Réalité numéro 94 du mercredi 28 avril 2004 |
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Sommaire
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Directeur de Publication :
ALI MAHAMADE HOUMED Codirecteur : MAHDI IBRAHIM A. GOD Dépôt légal n° : 94 Tirage : 500 exemplaires Tél : 25.09.19 BP : 1488. Djibouti Site : www.ard-djibouti.org Email : realite_djibouti@yahoo.fr
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Éditorial
QUAND LE CHEF INSULTE :
LE CRACHAT ET LA POMME DE NEWTON
Arafat terroriste ! Dini opportuniste ! Par-delà les latitudes, les religions et les idéologies, il y a une invariance fondamentale dans la façon dont les régimes violeurs d’accords de paix cherchent à discréditer l’autre partie signataire. Ainsi, c’est avec un réel écœurement que les lecteurs du journal gouvernemental « La Nation» ont pu lire jeudi dernier un éditorial anonyme s’en prenant d’une manière très insultante à M. Dini. Ce n’est pas nouveau. L’excès des propos n’échappant à personne, il faut en rechercher l’origine ailleurs que dans l’imagination débridée d’un journaliste. La presse publique étant ce qu’elle est à Djibouti, et la même plume trempée dans le vitriol partisan se retrouvant dans l’organe de presse du parti présidentiel, c’est le Chef de l’Etat et lui seul qu’il convient de rendre responsable de propos outranciers dont la principale contribution est d’encanailler une vie politique djiboutienne déjà bien mal en point.
En effet, l’impunité dont nous savons que ces invectives bénéficieront n’en démontre que plus l’implication du sommet de l’Etat, se trouvant de surcroît être président du conseil supérieur de la magistrature. Mettre fin à ce régime, c’est plus que jamais notre objectif, puisqu’il œuvre aussi ouvertement contre les intérêts d’une Nation Djiboutienne éprise de paix et n’aspirant qu’à la réconciliation, au développement et à la démocratie. Donc, insulter est devenu une pratique courante pour ce régime : tous ses opposants ont, un jour ou l’autre, eu droit à ce traitement de choc : Ismael Guedi, le Général Meidal, Daher Ahmed Farah, etc… Pourquoi ?
Il y a tout d’abord une certaine prédisposition personnelle à insulter l’adversaire, que l’on retrouve chez tous ceux qui n’ont pas la stature suffisante pour n’exister que par leurs réalisations. Celui dont la trajectoire n’est pas assez glorieuse est fatalement enclin à déprécier celle de son rival : insulter un des pères de l’Indépendance djiboutienne s’impose à celui qui n’a jamais contribué à cette lutte d’émancipation, n’en déplaise aux biographes officiels qui s’étalent en vain dans un coûteux et pompeux agenda présidentiel.
En second lieu, répondre par l’impolitesse à des arguments sérieux est une manière de justement ôter tout sérieux aux propos de l’adversaire ou, à tout le moins, de montrer que son sérieux ne saurait en aucune façon être pris au sérieux par celui qui a le monopole de dire n’importe quoi dans les médias officiels. Enfin, et plus gravement, autoriser sa presse à proférer des insultes contre tous les opposants, c’est la preuve la plus atroce qu’il n’y a aucune démocratie à Djibouti : aucun journaliste n’oserait diffamer s’il n’était pas certain d’être protégé par le commanditaire de ses écrits. Autant il peut revendiquer la bêtise d’une argumentation spécieuse, autant il lui faut un solide bouclier pour sa production d’invectives partisanes.
Comme la corruption est généralisée parce qu’elle est impunie en haut lieu, le régime demande à ses plumes de diffamer parce qu’il leur garantit l’impunité. Que le plus haut responsable de l’Etat rabaisse sa presse officielle à de telles extrémités montre, autant que sa propre vulnérabilité à la critique sérieuse, le peu d’ambition qu’il nourrit pour la démocratie djiboutienne dont l’épanouissement, avec l’élévation de la conscience politique que cela implique, ne peut que sonner le glas de son régime basé sur le blabla, la concussion et les apparences factices.
Mais nul ne s’y trompe, et la dernière campagne électorale l’a pourtant amplement démontré : il est suicidaire pour le Chef de l’Etat d’inciter ou d’autoriser sa presse à insulter ses opposants en général et M. Dini singulièrement. Car ce dernier évolue, par sa probité jamais démentie et son espoir de fonder une Nation Djiboutienne pour laquelle il a tant sacrifié avant et après l’Indépendance, dans une sphère nettement au-dessus de la sienne. Or, si Newton vivait aujourd’hui à Djibouti, et considérant que l’insulte est toujours la marque d’une infériorité, c’est sur cette métaphore qu’il aurait fondé toute sa théorie de la gravitation : le crachat retombe toujours sur le visage de celui qui veut salir quelqu’un de plus haut placé que soi, du point de vue de la vertu, du sharaf. Le drame, c’est qu’il est difficile de respecter un dirigeant qui se ridiculise par l’insulte d’autrui.
Arafat est rendu responsable d’une seconde Intifada du désespoir qui le dépasse parce qu’elle puise son origine et ses martyrs dans le refus sioniste de respecter une paix pour la conclusion de laquelle il a obtenu, avec Rabin, le prix Nobel. Ce n’est certainement pas en l’insultant que la presse du Chef de l’Etat renforcera l’indéniable rôle pacificateur qu’elle prétend dénier à M. Dini.
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Brèves nationales
L’UAD et l’affaire Borrel :
Et pourtant, il y a un cadavre !
C’est fou comme l’affaire Borrel rend le régime djiboutien extrêmement nerveux : même Kagamé a été moins virulent contre la France qu’il accusait pourtant d’avoir au moins passivement assisté au génocide de 1994. Nervosité vraiment suspecte. La constance et la cohérence étant les dernières vertus dont le RPP fait preuve, on apprend donc dans sa presse haineuse, aussitôt ses insultes proférées, qu’il s’agissait pratiquement d’un malentendu de toutes pièces fomenté par l’UAD en général et M. Dini en particulier : l’affaire Borrel ne serait qu’un avatar de la vie politique djiboutienne.
Rappelons juste qu’au moment des faits, de la mort du juge français, M. Dini se trouvait très loin du Goubet. Par contre, tout le monde sait qu’il y a un cadavre et que, selon les dernières expertises menées, les circonstances de la mort renvoient immanquablement à un assassinat.
Tout ce que demande l’opposition, c’est que la justice fasse son travail, que l’âme du mort trouve enfin repos et que sa famille puisse entamer son travail de deuil en toute sérénité. Mais, s’il nous est permis de donner, gratis pro deo, quelques conseils aux protagonistes de cette affaire, ce seraient les suivants : que le régime djiboutien se calme en abandonnant sa fixation aussi suspecte qu’indéfendable sur la thèse du suicide et que la partie civile s’intéresse un peu plus aux réseaux mafieux installés à Djibouti, dans lesquels elle croit reconnaître les assassins du juge.
Pour le reste, il y a des morts et des victimes djiboutiennes qui nous préoccupent beaucoup plus que ce drame.
Critiquer ou insulter ?
Mettre en garde ou menacer ?
Pour tout régime mal assuré de sa légitimité, pour cause de fraude et de mauvaise gouvernance, les critiques que l’opposition veut constructives sont perçues comme des insultes, tandis que ses mises en garde contre les risques que les méthodes despotiques font courir à la stabilité intérieure sont lues comme autant de menaces. Selon cette logique, à l’instar d’une bête sauvage acculée dans ses derniers retranchements, le régime perd son sang-froid et tombe dans un travers qui lui est malheureusement coutumier, surtout depuis quelques années : la diffamation et l’insulte.
Ainsi, dans un éditorial que nul n’a eu le courage de signer mais dont la provenance ne trompe personne, paru dans le journal gouvernemental « La Nation » de jeudi dernier, il est prêté des propos aussi mensongers que méprisables à M. Dini. Connaissant les limites du système judiciaire djiboutien, nous ne ne daignons même pas porter plainte : c’est parce que l’impunité leur est assurée que certains délits sont si souvent commis.
Pourquoi cette nouvelle charge diffamatoire contre un responsable de l’opposition ? Accessoirement pour permettre au régime de se défouler à peu de frais en évacuant l’énorme frustration née de la mise en quarantaine dans laquelle l’écrasante majorité du Peuple djiboutien a placée la Présidence suite à son communiqué irresponsable. Principalement pour inventer un répondant aux propos va-t-en guerre, révisionnistes et «tribalisants» tenus en 1993 par l’actuel Chef de l’Etat, que la propagande cherche aujourd’hui à présenter comme un inlassable gardien et garant de la Paix.
Malheureusement, la vérité est incontournable : s’il a bien eu l’opportunisme de saisir la main tendue par le Président Dini pour trouver un règlement négocié au conflit, chacun garde en mémoire les propos extrémistes que le successeur de Gouled tenait peu après son élection. Ainsi, à Ghislaine Dupont, qui l’interviewait sur les ondes de RFI, il répondait avec plein de suffisance et peu de conciliation : « pas de négociation avec le FRUD. M. Dini avait misé sur la communauté afar. Or, elle vient de le désavouer.» Les prisonniers du FRUD ? « Il n’y a aucun prisonnier politique à Gabode : ce ne sont que des criminels ». Sans jugement lui rappelle toutefois la journaliste.
Prétendre après cela avoir initié la paix de 2000, c’est croire que le Peuple souffre d’une profonde amnésie, mais le Peuple n’oublie rien !
Solidarité présidentielle :
Fausse sympathie et réelle indifférence
Si le Chef de l’Etat a quand même tenu à manifester une certaine solidarité en rencontrant quelques familles sinistrées à l’intérieur d’un camp militaire sécurisé, cette sympathie envers les victimes fut de courte durée. En effet, nos compatriotes effarés ont appris que, suite à la publication d’un communiqué présidentiel virulent à l’encontre de la France, les autorités djiboutiennes auraient également sommé les FFDJ (Forces Françaises stationnées à Djibouti), de suspendre leur assistance aux sinistrés, pendant que ces dernières assuraient, entres autres corvées, le ravitaillement en eau potable au bénéfice des habitants assoiffés de Balbala.
Curieuse manière de soulager la détresse de la population en mettant fin aux opérations humanitaires d’une armée étrangère, pour une raison uniquement judiciaire, au mépris des véritables besoins des sinistrés. Pour l’heure, l’incontestable solidarité présidentielle se limite à la généreuse distribution de khat dans toutes les localités visitées par le grand chef. Est-ce dans le cadre de la lutte contre la pauvreté ? Il faut bien commencer par quelque chose quand on est à ce point soucieux du bien-être de ses concitoyens.
Quoi qu’il en soit, il nous a paru opportun, au moment où le Chef du district de Djibouti et président du comité ORSEC annonce l’ouverture d’un compte bancaire à la BCI, et destiné à recueillir des fonds pour aider les sinistrés, de lancer un appel pressant au Chef de l’Etat, principal bailleur de fonds national, pour qu’il crédite généreusement ce compte.
Après avoir financé les projets d’adduction d’eau du Day et d’Ali-Sabieh, le « numéro un djiboutien » nous semble le mieux nanti pour aider financièrement les victimes des eaux dévastatrices de l’oued d’Ambouli : ce n’est que de cette manière, nous semble-t-il, qu’il pourra démontrer sa solidarité agissante à l’égard de ses concitoyens sinistrés. Tout le reste n’est que blabla.
Droits de l’homme :
Amnesty d’aujourd’hui et amnésie d’hier
Incapable d’apporter le moindre démenti au rapport 2003 du Département d’Etat américain relatif à la situation calamiteuse des droits de l’homme dans notre pays, voilà que le brûlot gouvernemental « La Nation » ose appeler au secours du régime la crédibilité d’une vénérable organisation qui a souvent consacré des pages noires à la violation des droits de l’homme dans notre pays.
Ainsi, au détour d’un éditorial ad hominem à l’encontre du Président Dini, on peut lire dans son édition de jeudi dernier, que Amnesty International, organisation humanitaire internationale basée à Londres aurait « sollicité le parrainage du gouvernement djiboutien dans sa campagne mondiale contre la peine de mort ».
Et le griot gouvernemental de rappeler que la peine capitale n’a jamais été appliquée dans notre pays. Que dire alors des centaines de victimes civiles des exécutions extrajudiciaires ou tombées sous la torture ? Se seraient-elles suicidées, à l’instar d’un juge français ?
Pour notre part, rappelons seulement que sous l’actuel mandat présidentiel, des civils et des handicapés ont été froidement exécutés sans autre forme de procès par des militaires, et sans que les auteurs de ces crimes n’aient été punis. L’impunité assurée aux criminels d’Etat est une dangereuse constante de ce régime liberticide. Rien ne l’empêche donc de désapprouver la peine de mort ailleurs, quand il a les moyens de l’appliquer chez lui autrement et sur des innocents : Adouani a bien été libéré!
Intellectuels et Progrès «cides » :
Cécité, surdité et mutité
Sérieusement mis à mal par la réaction responsable de l’UAD à travers son communiqué de presse du 19 avril dernier, le malheureux pamphlet du RPP pris au dépourvu n’a rien trouvé de mieux que de fabriquer, comme à son habitude, de prétendues réactions lorsqu’il lui fut intimé l’ordre de répondre. Ainsi, ce journal spécialisé dans la propagande, a-t-il crû bon de faire réagir en signe de solidarité avec le régime malmené, des soi-disant intellectuels djiboutiens, imaginaires bien sûr.
A en croire ce texte insipide à l’encre délébile et sur papier recyclé, un Collectif d’Intellectuels Djiboutiens (CID) jusque-là inconnu aurait réagi dans les colonnes de ce journal en condamnant l’opposition, tout en renouvelant son soutien au pouvoir. Après avoir lu ces inepties attribuées à l’occulte CID, un de nos sympathisants s’est écrié : « à moi conte, deux mots ! En garde jeunes patriotes ! »
Mais quand les maux ont pour noms surdité, mutité et cécité, que faire, comme disait Lénine ?
Secours aux sinistrés :
Mauvaise gouvernance = mauvaise assistance
Depuis les inondations catastrophiques du mardi noir, les médias officiels tentent désespérément de mettre en première ligne l’UNFD (Union Nationale des Femmes Djiboutiennes) dans les opérations humanitaires. Si nous n’avons aucune raison particulière ou partisane de douter de la compassion des privilégiées membres de cette organisation féminine à défaut d’être féministe, force est de regretter qu’on la fait passer avant les organismes officiels mandatés pour ce genre d’assistance.
En effet, le citoyen sinistré ne comprend pas la mise en avant d’une organisation partisane et ne disposant d’aucun moyen logistique reconnue pour remplir le vide laissé par tous les comités nationaux et autres ONG traditionnellement sollicités. L’approche d’importantes échéances électorales ne suffit pas à justifier l’implication exagérée et médiatisée à outrance d’une association féminine gouvernementale traditionnellement cantonnée à la propagande militante.
Achat de riz :
Sans rire !
Selon le journal gouvernemental « La Nation », que certains lecteurs appellent « La Ration », le gouvernement djiboutien aurait encore bénéficié d’une aide financière japonaise d’un montant de 150 millions de yens (environ 230 millions FD). Elle serait destinée, paraît-il, à l’achat de riz. Scandalisés par cette nouvelle, des milliers de Djiboutiens sinistrés et n’ayant pas vu l’ombre d’un sac de riz indien sur les 24500 entreposés depuis plusieurs mois dans la Zone Franche et en ville, rient jaune en maudissant ce régime corrompu et prédateur. A quelle sauce sera mangé ce futur riz, quand on sait que la Présidence a déjà constitué un trésor de guerre électoral pour acheter les consciences ?
« Il est de notre devoir d’aller vers les plus démunis», s’exclamait le Premier ministre le jour de l’Aïd-el-Kébir. Pour le moment, les dignitaires de ce régime alimentaire vont vers les plus démunis munis de bakchich et de khat : à qui réservent-ils le riz destiné au peuple ?
Gestion des deniers publics :
L’opacité endémique
Toute honte bue, l’agenda gouvernemental dénommé « La Nation » revient dans son édition de lundi dernier sur les travaux de l’Assemblée Nationale délabrée où les mal-élus seraient en pleine cogitation depuis quelques jours. Sous la plume de ce confrère fatigué, nous apprenons dépités : « Enfin, les députés ont constaté que depuis sa création (en 2000, NDLR), la Chambre des Comptes et de Discipline Budgétaire n’a présenté aucun rapport de ses activités annuelles. Le Ministre de la Justice étant le seul ministre interpellé a fourni les réponses satisfaisantes aux questions des députés ». Lesquelles ? Toujours selon cette source, ce jour-là, « le thème débattu portait sur la stabilité politique, l’Etat de droit et la bonne gouvernance ».
Edifiant !
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Coopération en eaux troubles
ETAT DES LIEUX !
Pressés de convertir en retombées financières l’intérêt que portent à notre pays l’OTAN et singulièrement les Etats-Unis, les dirigeants du RPP multiplient mensonges et courbettes. Peine perdue ! Compte tenu des conditions imposées par les donateurs au déblocage de l’aide et à la lumière du rapport d’activité du Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération pour l’exercice 2003, examinons l’impact de l’aide multilatérale comme bilatérale (nature, volume, affectation) sur le développement économique et social de Djibouti.
Dans une interview accordée à notre confrère LNA, le Président Dini avait exposé la nature de la coopération qu’il souhaitait voir s’établir entre nous et tous nos partenaires (Etats, Organisations et Institutions financières) impliqués dans le développement économique et social de notre pays : Une Coopération rupture. En clair, une aide substantielle, structurelle et soutenue qui, en mettant notre pays sur les rails du développement durable, nous permettrait de nous passer de l’aide. En effet, cette forme de coopération et cette forme-là seulement va dans le sens des intérêts bien compris des deux parties. Elle constitue la meilleure politique d’endiguement et de prévention des causes (misère extrême, disparités sociales et exclusion) qui constituent le terreau fertile des extrémismes religieux ou idéologiques.
Tandis qu’elle est la seule issue possible pour les bénéficiaires ne serait-ce que parce qu’il est moralement dgradant et économiquement impossible de vivre indéfiniment de la mendicité et de l’endettement. Les Etats-Unis qui ont, au sortir de la Seconde Guerre Mondiale, grâce au Plan Marshall, financé la reconstruction et impulsé le développement de l’Europe, semblent orienter leur diplomatie et coopération sur cette voie à en croire l’administration de l’USAID. Traçant les grandes lignes de ce que sera l’aide américaine à l’étranger dans un monde en mutation, il explique que l’instrument-levier de cette politique novatrice sera le M.C.A (Compte du Millénaire) devant constituer une charnière de la stratégie anti-terroriste à long terme des Etats-Unis. Fort bien !
A cet effet, ce compte permettra de consacrer 5 milliards de dollars de plus pour compter de 2006, à des pays qui appliquent une politique socio-économique judicieuse pour les aider à faire des progrès rapides en matière de développement. Cependant, parce qu’aucun pays ou groupe de pays (G 8), quelque soit sa richesse, ne peut laisser s’engloutir l’argent du contribuable dans des projets sans lendemain (par manque de transparence par exemple), M. Natsios prend bien soin de préciser que cette aide sera conditionnée « aux programmes nationaux de promotion de la justice et de l’état de droit », précisant que le M.C.A sélectionnera les pays qui recevront cette aide importante en fonction de l’attachement et l’importance qu’ils accordent « en pratique » à la bonne gouvernance, aux libertés d’une manière générale et dans le domaine économique en particulier ainsi qu’aux investissements dans le domaine social. Voilà pour ce qui est des conditions imposées au déblocage de l’aide. Notre pays les remplit-il ? A l’évidence, la réponse est NON !
Nous avons déjà eu l’occasion d’émettre nos réserves concernant l’efficacité du Système des Nations-Unies en critiquant les absences de traçabilité des fonds débloqués et de suivi dans l’exécution de certains projets. Nous pensions notamment au programme de réhabilitation des zones affectées par le conflit armé et financé entre autres donateurs par le PNUD, lors des Accords de paix de 1994. La preuve en est l’état de délabrement dix ans plus tard des deux villes les plus affectées par la guerre et pour la réhabilitation desquelles ce soutien a été sollicité : Obock et Yoboki. Si l’impact des balles et les traces du conflit armé y sont encore visibles aujourd’hui, les fonds bel et bien débloqués se sont quant à eux volatilisés. Ce seul exemple suffit à décrédibiliser ce régime.
Le Système des Nations-Unies en a pris acte. Sans se désengager de sa mission à Djibouti, il continue çà et là à colmater les brèches laissées béantes par les choix irrationnels de nos gouvernants dans des domaines aussi vitaux tels que la santé et l’éducation. Il a consigné le constat amer de son partenariat avec notre pays dans un Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté où l’on peut lire à la page 11 « la République de Djibouti a ratifié la majorité des conventions internationales des droits de l’Homme, la Charte africaine des droits de l’Homme et du peuple (1981)… Cependant, même si la ratification de ces conventions traduit la volonté du gouvernement de se conformer aux instruments internationaux, leur application reste difficile faute de cadre institutionnel et de mécanisme de suivi appropriés. Ceci donne un caractère formel aux signatures accordées sans pour autant que les clauses des conventions signées ne se traduisent dans le droit positif djiboutien… ».
A l’euphémisme protocolaire près, c’est exactement ce que nous ne nous lasserons pas de dénoncer dans nos colonnes. Et nous sommes les mieux placés pour le faire, victimes que nous sommes avec notre peuple du refus obstiné du gouvernement d’appliquer intégralement cet Accord. Pourtant, l’application honnête et concertée de son volet concernant les réformes démocratiques (Cour des Comptes, Libertés Syndicales et de la presse, Indépendance de la justice, Transparence électorale…) aurait fourni à notre pays l’indispensable socle structurel pour le développement. Nous n’en sommes malheureusement pas là.
Examinons à présent le rapport d’activités du Ministère des Affaires Etrangères et de la Coopération pour l’exercice 2003 que son excellence introduit avec les salamalecs d’usage : « sous la haute autorité de S.E.M. Ismaël Omar Guelleh, Président de la République et Chef de Gouvernement, notre diplomatie a connu une année particulièrement chargée pleine de réalisation. En effet, l’année 2003 a été marquée par des nombreux évènements dont le plus important est la visite officielle effectuée par le Chef de l’Etat aux Etats-Unies à l’invitation de son homologue S.E.M Georges W. BUSH ». Nous nous contenterons cette semaine d’interpeller le gouvernement en dressant à l’attention de nos lecteurs une liste de l’aide bilatérale. Nous réservons nos appréciations et analyses à une autre édition.
L’annexe 5 du rapport ne précise pas si cette liste est exhaustive ni n’indique explicitement la nature de l’aide. Toutefois, dans le tableau que nous reprenons ci-dessous, il nous est précisé qu’au total, « nous avons mobilisé une aide bilatérale de l’ordre de 125 millions de dollars, environ 22 milliards de nos francs dont 25 millions de dollars sur prêt ».
Donc, à en croire son Excellence, ce sont 100 millions de dollars de dons que son actif département a mobilisé pour l’exercice 2003. Au cours de la campagne électorale des législatives 2003, le Président Dini, tête de liste de l’UAD disait en substance, à l’occasion du dernier meeting à Djibouti le 8 janvier 2003, en sollicitant les suffrages (obtenus) des électeurs : « nous sommes dignes de confiance… nous vous promettons aucun miracle dont seul Dieu est capable, par contre nous vous faisons ici le serment solennel que toutes les ressources nationales (ou extérieures) mobilisées seront équitablement redistribuées et investies en fonction des priorités définies par une Assemblée que vous élirez et un gouvernement légitime… ».
Puisqu’à en croire les lamentations des mal élus, la Chambre des Comptes et de Discipline Budgétaire ne rend ses comptes et suggestions qu’à un seul homme, notre posture d’observateurs vigilants et responsables nous oblige à exiger du gouvernement d’administrer la preuve matérielle et publique que les dons mobilisés en 2003 et représentant près de la moitié du budget national 2004 sont (ou en cours de l’être) injectés et affectés à leur destination initiale.
Que chaque ministère fasse preuve de la même diligence que le Ministre de la Coopération en rendant public son rapport d’activités 2003 en démontrant les projets réalisés ou en cours grâce aux Dons.
Dans un mea culpa clôturant l’annexe 6 du rapport sus-cité, son Excellence nous prie de bien vouloir noter que « nous n’avons pu donner notre voix à aucun des pays amis qui l’ont sollicité vu que nous n’avons pas payé nos arriérés de contribution, comme vous pouvez le constater dans la liste ci-jointe (arriérés des contributions de la République de Djibouti annexe 7).»
Quand les dons mobilisés depuis l’indépendance ne parviennent pas ou si peu aux destinataires et que l’Etat qui est censé les représenter est incapable de rendre la plus petite monnaie de la pièce aux donateurs, il y a de quoi décourager le plus altruiste, s’il peut exister, des pays donateurs.
Source : Ministère djiboutien des Affaires Etrangères. 2003
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Renforcement des luttes populaires
L’opposition prête à la confrontation finale
Soucieux d’appliquer les dures leçons de sa longue expérience politique, le président Dini n’est absolument pas disposé à laisser encore une fois trahir sa bonne foi et réduire à néant son désir de paix ; conforté qu’il est dans cette exigence par l’ensemble des dirigeants de l’UAD. Contrevenant aux règles les plus élémentaires de la bienséance, certains plumitifs font croire que le leader de l’UAD a abandonné toute action politique. La réalité aura bientôt raison de l’intoxication.
Samedi 24 avril vers 10 heures du matin : c’est dans une forme excellente que le Président Dini reçoit le Bureau Politique de l’ARD pour une réunion hebdomadaire habituelle. Après avoir écouté le rapport sur la situation politique nationale dressé par les principaux dirigeants de notre mouvement, le chef emblématique de l’opposition djiboutienne s’exprime ainsi : « Je constate malheureusement que ce régime de non-droit reste égal à lui-même. La démocratie est en panne et les injustices se poursuivent. Il nous faut donc agir de toute urgence car il en va de l’avenir de notre pays ».
Il poursuit d’un ton grave : « Si j’ai bien compris, ce régime clame qu’il ne respectera ni les textes de loi en vigueur, ni l’Accord de paix qui nous lie à lui devant Dieu et notre Peuple. Pour preuve, le Trésor Public, conforté en cela par un appareil judiciaire ayant perdu le sens de la justice, refuse de restituer la caution électorale de 32.500.000 FD versée par l’UAD pour participer aux législatives du 10 janvier 2003. Le régime continue également à piétiner l’Accord de paix signé il y a trois ans. Que faire dans ces conditions ? Mettre en place la légitime réaction populaire ! Pour contrer les agissements délictueux d’un pouvoir qui s’obstine à ne reconnaître aucune légalité et surtout pas la libre expression de la volonté populaire ».
En effet, si l’opposition djiboutienne a jusqu’à présent fait preuve de la plus grande patience afin de préserver la stabilité politique et sociale, force est de regretter que cette attitude de responsabilité ait été mal interprétée par un régime insouciant et irresponsable. Devant cet inqualifiable défi lancé à la paix civile, l’opposition démocratique est désormais déterminée à ne plus brider la légitime contestation populaire qui ne demande qu’à pacifiquement s’exprimer, afin que les légitimes aspirations au changement soient enfin clairement entendues et respectées.
Le lendemain, ce sont les travaux d’une réunion de tous les partis regroupés au sein de l’UAD que le Président a dirigés, toujours avec la même disposition d’esprit combative. Après avoir sincèrement félicité les dirigeants de l’UAD pour l’unité d’action jamais démentie et brillamment démontrée sur tous les terrains pendant sa longue absence du pays, le chef charismatique de l’opposition a exhorté ses pairs à la mobilisation générale en vue d’une confrontation décisive avec ce despotisme irresponsable.
Ceux qui se mettaient imprudemment à rêver d’une opposition décapitée et sclérosée, sans aucune détermination inscrite dans la durée et le sacrifice, en seront bientôt pour leurs frais. A l’heure où, malgré un bilan politique, économique et social catastrophique, le « numéro un djiboutien » et son fan-club de plus en plus réduit cherchent à abuser le Peuple exaspéré en faisant miroiter une possible réélection du responsable de tous ses malheurs, nous disons que c’est sans compter sur la voix rassurante de l’homme d’acier et c’est oublier la main de fer (dans un gant de velours ) de celui qui a surtout assuré sa carrière dans la répression de tous les démocrates.
Dieu seul connaît l’avenir, nous ne connaissons pour notre part que notre détermination à sauver notre pays des griffes des prédateurs. Demain sera un autre jour.
Pauvre régime qui se gargarise d’analyses fantaisistes par lui-même inspirées et maladroitement rapportées dans les pages complaisantes de « Jeune Afrique/ L’Intelligent » qui ose écrire, sans même le vérifier auprès de l’UAD : «Le drame de l’opposition tient à son manque de représentation au sein des institutions élues. L’absence de proportionnelle l’a privée de toute représentation au parlement. Sa seule présence se limite à une presse quotidienne dont l’audience est certes populaire, mais ne lui procure que peu d’influence dans le débat politique».
C’est peut-être la morosité dans laquelle le plonge l’ennui d’un papier commandité et grassement rétribué qui empêche ce journaliste d’aborder l’essentiel : même avec l’actuel mode de scrutin, l’opposition aurait remporté les élections, s’il n’y avait pas la fraude institutionnalisée.
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Aide extérieure, bonne gouvernance et anti terrorisme
Pour d’évidentes raisons tenant tant à sa position stratégique qu’à ses maux revêtant un caractère endémique que la coalition internationale contre le terrorisme se propose de prévenir et combattre dans une région aux troubles récurrents, notre pays peut légitimement nourrir l’espoir de figurer parmi les pays africains devant prioritairement bénéficier du MCA (Compte du Millénaire). Au grand désespoir de notre peuple, et par la faute de dirigeants irresponsables, irrationnels dans leurs choix budgétaires, gaspilleurs et inconséquents, Djibouti, demeure handicapé car n’apportant aucun contenu concret aux « parures institutionnelles » dont elle se dote formellement pour abuser des donateurs qui ne sont plus disposés à se laisser flouer…
Le Secrétaire d’Etat adjoint aux Affaires Africaines, M. Charles Snyder, affirmait au cours d’une conférence de presse organisée par l’« American Enterprise Institute » que « Les Etats-Unis ont en Afrique de réels intérêts en matière de sécurité et s’ils devaient les ignorer, ce serait à leurs risques et périls ». L’administrateur de l’USAID, dans un article paru dans l’International Herald Tribune, persiste et signe : « nous nous sommes rendu compte que la sécurité sur notre territoire dépendait de la sécurité, de la Liberté et des possibilités économiques au-delà de nos frontières ». Bien que tardive, cette prise de conscience est salutaire pour tout le monde car, comme nous l’écrivions bien avant le 11 septembre 2001, la meilleure containment policy passe par une étroite collaboration avec les pays pauvres (terreaux fertiles de tous les extrémismes) surtout dans le domaine économique et social, comme dans celui des droits de l’Homme.
Abondant dans notre sens, le Washington File, édité par la section culturelle de l’Ambassade américaine à Paris, nous explique qu’ « afin de relever ces défis, le Président Bush a annoncé l’initiative de lutte contre le terrorisme en Afrique Orientale. Il s’agit d’un programme de 100 millions de dollars visant à renforcer les capacités de lutte antiterroriste de nos partenaires dans la région… Nous nous attachons à aider plusieurs pays, notamment le Kenya, l’Ethiopie et Djibouti, à renforcer la sécurité de leurs frontières, à accroître la compétence de leurs forces de l’ordre et à améliorer la façon dont les collectivités territoriales marginalisées perçoivent les Etats-Unis et leur politique… ». A la bonne heure !
Avec l’écrasante majorité des Etats membres de l’ONU, « Réalité » n’a jamais fait mystère de sa désapprobation de la politique de l’administration républicaine au Proche-Orient. Par contre, intéressés au premier chef par sa politique en Afrique Orientale, et parce que représentatifs de tout le peuple djiboutien, (collectivités marginalisées ou pas) nous tenons à faire savoir à l’adresse tant des Etats-Unis d’Amérique que de l’ensemble de nos partenaires impliqués dans la lutte contre le terrorisme et dans le développement de notre pays, un certain nombre d’observations de nature à mieux orienter leurs politique chez nous.
De 1977 (attentat contre le Palmier en Zinc) à 2004 (multiples attentats sur la voie ferrée, dont le dernier à équidistance de la gare et de la Garde Présidentielle…), la brève existence de notre pays est émaillée d’attentats dont pratiquement aucun n’a été élucidé, chacun servant de prétexte à la répression contre l’une ou l’autre des composantes de la communauté nationale. A l’heure où nous mettons sous presse, nous apprenons que l’explosion d’une grenade a fait un blessé léger dans un quartier de la Capitale (4). La prolifération d’armes légères dans des milieux autorisés et la persistance d’une population flottante font que Djibouti est considéré comme le maillon faible de la région par les groupuscules nuisibles.
Contentons-nous d’observer que, de l’Indépendance à 1999, la sécurité nationale et extérieure relevait des compétences officielles d’un seul homme : l’actuel Président de la République. Reconnaissons-lui le mérite partagé d’avoir eu, moins d’un an après son accession à la magistrature suprême, le pragmatisme d’avoir mis fin à un interminable conflit civil armé. Constatons à sa décharge que, trois ans après la signature de l’Accord de paix définitive du 12 mai 2001, le courage et ce pragmatisme lui font aujourd’hui défaut pour l’appliquer intégralement et de concert. Non seulement les conséquences du conflit (Réhabilitation) n’ont pas été soigneusement soignées, mais plus grave, les causes politiques qui ont conduit au conflit armé perdurent. Le risque est réel et grand, que le conflit à ce jour sourd et latent, ne dégénère.
Pour l’heure, force est de regretter, comme s’en inquiétait récemment la Fédération Internationale des Droits de l’Homme, que la lutte planétaire contre le terrorisme menée par les grandes puissances, n’aura malheureusement servi qu’à légitimer et renforcer les régimes dictatoriaux de par le monde. S’il est tout à fait normal que les Etats-Unis d’Amérique se préoccupent d’aider son allié à sécuriser ses frontières poreuses, qui peut garantir la paix civile intra muros d’une Cité-Etat se singularisant par la plus forte densité mondiale d’hommes en uniformes ?
A l’évidence, à la seule lecture des rapports annuels du Département d’Etat sur la situation désastreuse des Droits de l’Homme dans notre pays, l’opinion publique américaine n’acceptera jamais que ses soldats soient, malgré eux, impliqués dans un conflit strictement interne pour la défense d’un despotisme que l’engagement américain vise justement à éradiquer dans le monde.
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Les tribulations du Premier ministre
UN JEUNE A FRIC MALADROIT
Il en est peut-être de même pour certains régimes de l’Asie du Sud-Est, mais la palme revient incontestablement aux Etats postcoloniaux d’Afrique : prétendant compenser leur déficit démocratique par une surabondante campagne médiatique, ils font appel aux services de journaux à diffusion internationale pour redorer leur blason terni. N’étant pas en reste de cette mystification, surtout depuis 1999, le régime djiboutien achète pour plusieurs millions les pages «Plus» d’un magazine francophone que Le Canard Enchaîné avait ironiquement rebaptisé Jeune à fric et qui s’est lui-même pompeusement rebaptisé L’Intelligent. Ainsi, dans son édition N° 2258 du 18 au 24 avril 2004, le lecteur est-il sommé de prendre au sérieux une interview du Premier ministre djiboutien, que l’on doit à la plume héroïque du journaliste Cherif Ouazani. Même quand il s’est agi de répondre à ces questions de niveau maternelle, le Premier ministre a surtout étalé toute son inexpérience politique. Sans même parler de naïveté.
« Pourtant, à lire les journaux de l’opposition, vos anciens compagnons ne sont guère complaisants... » : c’est pratiquement la question la plus courageuse que le journaliste ait posée au Premier ministre. C’est bien insuffisant : il aurait au moins pu respecter la déontologie journalistique et avoir la politesse de demander à ces journaux de l’opposition pourquoi ils étaient si peu complaisants avec lui. Mais ce journaliste n’était pas à Djibouti pour entendre les points de vue de toutes les parties concernées et avoir une vision d’ensemble de la situation nationale. L’ignorance, du journaliste se retrouvant jusque dans sa présentation tendancieuse du FRUD en général : « mouvement sécessionniste afar ». Non. Il était tout simplement en service commandé : l’Etat djiboutien ayant acheté 17 pages d’un publi-reportage, sorte de safari médiatique dont le but, payant, est de rechercher les meilleures sensations et de garder les plus belles images. Malheureusement pour le régime cherchant vainement à crédibiliser ses figurants, les réponses du Premier ministre produiront l’effet contraire de celui pour lequel l’Etat a déboursé un gros magot, aux frais du contribuable djiboutien bien sûr.
Mettons certaines choses au clair : nous n’avons jamais été d’anciens compagnons du Premier ministre pour une raison très simple : sans aucun antécédent militant, son entrée en politique est récente ; mars 2001 pour être précis.
Mais, contrairement aux biographies complaisantes, ce n’est nullement sa contribution à la signature de l’Accord-cadre de Paris de février 2000 qu’il faut retenir : le chef de délégation de la partie gouvernementale, lui-même ancien maquisard connaissant bien M. Dini pour l’avoir secondé dans le maquis, n’était autre que M. Ali Guelleh, Chef de cabinet de la Présidence. Nos vrais anciens compagnons du FRUD apprécieront cette confiscation de l’Histoire.
La seule participation que nous reconnaissons au Premier ministre dans le déroulement de ce conflit, c’est uniquement d’avoir organisé l’extradition en septembre 1997 depuis la Capitale éthiopienne où il était chef de poste, avec celle des responsables du FRUD, de Mme Aïcha Dabalé, à l’époque enceinte et dont le seul tort était, en plus de sa référence matrimoniale, de travailler dans une organisation caritative. Maigre fait d’armes policier, mais certainement aucune réelle contribution politique à la paix. Quant à sa consolidation…
Nous n’évoquerons qu’incidemment la grande nouveauté consistant à présenter le « genou » d’un responsable : après avoir précisé que ce dernier « est issu de la tribu afar des Hassouma », lira-t-on prochainement, pour respecter les grands équilibres que le Chef de l’Etat « est issu de la tribu Somali-Issa-Mamassan des Bah Fourlaba »? Plus sérieusement, pour rester sur ce chapitre, les lecteurs apprendront que, selon le Premier ministre, « Le peuple djiboutien est composé de deux groupes ethniques, les Afars et les Issas. Ces deux groupes se scindent en plusieurs tribus, clans et sous-clans ». Inculture suspecte qui procède à la négation des nombreuses autres composantes de la communauté nationale. Son propre Directeur de cabinet, la Présidente de la Cour Suprême et tous ceux appartenant à des groupes qui contribuent depuis les origines au rayonnement de notre pays apprécieront cette inacceptable légèreté.
On se demandait pourquoi l’UMP avait sollicité les services sympathisants de l’ancien Président du Conseil de Gouvernement du temps colonial : l’énumération du Premier ministre nous ramène tout droit aux simplifications du « Territoire Français des Afars et des Issas » dont on comprend aisément que certains ethnarques se disent faussement revanchards.
Le mur du çon (comme dirait Le Canard Enchaîné) étant toutefois franchi lorsque, au journaliste lui demandant candidement s’il lui arrivait de rencontrer les dirigeants de l’opposition, le Premier ministre répond avec une naïveté qui aurait été touchante en d’autres circonstances : « Djibouti est un petit pays, où tout le monde se connaît. Il nous arrive de nous croiser dans les dîners en ville, les réceptions dans les ambassades ou dans d’autres circonstances. Cela se passe très bien, et les diplomates s’étonnent de nous voir ensemble ».
C’est vraiment trop : à en croire ses propos, la vie politique djiboutienne ressemblerait à une maternelle où tout le monde il est gentil et tout le monde il s’aime.
Le Premier ministre serait bien incapable d’indiquer dans quelle circonstance mondaine il rencontre si souvent les dirigeants de l’opposition, puisqu’il semble avoir beaucoup de temps libre, constitutionnellement plongé qu’il est dans une société politique de loisirs.
Par contre, la mansuétude que ceux-ci témoigneraient à son égard pourrait aisément s’expliquer : il est inutile de le charger de tous les travers de ce régime, lui qui n’est que son premier figurant institutionnel !
Sauf quand il se prend trop au sérieux en répondant intempestivement à un courrier du FRUD-armé adressé au Chef de l’Etat, et s’interposant sans aucune protection en invoquant pour son chef la désormais célèbre « gestion de vraie problématique ». That’s all folks !
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