu’Oslo s’est révélé foncièrement inopérant et impraticable, il serait pour le moins souhaitable que les défenseurs arabes, israéliens et autres de cet accord se décident à faire un effort de clarté. Un certain nombre de points préliminaires semblent s’imposer à cet égard; pour commencer, que le terme de « paix » est un mot désormais discrédité, voire frauduleux, dont l’usage a montré qu’il ne constitue aucune garantie contre l’avènement de nouvelles entreprises de répression et de destruction à l’encontre du peuple palestinien. Comment peut-on décemment continuer à parler de « paix » alors qu’Israël ne cesse, à force de pouvoir et d’arrogance, de démolir, d’interdire, de confisquer les terres, de procéder à des arrestations et de pratiquer la torture (1)?
L’historien romain Tacite disait de la conquête de l’Angleterre qu’ « ils [les soldats romains] avaient créé la désolation et lui avaient donné le nom de paix ». C’est très exactement ce qui se passe aujourd’hui dans les territoires occupés, et ce avec la collaboration de l’Autorité palestinienne, des États arabes (à peu d’exceptions près), d’Israël et des États-unis.
Il est, d’autre part, inutile et vain de penser que l’on peut sortir de l’impasse par un retour au passé. Nous ne pouvons ni revenir aux jours d’avant la guerre de 1967 ni accepter le recours à des slogans de rejet et de ségrégation, prétendument inspirés de l’âge d’or de l’islam. Comme le disent aussi bien Israël Shahak (2) qu’Azmi Bishara (3), il faut, pour défaire l’injustice, créer davantage de justice et non pas de nouvelles formes de surenchère du type: « Ils ont un État juif, nous voulons un État islamique. » Sans compter qu’il est stupide de vouloir imposer un boycottage à tout ce qui est israélien (mode de pensée actuellement en vogue dans plus d’un cercle d’intellectuels progressistes arabes), et de prétendre que c’est là que se trouve la vraie voie du nationalisme.
Et le million de Palestiniens qui sont citoyens israéliens, faut-il aussi les boycotter, comme ce fut le cas dans les années 50? Et les Israéliens qui appuient notre combat, faut-il qu’ils soient boycottés parce qu’ils sont israéliens? Une telle attitude équivaut à nier le triomphe du peuple sud-africain sur l’apartheid et à faire fi de toutes les victoires de la justice dues à la coopération politique non violente entre gens de même opinion situés des deux côtés d’une frontière mobile. Comme je l’ai écrit récemment (4), nous ne pouvons gagner cette bataille en souhaitant que les juifs s’en aillent ou en prônant l’islamisation: nous avons besoin de ceux qui de l’autre côté de la frontière sont partisans de notre lutte. Nous nous devons de franchir cette ligne de séparation que les accords d’Oslo ont, entre autres, consacrée et qui maintient une situation d’apartheid entre juifs et Arabes en Palestine. La franchir et non pas la renforcer.
Enfin, et ce point est sans doute le plus important, il y a une différence majeure entre un comportement politique et un comportement intellectuel. Le rôle de l’intellectuel est de dire aussi pleinement, aussi honnêtement et aussi directement que possible la vérité. Cela implique qu’il ne se soucie ni de plaire ou déplaire au pouvoir, ni de s’inscrire dans la logique d’un gouvernement, ni de répondre à un intérêt de carrière. Le comportement politique repose, en revanche, sur des considérations d’intérêts et de maintien de pouvoir. Il est évident, à cet égard, que la poursuite de la voie tracée par les accords d’Oslo place les États arabes, l’Autorité palestinienne ainsi que le gouvernement israélien dans une position strictement politique et non pas intellectuelle.
Prenez, par exemple, la déclaration conjointe des Égyptiens (Société du Caire pour la paix) et des Israéliens (La Paix maintenant) (5), retirez- en les phrases redondantes sur la « paix » et constatez le résultat: vous avez là non seulement un endossement d’Oslo, mais aussi un retour à l’esprit des accords de Camp David entre Anouar El Sadate et Menahem Begin à la fin des années 70, ici décrits comme un modèle de courage, d’une importance décisive. Tout cela est très bien, à cela près que l’on est tout de même en droit de se demander ce qu’il en est des Palestiniens dans cette affaire. Ni la question de leur autodétermination ni celle de leur territoire ne sont mentionnées dans ce fameux « modèle de courage » que sont les accords de Camp David.
Que penserait-on si une poignée d’Israéliens et de Palestiniens formulaient ensemble de vibrantes proclamations de paix israélo-syriennes en lieu et place de ces deux gouvernements? Au nom de quoi deux parties, l’une étant l’oppresseur des Palestiniens et l’autre s’arrogeant le droit de parler pour eux, seraient-elles habilitées à concevoir l’issue d’un conflit qui ne les oppose pas directement? Sans compter que, s’il devait s’agir d’en appeler à l’actuel gouvernement israélien, cela équivaudrait à demander au comte Dracula de nous vanter les vertus du régime végétarien! Bref, un tel comportement politique ne fait qu’abonder dans le sens d’un processus agonisant, celui d’Oslo, et hypothèque les chances d’une vraie paix, en opposition à la paix frauduleuse américano-israélienne. Néanmoins, il est intellectuellement irresponsable de revenir au confort de l’esprit de boycottage qui se répand actuellement dans un certain nombre de pays arabes. Cette sorte de tactique (pas plus maligne que l’entêtement d’une huître à chercher son chemin dans le sable) constitue une pure régression.
Israël n’est ni l’Afrique du Sud, ni l’Algérie, ni le Vietnam. Et, que cela nous plaise ou non, les juifs ne sont pas des colonialistes ordinaires. Oui, ils ont souffert de l’Holocauste, oui, nombre d’entre eux sont victimes d’antisémitisme. Non, ces faits ne leur donnent pas le droit d’exercer ou de poursuivre une politique de dépossession à l’encontre d’un peuple qui ne porte aucune responsabilité dans l’histoire de leurs malheurs. Je le dis et le répète depuis vingt ans: nous n’avons pas d’option militaire dans ce conflit et n’en aurons pas de sitôt. D’ailleurs, en dépit de leur énorme pouvoir, les Israéliens n’ont pas réussi, de leur côté, à obtenir la sécurité qu’ils souhaitaient. Il ne faut pas oublier non plus que les Israéliens ne sont pas tous les mêmes, et que nous nous devons, quoi qu’il arrive, d’apprendre à vivre avec eux de la manière la moins injuste ou, mieux encore, la plus juste possible.
La troisième voie dont je parle se démarque aussi bien de la faillite d’Oslo que des politiques rétrogrades de boycottage. Elle nécessite, tout d’abord, d’être conçue en termes de citoyenneté et non de nationalisme, dans la mesure où la notion de séparation (Oslo) et d’un nationalisme théocratique triomphaliste, qu’il soit juif ou musulman, ne répond ni ne traite des réalités qui nous attendent. Ce concept de citoyenneté implique que tout individu bénéficie d’un même droit, fondé non sur la race ou la religion, mais sur une égalité de justice garantie par la Constitution, concept inconciliable avec la notion largement dépassée d’une Palestine « purifiée » de ses « ennemis ». Qu’elle soit pratiquée par les Serbes, par les sionistes ou par le Hamas, la purification ethnique est la purification ethnique.
La position qu’Azmi Bishara et plus d’un juif israélien – tel Ilan Pappé (6) – tentent à présent de faire entendre et de promouvoir politiquement est une position qui accorde les mêmes droits aux juifs et aux Palestiniens qui se trouvent au sein de l’État juif. Et on ne voit pas pourquoi ce même principe d’égalité ne serait pas applicable dans les territoires occupés, où les Palestiniens et les juifs israéliens vivent côte à côte, sachant qu’à l’heure actuelle un peuple – les juifs israéliens – domine l’autre. Le choix est clair: c’est soit l’apartheid, soit la justice et la citoyenneté.
Le véritable enjeu se pose ici en termes de clarté et de courage intellectuels, un enjeu qui consiste à combattre toute discrimination raciale, d’où qu’elle vienne. Or il s’insinue, à l’heure actuelle, dans le discours et la pensée politiques d’un certain nombre d’intellectuels arabes une mauvaise vague d’antisémitisme rampant et d’hypocrite vertu. Une chose doit être claire: nous ne combattons pas les injustices du sionisme pour les remplacer par un nationalisme odieux (religieux ou civil) qui décréterait les Arabes de Palestine plus égaux que d’autres.
L’histoire du monde arabe moderne, avec son cortège d’échecs politiques, de violations des droits humains, d’incroyables incompétences militaires, de baisses de production (le tout accompagné du fait que, plus qu’aucun autre peuple moderne, nous reculons au lieu d’avancer en matière de démocratie, de technologie et de sciences), cette histoire est déformée par toutes sortes de poncifs et d’idées indéfendables qui vont, notamment, jusqu’à mettre en doute la réalité de l’Holocauste et la souffrance du peuple juif.
La thèse selon laquelle l’Holocauste ne serait qu’une fabrication des sionistes circule ici et là de manière inacceptable. Pourquoi attendons-nous du monde entier qu’il prenne conscience de nos souffrances en tant qu’Arabes si nous ne sommes pas en mesure de prendre conscience de celles des autres, quand bien même il s’agit de nos oppresseurs, et si nous nous révélons incapables de traiter avec les faits dès lors qu’ils dérangent la vision simpliste d’intellectuels bien-pensants qui refusent de voir le lien qui existe entre l’Holocauste et Israël. Dire que nous devons prendre conscience de la réalité de l’Holocauste ne signifie aucunement accepter l’idée selon laquelle l’Holocauste excuse le sionisme du mal fait aux Palestiniens. Au contraire, reconnaître l’histoire de l’Holocauste et la folie du génocide contre le peuple juif nous rend crédibles pour ce qui est de notre propre histoire; cela nous permet de demander aux Israéliens et aux juifs d’établir un lien entre l’Holocauste et les injustices sionistes imposées aux Palestiniens, établir un lien et du même coup le mettre en cause pour ce qu’il recouvre d’hypocrisie et de déviation morale.
Abonder dans le sens de Roger Garaudy et de ses amis négationnistes au nom de la liberté d’expression est une ruse imbécile qui ne fait que nous discréditer davantage aux yeux du monde. C’est une preuve de méconnaissance fondamentale de l’histoire du monde dans lequel nous vivons, un signe d’incompétence et d’échec à mener une bataille digne. Pourquoi ne combattons-nous pas plus durement en faveur de la liberté d’expression dans nos propres sociétés, une liberté dont tout le monde sait qu’elle existe à peine? Les mesures d’oppression et de censure de la presse et de l’opinion publique sont tout de même autrement plus inquiétantes dans le monde arabe qu’en France! Pourquoi ne pas concentrer nos efforts à les combattre plutôt que de s’exciter à défendre M. Garaudy et à se fourvoyer au point que certains, et parmi eux des intellectuels de renom, n’hésitent pas à ériger cet homme en Zola!
Des pays tels que l’Égypte et le Liban comptent respectivement 130 000 et 400 000 réfugiés palestiniens de 1948. Et voilà cinquante ans que ces derniers n’ont pas droit, pour la plupart, à un permis légal de séjour. Traités en ennemis par les États arabes qui les hébergent, ils sont privés de permis de travail, d’accès à l’éducation ainsi que d’assistance sociale ou médicale, et ils sont de surcroît sommés de se présenter à la police tous les mois. Oubliés de tous, n’appartenant ni à un lieu ni à un autre, ils vivent une situation littéralement kafkaïenne. On pouvait donc légitimement s’attendre à ce que des intellectuels responsables se mobilisent, dans les pays concernés, pour l’amélioration de leurs conditions de vie. L’obtention d’une aide humanitaire élémentaire et la levée des mesures discriminatoires auraient été bien plus utiles à la cause palestinienne que la pléthore de théories auxquelles nous avons droit, qu’il s’agisse de déclarations contre la « normalisation » ou pour les « nouvelles initiatives de paix » entre gouvernements égyptien et israélien.
Ce n’est pas tout. Suite à un article, publié en novembre dernier, dans lequel j’évoquais la question de l’Holocauste (7), j’ai été l’objet des plus stupides diffamations que je n’aurais pu imaginer. Un intellectuel bien connu a été jusqu’à m’accuser de chercher à obtenir un certificat de bonne conduite auprès du lobby sioniste. Bien sûr que je suis en faveur du droit de Garaudy à dire ce qui lui plaît et bien sûr que je m’oppose à cette lamentable loi Gayssot qui a servi à son procès et à sa condamnation (8). Il n’en demeure pas moins que son propos est vide de réalité et irresponsable, et que l’endosser consiste nécessairement à rejoindre le camp de M. Jean-Marie Le Pen et de tous les éléments fascistes et rétrogrades de l’extrême droite française.
LE combat que nous menons est un combat pour la démocratie et l’égalité des droits, pour un Etat ou une République laïque dont tous les membres sont citoyens égaux, et non pas un faux combat inspiré d’un passé mythologique et lointain, qu’il soit chrétien, juif ou musulman. Le génie de la civilisation arabe trouve son apogée dans l’Andalousie pluriculturelle, pluri religieuse et pluriethnique. Voilà un idéal à suivre en lieu et place d’un processus d’Oslo moribond et d’une attitude malsaine de rejet négationniste. La lettre tue, mais l’esprit donne vie, comme il est dit dans la Bible.
Nous devrions concentrer notre résistance sur le combat contre les colonies israéliennes, à partir de manifestations non violentes qui soient de nature à entraver la confiscation des terres, à créer des institutions civiles démocratiques et solides (hôpitaux, cliniques, écoles et universités, actuellement en terrible déclin, ainsi que d’autres projets d’amélioration de l’infrastructure) et à mettre en évidence le contenu d’apartheid inhérent au sionisme.
Compte tenu de l’impasse, il est beaucoup question, à l’heure actuelle, d’une imminente explosion. Or, quand bien même ces prévisions se vérifieraient, elles ne doivent pas nous faire oublier la construction de l’avenir, sachant que ni l’improvisation ni la violence ne sont de nature à garantir la création et la consolidation d’institutions démocratiques.
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Notes:
(1) Lire Edward W. Saïd, « La Palestine n’a pas disparu », Le Monde diplomatique, mai 1998. Toutes les notes de cet article sont de la rédaction du Monde diplomatique, ainsi que les surtitres, le titre et les intertitres.
(2) Ancien dirigeant de la Ligue des droits de l’homme, M. Israël Shahak a été l’un des intellectuels juifs israéliens les plus engagés dans la défense des droits des Palestiniens. Il a notamment écrit Jewish History, Jewish Religion. The Weight of Three Thousand Years, Pluto Press, Londres, 1994 (voir Le Monde diplomatique, août 1994).
(3) Professeur de philosophie à l’université de Bir Zeit, dirigeant de l’Alliance nationale démocratique, élu député à la Knesset le 29 mai 1996 sur une liste commune avec le Parti communiste israélien, M. Azmi Bishara est désormais l’une des figures marquantes du combat pour l’égalité des droits et l’autonomie des Arabes israéliens. Il s’est déclaré candidat au poste de premier ministre d’Israël.
(4) Al Hayat, Londres, 9 juin 1998.
(5) Lire Mohamed Sid-Ahmed, « Les intellectuels arabes et le dialogue », « Proche-Orient 1967-1997: la paix introuvable », in Manière de voir, n° 34, mai 1997.
(6) De tous les « nouveaux historiens » israéliens, M. Ilan Pappé passe pour le plus engagé, historiquement et politiquement – il est membre du Front démocratique pour la paix et l’égalité (Hadash). Lire Dominique Vidal, Le Péché originel d’Israël. L’expulsion des Palestiniens revisitée par les « nouveaux historiens » israéliens, Éditions de l’Atelier, Paris, 1998.
(7) Al Hayat, 5 novembre 1997.
(8) Adoptée le 13 juillet 1990, la loi dite loi Gayssot, du nom du dirigeant du Parti communiste français qui l’avait proposée, modifie la loi française sur la liberté de presse par l’adjonction d’un article 24 bis, qui rend passible de sanctions (emprisonnement d’un an et amende de 300 000 francs, augmentés de diverses peines annexes) quiconque conteste « l’existence d’un ou plusieurs crimes contre l’humanité tels qu’ils sont définis par l’article 6 du statut du Tribunal militaire international annexé à l’accord de Londres du 8 août 1945 et qui ont été commis soit par les membres d’une organisation déclarée criminelle en application de l’article 9 dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction française ou internationale ».
Des personnalités de grand prestige intellectuel et connues pour leur combat contre le négationnisme – comme le professeur Pierre Vidal-Naquet, auteur des Assassins de la mémoire (Le Seuil, Paris, 1995), et Madeleine Rebérioux, présidente d’honneur de la Ligue des droits de l’homme – se sont interrogées sur la pertinence d’une loi qui établit en quelque sorte une « vérité d’État » (lire Le Monde, 4 mai et 21 mai 1996).
Saisi par le négationniste Robert Faurisson, le Comité des droits de l’homme des Nations unies a toutefois considéré, en novembre 1996, que la loi Gayssot ne portait pas atteinte à la liberté d’expression.
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De la Tchétchénie à Israël
Dans le contexte actuel des guerres chaudes en cours depuis la fin de la guerre froide (que ce soit au Proche-Orient, en Tchétchénie ou ailleurs) il y a, si tant est qu’il s’agisse d’un jeu « maldonne» , jeu auquel s’adonnent tous ceux qui ne croient qu’à la force brute. Courte vue ! l’Histoire, pourtant pleine d’enseignements, nous rappelle entre autres leçons que les rapports de force sont par définition contingents.
En espérant nous tromper, nous écrivions et prédisions dans quelques lignes consacrées à la guerre en Tchétchénie au lendemain de la prise d’otages dans un théâtre moscovite par un commando tchétchène que « d’une part et d’autre, un degré sera franchi dans l’horreur ». Ce qui malheureusement eut lieu. En réponse à cet acte désespéré la Russie de Poutine a lancé une énième offensive dans cette république du Caucase. Exactions et exécutions sommaires sont opérées à grande échelle sur ordre et à « huis clos » tant par l’armée rouge que par la milice du tout dernier président tchétchène sponsorisé par Moscou, M. Ahmed Kadirov, lui aussi élu à « huis clos ».
D’après la presse internationale, les USA ont volontairement fermé les yeux sur le génocide en cours dans le Caucase parce que présenté par Poutine comme étant une lutte contre le « terrorisme ». Comment ? Tous les hommes en âge de combattre (plus de treize ans) sont exécutés. La terre brûlée et les femmes violées… Justement c’est elles qui montent au créneau la-bàs et ailleurs. Pharaon épargnait les femmes et tuait les fils d’Israël. Les russes les violent. Ce n’est donc pas un hasard si toutes les femmes figuraient dans ce fameux commando comme il n’est pas fortuit qu’une avocate palestinienne s’explose et tue sans discernement. Ce que Hitler n’a pas réussi contre le peuple juif, les gouvernements actuels d’Israël ne le réussiront par contre le peuple palestinien. Poutine n’aura pas plus de succès que Staline et ses prédécesseurs contre la chevaleresque résistance du peuple tchétchène qui a plus aujourd’hui qu’avant d’insondables profondeurs stratégiques ?
Contrairement à une idée reçue et paresseusement acceptée, ce n’est pas l’Amérique de Bush qui a inventé la politique de la « guerre préventive ». Les administrations US (Démocrates et Républicains) ont par contre conçu et plus ou moins efficacement appliqué « la containment policy ». Endiguer toute menace communisante sur la planète terre. La « guerre préventive » quant à elle a été conçue par les Romains (qui veut la paix prépare la guerre) et pratiquée depuis sa création par l’État sioniste : La destruction d’une centrale nucléaire à usage civil à Tamuz en 1979 en Irak (déjà) mais aussi Sabra et Chatila et les assassinats ciblés des résistants palestiniens en Tunisie (Sidi Bou Said, Carthage…), au Liban ou ailleurs.
Ce qui nous autorise à avancer au risque de déplaire, qu’Israël a « soufflé » à G.W.Bush et à son administration ce concept de « guerre préventive ». Nous n’affirmerons pas que Bush et son administration sont les otages d’un lobby sioniste mais le soutien inconditionnel, les veto US contre les résolutions des Nations Unis condamnant Israël, la constante générosité de l’oncle Sam (plusieurs milliards de dollars) a été et demeure suspect aux yeux du reste du monde.
Du coup, le seul gendarme du monde que sont aujourd’hui devenus les USA pour le moment, s’aliène la sympathie du monde Arabo-musulman dont l’écrasante majorité rejette en bloc cette violence aveugle commise en son nom par des groupuscules dont la prolifération et la détermination sont proportionnelles à la paranoïa et l’agressivité des « forces coalisées ». La poursuite par Israël de cette politique (attaque programmée depuis longtemps de la Syrie) de guerre préventive ainsi que son approbation diplomatique par Bush junior, n’augure rien de bon dans un proche avenir. Dans cette guéguerre, il n’est pas sûr que les détenteurs de bombes atomiques sortent vainqueurs. Combattre partout et tout le temps un invisible ennemi conduira inéluctablement les « coalisés » à la ruine financière !
Il y a pourtant de plus urgents et plus nobles combats à mener…
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