Mémorandum de l’Union pour l’Alternance démocratique (UAD) remis à l’Union européenne le 30 octobre 2008
Note de la rédaction
Cette semaine RÉALITÉ en ligne publie en exclusivité le Mémorandum de l’Union pour l’Alternance Démocratique (UAD) présenté à l’occasion de la visite à Djibouti, d’une mission d’Information du Parlement Européen, le 30 octobre 2008.
Les Parlementaires Européens se sont longuement entretenus avec les dirigeants de l’UAD dans les locaux de l’Union Européenne au Plateau du Héron. Les discussions ont été qualifiées de franches et fructueuses par les deux parties. Le document, ci-dessous reproduit, basé uniquement sur les faits démontre clairement la faillite de la démocratie en République de Djibouti. Le potentat local qui hante le Palais de l’Escale depuis l’indépendance reste le principal artisan de ce naufrage.
UNION POUR L’ALTERNANCE DEMOCRATIQUE (U.A.D.)
2, rue de Pékin, Héron – DJIBOUTI – Tél : 34 18 22 – 82 99 99
Djibouti, le 30 octobre 2008
MÉMORANDUM
A l’occasion de la visite d’une délégation de l’Union Européenne à Djibouti, l’opposition djiboutienne regroupée au sein de l’Union pour l’Alternance Démocratique (UAD) présente un mémorandum sur la situation politique en République de Djibouti.
INTRODUCTION
Après une décennie de multipartisme limité à quatre partis, l’instauration du multipartisme intégral suite á l’accord de paix définitive du 12 mai 2001 n’a pas tenu ses promesses d’avènement d’une nouvelle ère de vie démocratique pacifiée dans notre pays.
Les premières élections législatives pluralistes en janvier 2003 ont vu s’affronter une coalition de quatre partis progouvernementaux et une alliance de quatre partis de l’opposition nouvellement créés. Sans surprise, la mouvance présidentielle a raflé la totalité des siéges à l’Assemblée Nationale à l’issue d’un scrutin ni libre ni transparent.
L’opposition nationale a été spoliée d’une victoire incontestable par les fraudes massives. Bien que créditée selon les chiffres officiels de 45% dans la capitale et de 38% au niveau national, le mode de scrutin majoritaire à un tour imposé par le pouvoir l’a privé de tout siége.
Son recours en annulation du scrutin a été rejeté malgré les preuves irréfutables de fraudes et sa caution de 32 500 000 FD déposée au trésor national ne lui a pas été remboursée. Cherchant á se prémunir contre des futures élections frauduleuses, l’UAD a adressé plusieurs courriers au ministère de l’intérieur et au chef de l’Etat afin qu’un minimum de transparence et d’équité soient observés lors des scrutins à venir.
Ses 9 propositions pour garantir la transparence électorale ont été purement et simplement ignorés et le pouvoir n’a même pas daigné répondre aux courriers. Face à ce mépris gouvernemental, l’UAD a boycotté les élections présidentielles d’avril 2005.
Ses consignes de boycott ont été largement suivies comme l’ont constaté les observateurs internationaux et les journalistes étrangers présents á Djibouti lors de cet étrange scrutin. En effet, le Président sortant, ISMAEL OMAR GUELLEH s’est retrouvé seul candidat en lice.
Au lendemain de cette parodie d’élection, le candidat unique s’est proclamé vainqueur avec un score fantaisiste de plus de 75 %. Poursuivant son mépris des revendications de transparence formulées par l’opposition nationale, le régime a organisé les premières élections régionales en 2006 et des pseudo élections législatives en février 2008. L’UAD a tout naturellement boycotté ces simulacres d’élections.
A l’occasion de la campagne des législatives de 2008, le pouvoir a interdit par la force tout rassemblement politique de l’opposition, se permettant même d’assigner à résidence les dirigeants de l’UAD.
DES RECULS DÉMOCRATIQUES MAJEURS
Conséquence de ce grave recul démocratique et du retour en force du despotisme, l’assemblée nationale issue des dernières «élections» sur la base d’une liste unique présentée par le pouvoir, reste monocolore. Ainsi, 30 après l’indépendance, Djibouti demeure un des rares pays africains où l’opposition n’est pas représentée á l’assemblée nationale.
La dérive autoritaire du pouvoir s’est confirmée depuis 2005, par la confiscation totale de la liberté d’expression. Les journaux de l’opposition sont interdits, les syndicalistes indépendants et les défenseurs des droits de l’homme sont systématiquement harcelés, arbitrairement arrêtés et souvent contraints à l’exil en Europe notamment et á Bruxelles singulièrement.
Pire encore, un culte de la personnalité inconnu même au temps du parti unique, régente la vie nationale á tous les niveaux. La société civile émergente reste largement embrigadée ou réprimée.
UN DÉVELOPPEMENT EN TROMPE-L’ŒIL
Sur le plan économique, force est de déplorer que les investissements massifs venus des pays du Golfe Arabo-Persique n’ont pas profité aux populations. Les grands chantiers de construction lancés ces dernières années font largement appel à une main-d’oeuvre immigrée d’origine asiatique. Plus de 60 % des jeunes djiboutiens sont au chômage et 42 % de la population vit au dessous du seuil de pauvreté.
En dépit de l’aide économique bilatérale et multilatérale en constante augmentation, la grande majorité de la population souffre d’une malnutrition chronique dans la capitale et dans les districts de l’intérieur.
MARGINALISATION ET CRIMINALISATION DE L’OPPOSITION LEGALE
Depuis avril 2008, un contentieux frontalier oppose Djibouti á l’Érythrée voisine dans l’extrême nord-est du pays. Suite aux affrontements armés meurtriers de juin dernier un conflit larvé persiste entre les deux pays autrefois amis.
Sur le plan intérieur le régime, arguant d’une situation de guerre, accentue la répression politique contre les opposants. Ainsi, en juillet 2008, le pouvoir a arbitrairement par décret présidentiel dissout un parti d’opposition légal et pacifique : le mouvement pour le Renouveau Démocratique (M.R.D.) membre de l’UAD sur la seule base d’allégations de trahison qui n’ont convaincu personne. A ce jour, le régime continue périodiquement de menacer l’opposition nationale souvent qualifiée de traître, d’apatride et d’ennemie de l’intérieur.
CONCLUSION
Il apparaît clairement que le régime djiboutien est redevenu depuis 2005 une dictature de plus en plus oppressive. En l’absence de toute vie politique pacifiée et démocratique, il est fort à craindre que le mécontentement général et la paupérisation ne conduisent comme dans un passé récent á des soubresauts déchirants.
Aussi, l’Union pour l’Alternance Démocratique (UAD) attend de l’Union Européenne qu’elle use de toute son influence politique et économique pour que notre pays ne devienne pas une nouvelle zone d’instabilité dans la corne de l’Afrique.
Union pour l’Alternance Démocratique (U.A.D.)