Réalité numéro 86 du mercredi 3 mars 2004 |
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Sommaire
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Directeur de Publication :
ALI MAHAMADE HOUMED Codirecteur : MAHDI IBRAHIM A. GOD Dépôt légal n° : 86 Tirage : 500 exemplaires Tél : 25.09.19 BP : 1488. Djibouti Site : www.ard-djibouti.org Email : realite_djibouti@yahoo.fr
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Éditorial
LA MAUVAISE BLAGUE DE LA BONNE GOUVERNANCE
L’office djiboutien du Tourisme a trouvé il y a quelques années, pour ses affiches publicitaires, un bien étrange slogan : « Djibouti, l’autre façon de vivre l’espace ». Etrange car l’espèce humaine n’a qu’une seule façon de vivre son espace : l’utilisation optimale des ressources disponibles, c’est-à-dire l’harmonie avec l’écosystème. Par contre, si le rapport à la nature tout court est somme toute banal, même au regard de la rudesse du climat, le décor dans lequel se meuvent les Djiboutiens, citadins comme ruraux justifierait amplement un détournement plus approprié : « Djibouti, l’autre façon de vivre la politique».
Ici, c’est le plus normalement du monde qu’un Ministre chargé de faire respecter le Statut de la Fonction Publique, désigne comme Directeur un (e) stagiaire (qui ne serait même pas recruté(e) officiellement), en violation de toutes les règles en vigueur et de toutes les hiérarchies établies. Ici aussi, tout le monde trouve normal (peut-être parce qu’il n’est pas dans nos valeurs islamiques de tirer sur une ambulance) qu’un ancien Premier ministre soit nommé en qualité d’Ambassadeur au Vatican (tolérance religieuse ?) avec longtemps résidence dans le palais de son ancienne fonction.
Par contre, il paraîtrait que les militaires acceptent de moins en moins facilement que les soldes varient en fonction de l’appartenance clanique puisque, en fin de compte, c’est la seule différence palpable entre AND et Garde Présidentielle ; à la parade près. Par contre, c’est sans crainte du ridicule qu’un ancien Ministre des Affaires Etrangères se retrouve du jour au lendemain Ambassadeur quelque part, obéissant aux directives d’une administration centrale hier à ses ordres, sans parler de l’actuel Premier ministre à l’époque obscur attaché d’ambassade. Tout cela, il parait que ce seraient les preuves indiscutables de la bonne gouvernance façon RPP. Sans rire !
Justement, en parlant de tout cela, d’ancien Ministre et d’actuel Ambassadeur, il paraîtrait que les parlementaires européens de passage ici auraient chaleureusement vanté les avancées de la bonne gouvernance à Djibouti. Même le journaliste à la posture obséquieuse, en charge d’une interview publicitaire parue lundi dernier dans La Nation, en est resté pantois. Extraits sans rire, parce que la réalité est grave : « Les performances djiboutiennes en matière économique, les réformes institutionnelles engagées ainsi que les efforts pour faire reculer la pauvreté sont aujourd’hui perçus par nos partenaires européens comme des signes de bonne gouvernance et de clairvoyance politique. C’est tout à l’honneur du président Ismael Omar Guelleh ». Un constat s’impose, car il est inutile d’insister sur l’aspect griot, de l’un et de l’autre : les notables d’Ali-Sabieh ont plus de bon sens que l’Ambassadeur de Djibouti auprès de l’Union Européenne. Certainement parce qu’ils sont plus proches que lui des réalités économiques et sociales du pays ; lesquelles ne sont guère réjouissantes.
Parler de la bonne gouvernance du régime RPP est donc la plus mauvaise blague que l’on puisse faire aux Djiboutiens : à qui profite ce crime ? Que cherche donc le régime en faisant croire à de pareilles insanités, puisque mauvaise gouvernance, corruption et gaspillage sont concrètement et quotidiennement observables ? Pour une fois, cette mystification est essentiellement à usage interne : dire que même la communauté internationale ne pourra pas tirer le Peuple djiboutien des griffes des prédateurs au pouvoir ! C’est tout.
C’est tout, car le fin mot de l’histoire se trouve également en page 2 de ce numéro de La Nation. Au journaliste lui demandant si Djibouti n’allait pas « figurer pendant encore longtemps parmi les autres éternels assistés que compte notre continent », l’ancien Ministre et actuel Ambassadeur a symptomatiquement répondu : « Pas du tout. Et venant de vous, cette question me surprend dans la mesure où, et en tant qu’homme de presse, vous avez la possibilité de suivre de près l’évolution de la situation économique de notre pays ».
Justement, c’est peut-être parce qu’il est journaliste suivant de près et patati patata, que cette question lui est spontanément venue à l’esprit. Mais, dans la « bonne » gouvernance version RPP, l’esprit n’est pas vraiment primordial, surtout s’il se veut libre et critique : le ventre suffit. Alors, bon apppêtit, Excellences.
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Brèves nationales
Fruits et légumes :
Vers la fin de la pénurie ?
Les consommateurs Djiboutiens ont été privés de fruits et légumes frais la semaine dernière, suite à un litige opposant les importateurs à l’administration fiscale qui exigeait le paiement de l’impôt sur les bénéfices pour l’exercice 2003. Conséquence de cette situation, les prix de ces denrées ont triplé et un début de pénurie s’est installé, provoquant l’ire des consommateurs.
Il est tout de même navrant de constater que plus d’un quart de siècle après notre Indépendance, notre pays reste encore totalement dépendant de l’étranger pour son approvisionnement en produits maraîchers. Afin de tendre un tout petit peu vers l’autosuffisance alimentaire qui ne semble pas pour demain, malgré tous les efforts du ranch présidentiel du Day, les cultivateurs nationaux devraient être encouragés par l’État pour augmenter leur production. Aux dernières nouvelles, la partie de bras de fer engagé entre l’État et les importateurs de fruits et légumes aurait pris fin après que ces derniers eurent accepté de s’acquitter de leurs impôts.
En principe, l’approvisionnement normal reprendra ce mercredi, au grand soulagement des consommateurs.
Séminaire des chambres de commerce régionales :
Curieuse absence du grand voisin
Selon le journal gouvernemental La Nation, qui rapporte l’événement, un séminaire regroupant les chambres de commerce et le secteur privé des pays membres de l’IGAD se tient depuis quelques jours à l’hôtel Sheraton de djibouti. Au vu de la liste des pays représentés, nous sommes surpris de constater l’absence de notre grand voisin et principal partenaire commercial, à savoir l’Éthiopie.
Pourtant, la chambre de commerce de Djibouti et la chambre nationale de commerce de l’Éthiopie entretiennent des relations suivies et fructueuses depuis de longues années. Que notre confrère ait manqué de relever et de commenter cette absence remarquée est en soi éloquent. Pour notre part, nous regrettons cette absence et cherchons à comprendre… surtout quand notre confrère écrit : « Notons que l’ensemble des représentants du secteur privé régional est représenté : la chambre nationale de commerce de l’Érythrée, la fédération des employés de l’Érythrée, la chambre nationale de commerce et d’industrie du Kenya, la chambre nationale de commerce et d’industrie ougandaise, la fondation du secteur privé ougandais, l’union soudanaise des chambres de commerce, la fédération soudanaise des affaires, le conseil des affaires somalien et les représentants du secteur privé djiboutien. ». Géographie à revoir!
As-Eyla-Yoboki :
Eau potable, un luxe?
Alors que le régime insouciant et fanfaron claironne que l’accès à l’eau potable et à l’assainissement demeure une priorité, il nous a paru opportun de rappeler la difficile condition des habitants d’As-Eyla et de Yoboki, deux localités du Sud-Ouest où l’eau potable servie est impropre à la consommation. Cela fait des années que la population d’As-Eyla se plaint régulièrement de la mauvaise qualité de l’eau courante consommée dans sa ville. Cette dernière provenant d’un forage creusé par l’administration coloniale est peu potable du fait de sa salinité et de sa forte teneur en sulfate. D’un goût âcre, elle serait également à l’origine des multiples maux de ventre dont souffre ceux qui la boivent, et ils sont malheureusement nombreux. Pourtant, un puits traditionnel possédant une eau aussi abondante que douce et d’excellente qualité, est situé à quelques centaines de mètres de la ville.
Qu’attendent donc les pouvoirs publics pour creuser un nouveau forage d’eau douce ou alors assainir l’eau provenant du forage existant ?
A Yoboki, le problème est le même, la population reste condamnée à consommer une eau aigre et dure, alors qu’une eau douce et en quantité suffisante est disponible à quelques kilomètres de là. Dans les deux cas, c’est l’insouciance de ce régime d’injustice qui prolonge le calvaire des habitants de ces régions abandonnées.
Nous lançons un cri d’alarme , car il en va de la santé des milliers de citoyens.
Démobilisation :
Les rappelés dans l’oubli
Les militaires rappelés en 1991 pour participer à la guerre contre le FRUD, puis rapidement démobilisés au bout de quelques années, sont aujourd’hui dans une situation dramatique : après les avoir utilisé comme chair à canon, le régime refuse de les indemniser. Pourtant, l’arrêté présidentiel n°97-0256/PR/DEF du 3 avril 1997 stipulait clairement que « les militaires rappelés totalisant plus de 12 ans et moins de 15 ans de service effectif pourront, s’ils le souhaitent, racheter les droits à pension part du salarié et part patronale afin de bénéficier des droits à pension des militaires retraités ayant accompli quinze ans de servie effectif en lieu et place du droit à pécule ». De même qu’il disposait d’autre part que « le Ministre de la Défense fixera par décision la liste des intéressés et la date d’ouverture du droit à pension de retraite ».
Ledit ministère de la Défense a donc dressé une liste de 48 bénéficiaires pouvant légitimement y postuler et transmis le dossier au ministère de l’Économie et des Finances. Puis, par un courrier en date du 31 mars 1998, le ministère des Finances a répondu au Directeur administratif et financier de l’Armée Nationale, qu’il était impossible d’honorer le mandat de 27.110.000 FD et celui de 6.708.000 FD pour les raisons suivantes :
1) l’exercice 1997 est clôturé ;
2) l’exercice 1998 ne peut imputer que les soldes des bénéficiaires de pécule. CQFD de la tautologie !
Cela fait donc maintenant sept ans que ces malheureux militaires démobilisés attendent d’être payés et réclament constamment leur droit légitime. Voilà de quelle façon les arrivistes du RPP traitent ceux qui ont risqué leur vie pour défendre ce régime d’injustice. Si un serpent te mord deux fois au même endroit, c’est de ta faute, dit le proverbe. Il n’est jamais trop tard pour se rendre compte de l’évidence : c’est ce régime qui doit disparaître !
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Droit de réponse du ministère de l’Éducation nationale
En réponse à notre article relatif à une circulaire ministérielle demandant aux chefs d’établissement scolaire de dorénavant exiger une facture de l’EDD et de l’ONED pour toute première inscription, le ministère de l’Éducation Nationale nous a fait parvenir le droit de réponse ci-dessous.
Le journal « Réalité » dans son édition du 18 février 2004, et dans un article titré : « Éducation Nationale : Coulée ou Électrocutée ? », commentait la Circulaire Ministérielle n° 1014/MENESUP du 21 Décembre 2003 portant sur les conditions d’inscriptions en 1ère année de l’Enseignement de Base.
Nous saluons tout d’abord le ton responsable et le professionnalisme de cet article qui, hors mis le titre un peu excessif, soulève des questions que peut légitimement susciter cette circulaire et qui méritent des éclaircissements que nous apportons dans ce droit de réponse.
Nous profitons également de cet article pour lancer un débat public sur la Carte Scolaire que cette circulaire vise à faire respecter. Nous ouvrons aussi à vos lecteurs les colonnes de Educ-Info, lettre bimensuelle du Ministère de l’Éducation Nationale et de l’Enseignement Supérieure.
Mais tout d’abord quelques précisions nous paraissent nécessaires :
1- Cette circulaire est destinée aux directeurs d’écoles et non au grand public. Elle fait partie d’un ensemble de réglementation et de pratiques connues par les destinataires et pas forcement par tous les parents d’élèves.
2- Elle est destinée uniquement aux écoles de Djibouti Ville et des chefs-lieux de district car les directeurs des écoles rurales et des zones périphériques de Djibouti ont reçus d’autres consignes et directives de la part des inspecteurs chefs, de circonscription.
3- Cette circulaire vise plus particulièrement quelques écoles primaires qui jouissent d’une bonne réputation, plus ou moins justifiée, et qui sont donc très demandées.
Actuellement les élèves de ces écoles proviennent de toute la ville de Djibouti depuis Balbaba jusqu’au Héron. Et ce recrutement particulier, en dehors des quartiers environnants, présente des inconvénients que nous nous efforçons de réduire par cette circulaire et qui sont détaillés ci dessous.
Revenons maintenant à la Carte Scolaire : les écoles sont implantées dans la ville de Djibouti et dans tout le pays de telle sorte qu’elles puissent être les plus proches possible des lieux d’habitations.
La Proximité de l’école réduit les distances à parcourir par les enfants ainsi que les frais de transport qui constituent, pour certains, des obstacles à la scolarisation. L’idéal serait donc qu’en zone urbaine chaque enfant puisse se rendre à pieds à son école de quartier et que les parents puissent également avoir des contacts fréquents avec les enseignants et le directeur d’école non seulement pour suivre la scolarité de leurs enfants mais aussi pour participer, dans la mesure de leurs moyens, à la gestion et à l’entretien de leur école.
Le Service de l’Enseignement de Base a donc déterminé, pour chaque école, une zone géographique de recrutement. C’est ce que nous appelons la Carte Scolaire et que nous nous efforçons de respecter et de faire respecter par les parents lors des inscriptions des élèves de première année et lors des mutations des enfants d’une école à l’autre suite à un déménagement de la famille par exemple.
Dans la pratique ce sont les parents des couches les plus favorisées de la population qui refusent d’appliquer la Carte Scolaire en prétextant qu’ils veulent inscrire leurs enfants dans les meilleures écoles et qu’ils ont les moyens de prendre en charge les frais de transport de leurs enfants. Pourtant ils sont les premiers à s’opposer à tous les remaniements des horaires d’enseignement dès que ces horaires entraînent davantage de mouvements de va et vient entre l’école et le domicile.
Ainsi, lorsque nous avons voulu pour des raisons pédagogiques uniformiser les horaires des classes touchées par la réforme, pour que les équipes d’enseignants puissent dialoguer ou être regroupées pour les séances de formation, nous avons eu des difficultés à convaincre les parents qui ne pouvaient plus regrouper leurs enfants de différents niveaux sur les mêmes plages horaires.
Nous avons aussi tenté de modifier les horaires et revenir, chaque fois que c’est possible à un plein temps où les enfants auraient des horaires plus équilibrés et pédagogiquement plus favorables aux apprentissages. La majorité des parents et surtout ceux dont l’école est éloignée du domicile, ont refusé l’idée de transporter leurs enfants matin et après-midi.
Pourtant lors du débat des États Généraux de l’Éducation, les horaires qui obligent les enfants à se rendre à l’école à 13h30 ont été jugés, à raison, anti-pédagogiques.
Aujourd’hui, avec l’effort sans précédent qui a été fait par le Gouvernement, ces trois dernières années, pour la construction de nouvelles écoles, l’agrandissement des écoles existantes et la réhabilitation de la plupart des salles de classes, nous sommes en mesure de supprimer la double vacation des locaux ( l’utilisation d’une salle de classe par deux groupes d’élèves) dans plusieurs écoles de la Capitale et des chefs lieux de Districts, mais la plupart des parents intéressés ne sont pas disposés à revenir aux horaires de plein temps à cause de l’éloignement du domicile par rapport à l’école.
Telles sont les raisons qui nous ont obligés à adopter les mesures coercitives pour exiger des parents la justification de leurs lieux d’habitation. La circulaire qui paraît viser tous les parents d’élèves n’est peut-être pas assez explicite et peut apparaître comme un frein à la scolarisation des plus défavorisés.
Mais ce n’est pas le cas car dans la pratique ces mesures coercitives de Carte Scolaire ne concernent ni les écoles rurales ni les écoles de Balbala puisqu’en général, ces écoles sont fréquentées par les élèves pour lesquels elles étaient destinées.
Nous regrettons que le journaliste de « Réalité » auteur de l’article , avant de spéculer sur les conséquences possibles de l’application de cette circulaire n’ait pas eu l’honnêteté intellectuelle de se renseigner sur l’effort colossal en matière de scolarisation qui a été fait depuis la rentrée scolaire 2000 qui a suivi la tenue des États Généraux de l’Éducation de décembre 1999.
Rien que dans l’Enseignement Primaire avec la construction de 252 salles de classes nouvelles ( dont 62 à Balbala, 38 dans les anciens quartiers de Djibouti et 152 en dehors de Djibouti ville) nous avons augmenté notre capacité d’accueil de plus 44% en trois ans alors que plus d’une centaine de salles de classes existantes ont été rénovées.
Plus d’une centaine d’autres salles de classes seront construites dans les deux ans qui suivent.
Les locaux du CFPEN ont été agrandis de 10 nouvelles salles pour lui donner les moyens de former les enseignants nécessaires pour faire face à cet effort de scolarisation et sa capacité a été portée de 50 élèves-maîtres par an à plus de 200 par an. Ce qui nous a permis, non seulement d’accueillir depuis deux ans tous les enfants djiboutiens de six ans qui ont demandé une inscription, mais aussi d’arrêter depuis la rentrée 2003 le recrutement des instituteurs contractuels sans formation initiale.
Le journaliste de « Réalité » aurait pu enquêter sur le terrain et interroger les directeurs d’écoles et les inspecteurs sur les conditions d’inscription des enfants de six ans.
Ø Il aurait su tous les efforts qu’ils font pour accueillir le maximum d’enfants dans les classes de première année.
Ø Il aurait su qu’il n’y a plus de date limite pour l’inscription des nouveaux élèves et qu’ils ont reçus des instructions pour inscrire les élèves jusqu’au jour de la rentrée et même au delà lorsque des places sont disponibles.
Ø Il aurait su que même lorsqu’une école a rempli ses classes de première année les directeurs doivent continuer à recevoir les dossiers d’inscription pour les transmettre à l’inspection qui est chargée de proposer des places dans les écoles les plus proches qui ont encore des places.
Ø Il aurait su qu’à Djibouti ville les directeurs d’écoles acceptent les élèves qui ne présentent qu’une seule carte d’identité des parents au lieu des deux.
Ø Il aurait su que dans les écoles rurales les directeurs attendent plusieurs années pour que les parents puissent compléter le dossier et que les enfants sont acceptés même s’ils n’ont pas d’acte de naissance et même s’ils ont dépassés largement l’âge légal d’inscription.
Ø Il aurait su que les nouvelles inscriptions ne cessent d’augmenter depuis l’an 2000 et qu’elles sont passées de 5900 en 1999 à plus de 7000 en 2003.
Ces deux dernières années, même à Djibouti Ville, les places disponibles en première année dépassent les demandes d’inscriptions à tel point que nous sommes obligés d’organiser des campagnes à la Radio et à la Télévision pour inciter les parents à inscrire leurs enfants. Bien sur, ici et là, certaines écoles très demandées font le plein des inscriptions en quelques jours mais des places restent disponibles pour tous les enfants djiboutiens et souvent dans une école proche de leur domicile.
Alors, il ne faut pas que l’arbre nous cache la forêt, la voix de quelques parents privilégiés qui veulent inscrire leurs enfants à l’école de leur choix ne doit ni masquer la réalité ni servir de prisme déformant pour attaquer la politique gouvernementale qui vise l’accès de tous à une éducation de qualité dans toutes les écoles, quels que soient leurs lieux d’implantation.
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COMMENTAIRES
Il n’est pas dans notre intention de polémiquer avec des professionnels qui ont en charge l’avenir de nos enfants : enseigner étant une vocation, il est difficile et malhonnête d’insinuer qu’ils font mal leur travail. Tout juste vous rappellerons-nous que la circulaire concernait tous les chefs d’établissement sans exception. « Il aurait su » beaucoup de choses, mais ce que nous ne comprenons pas, c’est par quelle aberration politico-administrative une circulaire dont l’application comporte autant de dérogations a-t-elle pu être conçue et signée?
De nouvelles écoles ? Tant mieux ! Nous ne demandons que cela : quand on voit le régime abandonner à la générosité des militaires français et américains la remise en état de celles qui existent, il y a de quoi s’inquiéter. Enfin, une seule question, directement adressée à votre ministre : existe-il une seule directive invitant les chefs d’établissement scolaire à prévoir des dérogations d’âge pour tous les enfants dont la scolarité a été retardée du fait du conflit ? A notre connaissance, il n’y en a pas : ce sont ainsi des milliers d’enfants que le régime exclut du système scolaire.
Nous aurons peut-être l’occasion de discuter plus amplement de cet aspect en particulier et de la situation de l’Éducation Nationale en général, puisque vous nous invitez à un débat public. Comme vous, nous sommes persuadés que si les recommandations des États Généraux de l’Éducation Nationale avaient trouvé un début d’application concrète, beaucoup de choses iraient mieux pour nos enfants.
Mais ceci est politique.
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Djibouti vu de Washington
Le rapport du Bureau Américain pour la Démocratie et les Droits de l’Homme
Alors que le régime dépense et se dépense sans compter pour redorer son blason définitivement terni, surtout depuis les fraudes électorales massives du 10 janvier 2003, les décideurs et bailleurs de fonds internationaux s’abreuvent à une eau plus claire et plus digeste. Comme, par exemple les rapports annuels d’organisations indépendantes surveillant la situation des droits de l’homme dans certaines » démocraties » avides d’aides financières et avares en espaces de liberté. Voici pour l’année 2003, le rapport sur la situation des droits de l’homme à Djibouti, établi par le Bureau Américain pour la Démocratie, les Droits de l’Homme et des Travailleurs.
Djibouti est une république avec un régime présidentiel fort et un législatif faible. En 1999, le pays a élu son deuxième président depuis son Indépendance proclamée en 1977. Ismael Omar Guelleh le candidat du parti au pouvoir, le Rassemblement Populaire pour le Progrès (RPP) qui dirige le pays depuis l’Indépendance, a remporté les élections avec 74% des suffrages exprimés. Aux législatives de 2003, la coalition du parti au pouvoir a raflé les 65 sièges malgré les protestations de l’opposition au sujet des fraudes massives. La Justice n’est pas indépendante de l’Exécutif.
Les forces de sécurité comprennent la force nationale de police placé sous l’autorité de ministre de l’Intérieur, la Gendarmerie Nationale et l’Armée relevant du ministre de la Défense, ainsi qu’une Garde Républicaine, unité d’élite rattachée à la Présidence. Un bureau de renseignements dirigé par le directeur de la sécurité nationale rend compte directement au Président. Les autorités civiles maintiennent un contrôle effectif sur les forces de sécurité. Les forces de sécurité se sont rendues coupables de graves atteintes aux droits de l’homme.
L’économie mixte du pays a peu d’industries et quelques ressources naturelles. La population est estimée à 600.000 âmes. En dehors de la Capitale, l’activité économique primaire se résume à l’élevage nomade. La part du produit intérieur brut annuel non généré par la communauté étrangère ne s’élève pas à plus de 250$ par habitant. Une grande part des richesses nationales est concentrée entre les mains d’une petite élite. Les progrès gouvernementaux en matière des droits de l’homme restent limités et le pouvoir continue à commettre des violations dans ce domaine. Le pouvoir entrave les droits des citoyens à l’alternance.
Des rapports sérieux font état de mauvais traitements infligés aux prisonniers. Les conditions carcérales demeurent difficiles. Le gouvernement continue à emprisonner arbitrairement. Les détentions prolongées non signalées demeurent un problème préoccupant.
Le gouvernement enfreint les lois sur les droits des citoyens. Le gouvernement restreint la liberté de la presse. Le gouvernement entrave la liberté de réunion et use de la force pour réprimer les manifestations et les grèves en restreignant la liberté d’association. La violence et les discriminations à l’égard des femmes persistent et, bien que le gouvernement ait condamné ces pratiques, les mutilations génitales continuent à être générales. La discrimination sur des bases ethniques, tribales et claniques se poursuit. Le gouvernement entrave les activités syndicales, persécute et intimide les dirigeants syndicaux. Le travail des enfants continue d’exister.
I. RESPECT DES DROITS DE L’HOMME
Section 1. Respect de l’intégrité de la personne, y compris la protection contre :
a. Exécutions arbitraires ou extrajudiciaires
il n’y a pas d’antécédent de crime politique. Cependant, le 16 septembre 2003, les forces de sécurité ont abattu un étranger en situation irrégulière qui tentait d’échapper à une rafle routinière. Il est fait état d’autres décès d’étrangers en situation irrégulière, dans le cadre des reconduites massives aux frontières.
Aucune sanction n’a été prise contre un membre de la Garde Présidentielle qui a abattu un manifestant pacifique et handicapé en avril 2002. Aucune sanction disciplinaire n’a non plus été prise contre les exactions sommaires par la police de MM. Mohamed Assa Ali et Assari Mohamed Moussa et par les militaires, cette fois-ci d’un réfugié du camp de Hol-Hol.
b. Disparition
Il n’est pas fait état de disparition pour des motifs politiques ou autres.
c. Tortures et autres traitements inhumains et dégradants
la Constitution interdit formellement ces pratiques. Pourtant, des rapports officieux et crédibles font état de sévices physiques sur les prisonniers et détenus en garde à vue.
Exceptées les années précédentes, il n’est pas fait état de viol de prisonnières.
Par contre, la Police a gravement battu des manifestants en dispersant des manifestations durant l’année écoulée.
Les conditions de détention sont pénibles et la population carcérale constitue un sérieux problème. Pour la réduire, le Gouvernement a procédé à la réduction des peines : 200 prisonniers de droit commun, dont 13 détenus depuis 2000 pour leur rôle dans un coup d’État déjoué, ont été relaxés par décret présidentiel en juin à l’occasion de la fête de l’Indépendance. L’expulsion des étrangers a également réduit le nombre des prisonniers.
Les condition des prisonniers au centre de détention de Nagad, où étaient entassés des étrangers avant leur reconduite aux frontières, sont déplorables, ainsi que l’état de santé de ces derniers.
Certains étrangers n’étaient pas nourris plusieurs jours avant leur expulsion. Il est fait état d’un nombre important de prisonniers n’ayant pas reçu de soins médicaux contre des maladies pourtant curables ou pour des blessures infligées lors de leur arrestation ; l’infirmerie de la prison ne dispose pas du personnel et des médicaments suffisants.
Il n’y a pas de possibilité de rééducation ou de formation dans la prison.
Les femmes et les hommes sont détenus dans des cellules séparées. Aucun rapport ne fait état de viol des détenues par les gardiens.
Daher Ahmed Farah, directeur de publication du Renouveau et Président d’un parti d’opposition, le MRD, a été détenu dans une cellule isolée réservée aux « dangereux criminels » pendant plus de 3 mois entre avril et août. Seule sa mère était autorisée à lui rendre visite et lui apporter le repas quotidien.
Aucune suite n’a été donnée à la mort en prison de l’ancien chef d’état-major Yacin Yabeh Galab.
Le CICR a délégué depuis le Kenya une mission qui a effectué une visite de la prison principale. Le Président de la LDDH a été autorisé à rendre visite aux détenus de la prison de Gabode durant l’année. Néanmoins, la LDDH n’a pas reçu la permission de rendre visite à Daher Ahmed Farah.
d. Arrestations arbitraires-Détentions-Exil
la loi interdit les arrestations et détentions arbitraires, mais le Gouvernement n’a pas respecté ces interdictions. La loi stipule que le gouvernement ne peut détenir une personne au-delà de 48h (garde à vue) sans mandat d’arrêt (et chef d’inculpation) dûment délivré par le juge. Les inculpés peuvent être détenus 24h de plus avec l’accord préalable du procureur de la République.
Toutes personnes, y compris celles accusées d’atteinte à la sécurité de l’État, doivent être jugées dans les 8 mois suivant leur arrestation. Cependant, la police transgresse ces procédures et les arrestations et détentions arbitraires sont fréquentes. Le Gouvernement n’a pris aucune mesure contre ceux qui violent les droits de l’homme et l’impunité officielle constitue un grave problème.
La police dépend du ministre de l’Intérieur. La corruption parmi les responsables est courantes, de même que chez les subalternes. Il y avait en décembre à peu près 3000 cadres et employés de l’État. Le gouvernement en a écarté 400 dans le cadre d’une politique de réduction de la bureaucratie et de la masse salariale.
La loi interdit l’exil forcé ; pourtant, par le passé, des prisonniers relaxés ont été poussés à l’exil, notamment en France.
e. Dénis de procès publics
la Constitution garantit l’Indépendance de la Justice. Mais, dans la pratique, la Justice n’est pas indépendante du pouvoir exécutif, même dans les procès non politiques. Le ministre de la Justice est officiellement chargé des droits de l’homme.
Basée sur le Code Napoléon, l’instance judiciaire est composée d’un Tribunal de 1ère Instance, d’une Cour d’Appel et d’une Cour de Cassation. Les magistrats sont officiellement inamovibles.
Le Conseil Constitutionnel veille à la constitutionnalité des lois, y compris les lois relatives à la protection de la personne humaine et des libertés publiques. Mais, ses décisions n’ont pas toujours garanti ces droits.
Le système juridique repose sur le Droit français hérité de la colonisation, la Sharia et le droit traditionnel.
Le crime en milieu urbain était jugé par les cours normales avec les lois et pratiques juridiques inspirées de la France. Les litiges civils sont quant à eux réglés soit par les tribunaux ordinaires, soit par les instances traditionnelles. La Charia est strictement réservée aux affaires relevant du civil ou de la famille.
Les normes traditionnelles étaient souvent utilisées pour la résolution des conflits et le dédommagement des victimes. Par exemple, les lois traditionnelles stipulent souvent que le prix du sang soit versé au clan de la victime pour réparation du crime ou du viol.
La Constitution stipule que l’accusé doit prouver son innocence et doit bénéficier d’un conseil juridique. De même qu’il doit être examiné par un médecin s’il est emprisonné.
Les débats sont en principe publics, excepté pour les cas relevant des délits politiquement sensibles, nécessitant des mesures de sécurité interdisant la présence du public. Le conseil juridique est considéré comme indispensable dans les affaires criminelles et civiles. …
A la mi-janvier, l’opposition coalisée au sein de l’UAD avait porté plainte devant le Conseil du Contentieux administratif, sous la direction de la Cour d’Appel, contre les abus du parti au pouvoir lors des élections législatives du 10 janvier 2003. Au bout d’un an, la requête n’avait toujours pas abouti, apparemment du fait que ce Conseil du Contentieux Administratif n’a pas siégé depuis 1996.
Le 17 juin de la même année, Daher Ahmed Farah a été condamné à trois mois de prison ferme et son journal frappé d’interdiction de parution durant trois autres mois. On lui réclamait aussi 65.000 $ de dommages et intérêts. La LDDH a dénoncé sa détention, la considérant comme purement politique. Farah a été relâché le 5 août.
f. Ingérence arbitraire dans la vie privée, la famille, le foyer et la correspondance
La Constitution interdit de tels actes ; toutefois, le Gouvernement n’a pas respecté ses interdictions dans la pratique. La loi exige des autorités l’obtention d’un mandat avant toute perquisition dans une propriété privée ; or, dans la pratique, le gouvernement n’obtient pas toujours ces garanties avant d’engager de telles perquisitions et lui est souvent arrivé de s’ingérer dans les communications de certains opposants.
Le 22 avril 2003, les forces de sécurité ont fait irruption au domicile de Daher Ahmed Farah ainsi que dans les locaux du Mouvement pour le Renouveau Démocratique (MRD) et ont confisqué machines à écrire, photocopieurs et documents sans aucune autorisation légale. Tous ces matériels ont été restitués par la suite.
A suivre.
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L’habit ne fait pas le moine
Des Chefs d’État incorrigibles, mais pas incorruptibles
Pourtant, on lui aurait confié le bon Dieu sans confession : contrairement à certains Hadj et autres professionnels de l’Islam, ce n’est pas tous les jours qu’un homme d’Église se trouve propulsé sur le devant de la scène politique en présidant aux destinées de toute une Nation. La trajectoire exemplaire de l’illustre exilé de Bangui est révélatrice d’une certaine classe politique qui trouve toujours le moyen de décevoir. C’est à se demander si la cupidité des dirigeants illégitimes n’est pas proportionnelle à la misère des populations qu’ils oppriment et pillent.
La chute du Père Jean-Bertrand Aristide a été aussi brutale que son arrivée au pouvoir avait soulevé d’immense espoirs pour un peuple haïtien tristement célèbre pour ses tontons macoutes et autres Bébé Doc. Sa démission, survenue dimanche dernier au terme de tractations qui, en d’autres circonstances, auraient prêté à rire, est exemplaire pour au moins deux raisons.
La première, c’est que les normes de la légalité internationale n’ont pas pesé bien lourd face à la détermination des insurgés. Les multiples manifestations, très souvent violentes, ont eu valeur de sanction référendaire.
A tel point que la communauté internationale avait, à juste titre estimé utile et préférable pour l’avenir du pays que son Président pourtant démocratiquement élu abandonne son mandat avant terme, démissionne et s’exile. C’est que ce malheureux pays sans armée nationale était pratiquement sous mandat onusien. La sagesse a donc prévalu : pourquoi feindre respecter une souveraineté qui n’existe que sur le papier ?
Tout logiquement et à l’unisson, la France et les États-unis ont donc invité le Père Aristide à plier bagages. Gentiment d’abord : il était inutile de lui faire perdre la face en direct devant des millions de téléspectateurs affligés par le dramatique destin de la première République « noire » de l’Histoire.
Outré d’être ainsi sommé de se rendre à l’évidence de son impopularité, le bon Père résista un temps, vaillamment, jusqu’à la veille de son exil exactement : urbi et orbi, il hurlait sa détermination à terminer son mandat présidentiel. Il est vrai qu’il n’avait pas été élu au terme de fraudes massives comme certains de ses collègues, mais légalité n’est pas forcément synonyme de légitimité.
Sa légitimité, il semblait en fait la placer dans sa petite milice privée, selon toute vraisemblance armée par lui.
Car, second enseignement de cette histoire, c’est que le bon bougre s’intéressait aussi aux nourritures terrestres. Et le rôle essentiel joué par des émissaires de la CIA dans son exil n’est absolument pas dû au hasard. Et, sans ironiser outre mesure devant cette déchéance, on peut dire que l’habit ne fait pas le moine : l’homme d’Église dans lequel le petit peuple plaçait tant d’espoirs pour moraliser la vie politique et redresser l’économie s’est révélé être l’un des plus grand narcotrafiquant des Caraïbes ! Comme quoi il a compris, à l’instar de beaucoup de Chefs d’Etat peu démocratiques dont sont encore encombrés le Tiers-Monde en général et l’Afrique en particulier, que l’argent permet de consolider un pouvoir personnel.
Qui l’eût crû ? C’est à désespérer de la nature humaine : un saint homme, praticien à sa façon d’une théologie de la révolution réconciliant vie terrestre et promesse d’éternité, de s’adonner au plus vil des trafics qui soit !
Mais il y avait pire, apprend-on et, comme on ne tire pas au canon sur une mouche, les États-unis n’ont aucune raison d’intoxiquer qui que ce soit dans cette affaire : le bon Père Aristide aurait même poussé la cupidité jusqu’à vendre des passeports haïtiens à quelques compagnons de Ben Laden ! Arrêtons les points d’exclamation, rien ne doit plus nous étonner de la part des Chefs d’État. Que le dirigeant de l’État le plus pauvre du monde se soit acoquiné avec le terrorisme le plus barbare uniquement pour une question d’argent est tout simplement stupéfiant. Inutile de dire que, comme les considérables sommes que lui procurait le trafic de stupéfiants, rien n’en transparaissait dans les Finances Publiques et le Budget de l’État.
Mais, ne manquera pas alors de relever le vigilant, les sommes astronomiques engrangées par l’Etat djiboutien dans la lutte contre ce terrorisme n’apparaissent pas entièrement non plus dans les lignes du Budget. La seule incidence de cette croisade, ce sont les centaines d’emplois créés par la base américaine, et les salles et écoles rénovées par ces forces armées. Mais cela relève du don.
Ironique, l’Histoire a déjà rendu son verdict : les milices d’Aristide s’appelaient « les Chimères » : comme celle qui consiste à prétendre trouver une morale chez certains dirigeants politiques voulant régner à coups de forces paramilitaires ?
Réhabilitation : Obock, ô désespoir
Obock était la première Capitale et, bien avant la création de la ville de Djibouti, le premier port du pays. Elle a perdu ce statut suite à la violente contestation qui a opposé les autorités traditionnelles de l’époque et d’aujourd’hui à la puissance coloniale. Autres temps, autres méthodes, mais même en 2004, elle est injustement tenue en marge du développement. Malédiction, comme se complaisent à le croire en se lamentant certains de ses habitants ? Peut-être ! Toutefois, nous ne le pensons pas et ce n’est d’ailleurs pas l’avis de la majorité de ses habitants, qui disent leur détermination à désormais prendre leur destin en mains. Treize ans après sa destruction par les forces gouvernementales et à un an de la prochaine présidentielle, la ville d’Obock vi à l’heure de la réhabilitation version RPP. Radioscopie d’une mystification.
Près de 120 ans après sa création, 27 ans après l’Indépendance et 4 ans après l’Accord-cadre de Réforme et de Concorde Civile signé à Paris le 7 février 2000, Obock est aujourd’hui l’objet d’une attention trop tardive pour être désintéressée. Même tardive et électoraliste, cette attention eût-elle été bien accueillie par les Obockois, si elle n’était à ce point humiliante.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, une très brève description s’impose car, de la géographie, un chancelier allemand disait que c’est une constante invariable de l’Histoire.
Ses potentialités de développement économiques ont déjà fait l’objet d’un article de notre part et nous ne reviendrons pas sur ce sujet ici.
Par souci de bien informer, nous tenons à faire quelques mises au point au sujet de la Réhabilitation et nuancer le tam-tam médiatique en cours et à venir.
Apprenons d’abord à nos lecteurs que la signature de l’Accord de Paix Définitive du 12 mai 2001 a été précipitée à la demande du Chef de l’Etat qui a affirmé vouloir soumettre le programme de Réhabilitation et de Reconstruction aux bailleurs de fonds à Bruxelles (mi-mai 2001) avant de convoquer une conférence des donateurs.
Il n’y a aucune commune mesure entre le projet gouvernemental médiatisé à outrance à des fins électoralistes, et le document établi par la commission conjointe gouvernement-FRUD-armé désignée à cet effet en 2000, qui a planché sur le dossier une année durant. Voici pour le district d’Obock un tableau exhaustif des habitations détruites lors du conflit civil :
Localité Dur Planches |
Dur |
Planches |
Obock-ville Khor-Angar Waddi Médého Moulhoulé |
239 0 2 6 0 |
595 67 0 0 24 |
Total |
247 |
686 |
Le coût de cette Réhabilitation a été conjointement estimé à près de 585 millions de francs DJ, en prenant à l’époque en moyenne 500.000 FD pour une maison en planche et 1.000.000 FD pour une maison en dur. Et ce uniquement dans la ville d’Obock. Or, selon nos informations, ce sont seulement 240 logements que le gouvernement projette de construire à Obock. La société civile obockoise n’ayant pas été consultée, contrairement à ce qui est prétendu, ceux qui devaient normalement bénéficier de ces logements et qui sont actuellement installés dans la précarité, seraient lésés par une liste établie sur des critères partisans.
Ces 240 logements seraient tous composés de F1 de 12 mètres carrés avec une petite cour, une cuisine, des toilettes, une porte et une fenêtre. Ni plus, ni moins ! ce projet baptisé « projet d’urgence préparant un processus de développement durable de la ville d’Obock » coûtera 400 millions FD, enveloppe contrôlée par le PNUD. Si le F1 revient à un million FD, à quoi seront alors affectés les 160 millions FD restants, quand on sait que la main-d’œuvre reste à la charge du futur propriétaire ? Pour l’heure, seuls quelque 14 logements style cage à poules ont été construits sur le front de mer. Ces logements appartiennent pour l’essentiel à des Obockois ne résidant plus dans leur ville et donc absolument pas prioritaires; alors que des dizaines de familles normalement bénéficiaires vivant dans l’insalubrité, continuent d’attendre la reconstruction de leur maison.
Sur les 240 logements que le programme officiel prétend reconstruire, 110 le seront, paraît-il, dans l’ancienne ville délabrée et 130 autres sur le plateau. En outre, les critères d’attribution restent totalement injustes et partisans. en effet, ils sont nombreux, ceux dont les logements ont été totalement détruits ne figurent pas sur la liste des bénéficiaires arbitrairement et unilatéralement arrêtée par l’administration.
Par contre, on y trouve les ex-propriétaires d’habitations de fortune qui n’ont pas perdu leur logement du fait de la guerre. Cette réhabilitation électoraliste, partielle et partiale est donc loin de satisfaire les habitants d’Obock. Pire, elle a créé une atmosphère de suspicion et de frustration qui ne peut nullement panser les plaies ouvertes par la guerre civile.
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