Réalité numéro 129 du mercredi 9 mars 2005 |
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Sommaire
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Directeur de Publication : ALI MAHAMADE HOUMED Codirecteur : MAHDI IBRAHIM A. GOD Dépôt légal n° : 129 Tirage : 500 exemplaires Tél : 25.09.19 BP : 1488. Djibouti Email : realite_djibouti@yahoo.fr
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Éditorial
PAS DE DROITS DE LA FEMME
SANS DROITS DE L’HOMME
C’était hier 8 mars la Journée Internationale de la Femme, avec tous les rites officiels de célébration. Considérer les spectacles et les discours, la chorégraphie en somme, est une façon très courante d’appréhender la politique. Parce que la mise en scène s’impose comme une évidence indiscutable, la remettre en question demande le minimum de réflexion que n’exige pas la passivité du spectateur mystifié.
Il y a une autre façon d’analyser la politique, toute simple. Elle consiste à se mettre à l’écoute des gens ordinaires dans les situations les plus quotidiennes. L’autre jour justement, dans le bus qui la ramenait de l’Hôpital Peltier, une femme a énoncé une vérité que beaucoup de théoriciens officiels seraient bien inspirés de méditer : « Maudit soit ce régime, qui nous impose des femmes députés et des hommes gynécologues ! »
C’est tellement clair que cela se passerait de commentaires, tant cette métaphore d’un corps soumis à des obligations religieuses bafouées par le pouvoir politique crie son désespoir. Le chantre local du féminisme a oublié ce détail capital.
Mais il se trouve que cette Journée Internationale de la Femme coïncide, à un jour près, avec le dépôt de candidature du candidat solitaire. La promotion de la Femme, comme s’il s’agissait d’une marchandise, telle qu’elle est conçue ici, oublie cette dimension essentielle de l’existence humaine : tout être a droit à la dignité.
En France, laïcité oblige, la musulmane doit aller dans le privé pour choisir une gynécologue. A Djibouti, où l’Islam est religion d’État, c’est l’absence de choix qui est imposée à la musulmane. Pourtant, une simple demande à l’assistance technique extérieure, surtout lorsqu’elle vient d’un autre pays musulman, aurait suffit pour éviter cet outrage à leur pudeur.
Le paradoxe n’est qu’apparent, parce que les droits de la Femme sont indissociables des droits de l’Homme. Le respect de l’une en particulier présuppose celui de l’autre en général. Et, en ce domaine, la triste réputation du régime djiboutien est solidement établie dans le monde.
Même récemment, celles qui tentaient courageusement, par les petits boulots du secteur informel, d’arracher à la société un minimum d’indépendance, se sont retrouvées en prison, malmenées, brutalisées. Condamnées au chômage et à la déchéance sociale.
Tandis que d’autres, en brousse, accouchent dans des conditions inhumaines et leur survie tient souvent du miracle, parce les priorités gouvernementales les ont dépossédées de dispensaire ou d’ambulance. Pour elles, les discours pompeux et les spectacles clinquants sont irréels, mensongers : en droit, on parle de dol.
Et c’est cette politique réduite au spectacle que le grand metteur en scène national cherche à reconduire. Ce qui est inadmissible. La femme djiboutienne est à l’image de la société dans laquelle elle vit et certains droits ne lui seront pas reconnus quand tant d’autres, fondamentaux, sont quotidiennement bafoués.
Prétendre brûler des étapes de l’émancipation, ce n’est qu’un subterfuge pour nier les réels obstacles qui doivent être préalablement surmontés. Et le premier d’entre eux, c’est la nature même de ce régime de bouffonnerie dangereuse, qui impose des fausses problématiques, des hommes gynécologues et des dirigeantes autoproclamées d’une Union Nationale des Femmes Djiboutiennes.
C’est à cette usurpation feignant promouvoir la Femme tout en humiliant l’Homme, que nous mettrons fin, avec l’aide d’Allah.
Brèves nationales
M. Mohamed Daoud Chehem renonce :
Se tromper est humain
Par un communiqué officiel rendu public dimanche dernier, le Président du PDD, M. Mohamed Daoud Chehem a décidé de finalement renoncer à se présenter à la présidentielle annoncée.
Nous ne pouvons que nous en féliciter et le féliciter de ce tardif retour à la raison : on ne joue pas avec des tricheurs! Par cette décision courageuse, même motivée par des difficultés financières, M. Mohamed Daoud Chehem a démontré, contre certaines rumeurs locales, que son intention de se présenter n’était pas une manipulation du régime en quête de challenger.
Nous souhaitons à son Parti le renforcement qu’il mérite, dans la transparence et la clarification.
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Le nouveau parti prend position :
Le suspense était insoutenable !
Le multipartisme intégral était une disposition de l’accord de paix du 12 mai 2001. C’est pourquoi nous ne pouvons, par principe, que saluer toute création d’un nouveau parti politique. L’Union des Partisans pour la Réforme (UPR) est donc née samedi dernier, après une longue gestation ponctuée de bilans de santé établis par les médias gouvernementaux. En effet, annoncée depuis plus d’un an, cette formation les inquiétait quant à son positionnement sur l’échiquier politique.
C’est du moins ce que la RTD déclarait quelques jours avant la cérémonie de fondation au Palais du Peuple. A croire que la radio n’a pas lu le communiqué de presse publié à cette occasion par le futur président du parti à naître dans lequel il annonçait que sa formation s’ancrerait solidairement dans la mouvance présidentielle.
N’est pas Hitchcock qui veut !
Ce qui n’était qu’un secret de Polichinelle est finalement devenue le pedigree officiel de l’UPR et ce serait offenser le droit à la vie que de ne pas présenter ce bébé. Son Président est M. Ibrahim Chehem Daoud, fils du regretté Chehem Daoud, Vice-Président du FRUD-armé jusqu’à la création de l’ARD que des raisons de santé l’avaient empêché de rejoindre. Peut-être par une modestie inhabituelle, les médias gouvernementaux n’ont pas dressé le tableau de ce jeune et dynamique Président.
Silence que nous devons combler : il est fonctionnaire à la Présidence depuis qu’il a rejoint le pays dans le cadre d’une dissidence du FRUD en 1996. Dissidence dont il a aujourd’hui officialisé sa propre dissidence : le lancement de l’UPR est donc avant tout un coup porté par le RPP à un parti membre du cercle des admirateurs du chef de l’État. C’est un cinglant désaveu de la fameuse coalition RPP-FRUD.
Partant de cette trajectoire, dans le détail de laquelle nous n’entrerons pas ici par respect pour nos lecteurs, il était évident qu’un fonctionnaire de la Présidence ne pouvait pas créer un parti politique hostile à la Présidence: « c’est la raison pour laquelle nous avons choisi de soutenir la politique du gouvernement dirigé par le Président de la République M. Ismaël Omar Guelleh et de nous prononcer en faveur du renouvellement de son mandat…. » a crû utile de préciser le Président de l’UPR.
Le soutien « par acclamation » n’aurait choqué personne s’il n’avait pas cherché à se justifier par une intolérable intolérance sectaire dudit Président : « Car pour nous, Ismaël est un homme de principes, décidé et capable de faire marcher les choses. C’est la raison pour laquelle tous les citoyens dignes de ce nom voteront Ismaël Omar».
Ce qui revient à dire que tous ceux qui n’ont pas voté et qui ne voteront pas en faveur du candidat solitaire sont indignes d’être des « citoyens dignes de ce nom ». Homme de principes : le Peuple et tous ceux victimes de sa violation l’accord de paix du 12 mai 2001, ne sont pas nécessairement de cet avis.
Conception de la démocratie à l’image de celle de son concepteur. Hormis le RPP et l’UPR, jamais aucun parti politique djiboutien n’a osé aller aussi loin dans le mépris du Peuple : l’élève récite la leçon de son maître.
Tel serait le fin mot de cette naissance : un non événement pour la démocratie.
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Quand « La Ration » dément « Réalité » :
Nassib n’a pas de chance
Sale temps pour les laudateurs du mensonge : tout comme le régime qu’il sert, le journal gouvernemental « La Nation» connu sous le sobriquet « La Ration », déprime sérieusement ces jours-ci. A preuve, sa méchante humeur à propos d’un article de « Réalité » consacré au succès de l’ARD dans le Sud-Ouest en général et à As-Eyla en particulier.
Ainsi, dans son édition de lundi dernier, ce confrère auquel nous souhaitons sincèrement une autre dimension à la mesure des attentes du lectorat, apparemment sonné par le choc de la réalité manifestée à As-Eyla, a décoché quelques flèches en papier contre notre organe de presse. Malheureusement, cette sale besogne a été dévolue à un journaliste connu pour ses sympathiques chroniques intitulées « Lettre à ma grand-mère » traitant l’actualité nationale et internationale sous un angle humoristique.
Sont-ce les piqûres des moustiques qui auraient poussé ce journaliste à copieusement dénigrer notre journal ? Prétention au-dessus de son inspiration et de ses informations de toute évidence incomplètes. Car, en dépit de ses démentis, l’association-maison présente sur les lieux en même temps que notre délégation, n’a pas été franchement bien accueillie ce jour-là.
Relater dans quelles circonstances une association « Mouvement Avril 99 » créée pour l’adoration d’une seule personne a été rejetée par la population, c’est un crime de lèse-majesté : à travers elle, c’est l’objet de son adoration qui est jeté de son piédestal. Le temps de l’ignorance est désormais dépassé, même dans le Sud-Ouest que le régime s’entête à considérer comme sa chasse gardée.
Mais, peut-on démentir « Réalité » avec un sombre chapeau de présentation et quelques photos plus sombres encore ? Pathétique tentative peu « démocrazik », comme l’écrivait l’auteur dans un autre contexte. Inutile de répondre à des contrevérités dictées par les circonstances et indignes d’un journal fonctionnant sur les deniers publics.
Assurément, la nouvelle devise de « La Nation » est celle-ci : la meilleure attaque, c’est la fuite. Quoi qu’il en soit, nous retenons que le journal gouvernemental n’a pas osé démentir que le régime avait vainement tenté d’empêcher nos meetings publics à Yoboki et à As-Eyla, et ce en violation de la prétendue démocratie en vigueur à Djibouti.
« Réalité » déplore vraiment que la schizophrénie du régime déteigne également sur des journalistes devenus (comble de malchance lorsque l’on signe Nassib) les porte-voix en papier d’un système aphone et fini.
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Colère des scolaires de Dikhil :
Et pourtant elle tourne !
Depuis que la déroute politique du candidat solitaire est devenue évidente, le journal « La Nation » s’illustre plus que d’habitude par le vide des mots et l’échec des photos. Comme en écho à une pleine page consacrée dans son édition de lundi dernier à l’association-maison dénommée « Mouvement Avril 99 » en tournée d’adoration à As-Eyla, la récente actualité de la région de Dikhil a infligé sa propre réalité. Ainsi, nous avons appris que la ville de Dikhil a été mercredi et jeudi derniers le théâtre de violents affrontements entre forces de l’ordre et lycéens en colère soutenus par des collégiens.
Les jeunes manifestants sont descendus dans la rue pour manifester contre les mauvaises conditions d’étude auxquelles ils sont soumis du fait de l’absence de certaines filières et de professeurs insuffisamment formés. Les forces de police et de gendarmerie ont été rapidement submergées et il a fallu le déploiement des militaires des FAD pour que les protestataires se dispersent enfin.
Depuis, les cours ont repris, mais l’ambiance reste électrique dans la ville de l’Unité, où collégiens et lycéens originaires de l’arrière-pays, résidant dans des familles d’accueil, restent les plus mal lotis du fait des fausses promesses du candidat solitaire.
En d’autres temps, la censure officielle avait exigé du savant Galilée qu’il démente sa théorie selon laquelle la Terre tourne. Pour ne pas être condamné pour hérésie, il renia, sans s’empêcher d’ajouter : «et pourtant, elle tourne». Ainsi en est-il des journalistes-pigistes, obligés de démentir pour le moment et pour sauver leur pain, une vérité évidente qui s’imposera très bientôt : ce régime est fini !
Nier la réalité ne sert à rien : elle finit toujours par s’imposer.
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République en uniforme du candidat solitaire :
Loin des yeux, loin du Peuple
La solitude du candidat de l’UMP est désormais telle que ce dernier recherche désespérément le maigre réconfort très peu démocratique des hommes en armes. Depuis plusieurs semaines, sa campagne bat tellement de l’aile qu’il en est réduit à arpenter les casernes, faute de soutien populaire à la reconduction de son imposture.
Le sommet et pathétique tournant de cette recherche de soutien a été le rassemblement de la semaine dernière au Palais du Peuple. Ainsi que l’atteste la photo de famille prise à cette occasion, ce sont quelque 700 membres des forces armées, Police et Gendarmerie, qui auraient été convoqués pour « réchauffer » le frileux candidat solitaire à sa succession. Rejeté par le Peuple, le chef suprême des armées s’est donc réfugié chez les hommes en armes. Il ne lui reste donc plus qu’à endosser l’uniforme pour se proclamer chef d’Etat à vie, tel le sergent Samuel Doe, tiens, un autre docteur honoris causa. La grotte d’Haramous tremble sous ses pieds bottés.
Au plus fort du mouvement contestataire de Mai 68, lorsqu’étudiants et travailleurs avaient occupé la rue parisienne, l’on se souvient que le Général de Gaule s’était rendu à Baden-Baden visiter les troupes françaises stationnées en Allemagne ; histoire de faire croire qu’il envisageait le recours aux forces armées pour rétablir l’ordre. Seule l’Histoire sait si c’était un coup de bluff. Ici, personne ne doute que la résistance populaire à venir, qui dépassera les clivages traditionnels par lesquels le régime tente de diviser nos concitoyens, saura rallier à sa juste cause des forces armées victimes, elles aussi, de la mauvaise gouvernance.
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Bureaux de vote ambulants :
La fraude comme en 2003
Nous n’en sommes nullement étonnés, puisque cela justifie encore plus notre boycott. La Loi dispose que la carte d’électeur doit explicitement mentionner le bureau de vote de son titulaire, tout comme ses pièces d’identité. Les observateurs internationaux présents lors des législatives du 10 janvier 2003 avaient pour leur part estimé que l’établissement des cartes d’électeur par district pouvait générer des votes multiples. Surtout quand tous les partis en lice n’avaient pas accès aux listes électorales.
Comme le montre l’exemplaire ci-dessous des cartes établies et distribuées pour la présidentielle d’avril 2005, qui n’aura pas lieu, le régime récidive dans l’illégalité.
Interview du Président de l’ARD
« D’ores et déjà, nous assurons et rassurons les autorités du caractère pacifique
de cette mobilisation, qui aura lieu en tout état de cause. »
Ahmed Youssouf, Président de l’ARD
Né en 1938 à Tadjourah, Ahmed Youssouf Houmed, membre fondateur de l’A.R.D, en a été élu Président à l’unanimité le 18 septembre 2004, succédant ainsi à la tête du parti au regretté Ahmed Dini Ahmed dont il était un ami de toujours au quotidien, un compagnon de lutte et le 1er Vice-Président. C’est un poids lourd politique djiboutien, connu et respecté pour sa piété et son intégrité morale. Haut fonctionnaire et indépendantiste, puis Ministre sous les gouvernements Dini et Kamil. C’est un combattant constant et déterminé de la Démocratie. A la veille d’une échéance électorale déterminante pour l’avenir de notre pays et que l’U.A.D a décidé d’activement boycotter, nous avons jugé utile d’interroger le Président de l’ARD sur sa vision, sa démarche, ses espoirs…
Réalité : Monsieur le Président, cinq mois après votre élection à la tête de l’ARD, pouvez-vous dresser un bilan de vos activités ?
Ahmed Youssouf Houmed : permettez-moi avant tout de rendre un hommage appuyé à l’œuvre de mon prédécesseur, qui a fondé ce parti, imposé le multipartisme intégral et ancré la logique de l’argumentation et de la réfutation dans les mœurs politiques. Il a conduit l’UAD à la victoire aux législatives de 2003 et apporté la preuve que ce régime est inamendable ; et surtout que l’opposition est une alternative crédible puisque la paix civile est redevable à son sens des responsabilités. Il n’est pas facile de succéder à un tel homme et je n’ai accepté cette charge que sur l’insistance du Conseil Central et la conscience qu’une telle œuvre doit être poursuivie.
J’ai la ferme détermination de la faire aboutir. Pour cela, j’ai hérité d’un parti structuré et dynamique. Je suis entouré d’une équipe qui a exercé de hautes responsabilités politiques et administratives, compétente et qui a fait ses preuves quant à sa détermination. Dès le surlendemain du décès de mon prédécesseur, nous avons entamé une tournée de sensibilisation dans la Capitale et les annexes du Parti et avons reçu le ferme soutien de nos militants pour nous accompagner dans ce combat pour l’instauration d’un État de droit à Djibouti.
Nous avons adressé de nombreuses correspondances officielles au régime, disant notre disposition au dialogue et à la négociation. Régime qui, comme à son habitude, a préféré faire la sourde oreille. D’ailleurs, ce n’est pas un hasard si ma première interview en qualité de Président de l’ARD est passée sur les ondes d’une radio étrangère (RFI) et non dans les médias publics djiboutiens : ici, l’opposition n’a pas le droit d’être visible dans le domaine public. De même, ce n’est pas un hasard si la section somali de la BBC ne m’a jamais demandé une quelconque interview. Ni à moi ni au Président Ismaël Guedi, ni au Président Daher Ahmed Farah d’ailleurs.
Sauf que, pour ce qui est de moi et de l’ARD, c’est une façon insidieuse de nous cantonner à la défense des seuls intérêts d’une communauté parlant une langue autre que le somali, que je maîtrise parfaitement au demeurant. Donc, il est évident qu’un régime qui monopolise les médias publics et achète certains médias internationaux, confisquera également le verdict des urnes. A ce chapitre, nous avons adressé des courriers aux représentations diplomatiques des pays amis, ainsi qu’un mémorandum à l’Union Européenne et aux États-Unis, sur la situation politique. Nul ne conteste que, dans les circonstances actuelles, la transparence électorale est loin d’être garantie. Enfin, nous sommes en tournée dans les districts de l’Intérieur pour expliquer notre position à cause de cette situation…
R : Pouvez-vous décrire cette situation…
A.Y.H : En un mot, c’est l’impasse totale ! Vous la décrivez chaque semaine et je la résumerai en rappelant que :
- sur le plan social, on constate et nos partenaires au développement avec nous, l’aggravation des inégalités, un chômage endémique, des conditions sanitaires déplorables partout et des violations récurrentes des libertés syndicales qui valent à notre pays des condamnations répétées par les organisations syndicales internationales ;
- sur le plan politique, les multiples entraves et blocages au processus démocratique, la décentralisation reportée aux calendes grecques, le déni de citoyenneté aux ayant-droits font que toutes les causes qui ont conduit à la confrontation armée ne sont pas traitées. Pire, elles s’aggravent !
- dans le domaine économique, le boom des activités portuaires, les loyers revus à la hausse des présences militaires étrangères sur notre sol, les cessions et concessions au capital privé étranger du Port et de l’Aéroport, ne se traduisent pour nos concitoyens par aucune amélioration de leurs conditions de vie, surtout qu’elles sont antinationales car opérées au mépris de l’intérêt national ;
- au plan diplomatique enfin, nous notons avec déception que les relations avec la France sont prises en otage par une affaire pendante devant la justice de ce pays et que les tergiversations à propos de la Somalie et du Somaliland ont relégué notre pays à un rang régional indigne de l’Histoire et de la fraternité qui nous ont toujours liés à cette région. D’autant plus inadmissible lorsque l’on voit le chef de l’État se présenter en grand rassembleur de la Nation Somalienne, alors qu’il n’est même pas capable de réconcilier la Nation Djiboutienne. Pour ce qui est de la lutte antiterroriste, qui a conduit les États-Unis à renforcer leur présence militaire à Djibouti, nous la soutenons sans réserve, pour peu qu’elle ne donne pas lieu à un dangereux amalgame entre Islam et extrémisme. Surtout que le Peuple djiboutien attend que sa contribution, de quelque nature qu’elle soit, n’aille pas à l’encontre de ses aspirations démocratiques.
R : A quoi est due cette impasse et comment en sortir ?
A.Y.H : Elle est essentiellement due à la violation de l’Accord de paix du 12 mai 2001 et il n’y a pas 36 solutions pour en sortir : soit il est intégralement appliqué et de concert, auquel cas tout le monde et le Peuple djiboutien en premier lieu en sortira gagnant, soit la partie gouvernementale s’obstinera à vouloir nous imposer sa violation, ce qui augmentera d’autant notre détermination à la combattre, avec les conséquences incalculables que n’assumeront que les fourbes et autres fraudeurs irresponsables qui nous gouvernent.
R : La coalition de l’opposition a décidé de boycotter la prochaine présidentielle, alors qu’elle avait participé aux législatives de janvier 2003. Pourquoi refuser aujourd’hui le jeu électoral ?
A.Y.H : Le contexte n’est pas le même. A l’époque, il nous fallait renforcer le multipartisme intégral naissant après un long et douloureux conflit armé qui, ayant pris fin en février 2000, ôtait toute crédibilité aux précédentes consultations électorales. Nous avons à l’époque, malgré un mode de scrutin inique, des listes électorales imprimées la veille du scrutin et tant d’autres irrégularités consignées dans l’épais dossier de recours en annulation introduit auprès du Conseil constitutionnel, accepté de jouer le jeu car nous étions convaincus que, malgré tout, le rapport de force électoral penchait largement en notre faveur. Et surtout apporter la preuve qu’après le Conseil constitutionnel, la CENI créée en violation d’une disposition de l’Accord de paix du 12 mai 2001, ne garantissait pas les conditions de neutralité nécessaires à sa crédibilité.
Ce qu’il fallait démontrer à l’époque l’ayant amplement été, nous avons durant deux ans adressé de multiples courriers au ministre de l’Intérieur puis au chef de l’État pour travailler ensemble à l’établissement d’une véritable transparence électorale. Devant le silence irresponsable qui nous a été opposé, et pour ne pas faire une seconde fois de notre Peuple le dindon de la farce, nous n’avons pas eu d’autre choix que de lancer le mot d’ordre de boycott actif de la prochaine élection.
R : Que signifie « boycott actif », alors que le candidat solitaire parade à la télé devant des uniformes et que le ministre de l’Intérieur affirmait récemment que cette élection aurait lieu quoi qu’il arrive ?
A.Y.H : Ce sont là des manœuvres et des réflexes de parti unique qui n’intimident plus personne. Je vous remercie de me permettre de m’expliquer sur ce point, puisque les médias publics sont exclusivement affectés à la propagande du régime. Ce qui, soit dit en passant, est une marque supplémentaire du mépris à l’endroit des 45% du corps électoral, pour nous en tenir aux seuls chiffres officiels, plus que contestables, ayant accordé leur confiance aux listes de l’UAD le 10 janvier 2003. Par « boycott actif », nous entendons, mobiliser tous nos partisans, cette marée humaine qui a triomphalement accueilli le retour au pays du regretté Ahmed Dini en 2000, tous les privés du droit inaliénable à la citoyenneté, tous les déçus de l’UMPisme, c’est-à-dire du mensonge permanent, de la corruption, de la discorde… Nous leur demandons, par une action pacifique, d’exprimer leur refus de cette mascarade.
R : Et si le régime interdit cette expression pacifique ?
A.Y.H : Il ne le pourra pas ! Nous connaissons la frilosité et les réflexes répressifs du pouvoir en place. Sa violation de chaque accord de paix et son refus de négocier avec l’opposition aujourd’hui, indiquent clairement qu’il succombera à une nouvelle tentation de passage en force et par la fraude. En démocratie, il n’y a de force que celle du droit et du Peuple. Il est interdit d’interdire une marche pacifique, même si les syndicats sauvagement réprimés sont bien placés pour savoir de quoi un despote est capable.
Au lendemain des législatives de janvier 2003, le ministère de l’Intérieur avait déjà tenté d’interdire un meeting de l’UAD. Après l’avoir assuré qu’il serait pacifique, nous avons quand même tenu ce meeting, passant outre une interdiction que ne justifiait aucune disposition légale. D’ores et déjà, nous assurons et rassurons les autorités du caractère pacifique de cette mobilisation, qui aura lieu en tout état de cause.
R : C’est la position de toute l’UAD ?
A.Y.H : Tout à fait ! Et j’en profite pour féliciter et encourager tous les partis alliés au sein de l’UAD pour l’action unitaire et décisive qu’ils mènent sur le terrain. Toutes les tentatives gouvernementales pour diviser l’opposition ont échouées. ARD, UDJ et MRD et même PDD, même combat! Certaines mauvaises langues avaient prématurément annoncé que le Président de l’UAD, M. Ismael Guedi, allait se présenter contre le candidat du pouvoir. C’était mal juger de ses convictions car il a clairement prouvé son attachement aux valeurs démocratiques fondant notre coalition et il a relégué le candidat RPP à la position peu enviable et antidémocratique de solitaire condamné à un face-à-face peu crédible avec lui-même et son propre despotisme. Quant au Président du MRD, nous espérons qu’il rentrera bientôt au pays, car la détermination de sa présence et l’éloquence de sa fougue sont appréciées dans toutes les communautés.
R : Un message à la Nation, pour finir ?
A.Y.H : Je lui adresse un message de paix et d’espérance, ainsi qu’à la diaspora à qui je demande également de manifester pacifiquement le jour de l’élection, devant les représentations diplomatiques de Djibouti. Cette mobilisation devra être un acte de résistance collective, de courage, de civisme, en un mot de sursaut national pour désavouer l’imposture.
Propos recueillis par Mahdi Ibrahim
Courrier des lecteurs
La mauvaise gouvernance s’exporte : même nos compatriotes de la diaspora en souffrent. A tel point, lorsqu’il s’agit du refus de délivrer des pièces d’identité, que certains en arrivent à sérieusement douter de l’avenir de leur patrie. Témoignage poignant d’un exilé djiboutien installé en Suède, qui nous a demandé de publier cette lettre adressée aux autorités djiboutiennes. Avec plaisir : que tous les destinataires aient refusé de lui répondre est en soi une raison suffisante pour amplifier son cri de détresse.
A
Monsieur Hassan Djama
Monsieur le Chef d´État Major de la police
B.P. 22
Djibouti
République de DJIBOUTI
Cher Colonel,
Permettez moi tout d’abord de me présenter. Je m´appelle Ibrahim Djama, né à Djibouti en 1965. Après mes études scolaires je me suis engagé dans l’armée nationale et j’ai suivi ma formation de soldat de trois mois à l´école militaire de Hol-Hol en 1981 avant de partir en France pour un stage de transmission à Paris au service central des chiffres et de la sécurité des télécommunication, au service du Premier ministre Pierre Mauroy dont je me suis classé premier de ma promotion. J’habite en Suède depuis 1987.
Le commandant de l´école militaire de Hol-Hol était à cette époque le lieutenant Omar Bouh Goudadé, actuel colonel du FAR.( Force d´Action Rapide)
Une anecdote préalable pour illustrer mon propos et je propose des méthodes correctives, qui sont efficaces.
A l’école militaire de Hol-Hol, la nourriture donnée aux soldats était devenue tellement mauvaise à un tel point qu’elle ne répondait plus aux besoins en calories définies par les normes de l’Armée. Les soldats tombaient souvent malades après avoir mangé les repas servis dans la cantine. Effectivement, chaque jour des soldats se plaignaient de douleurs intestinales. Même les chèvres et les moutons en dehors de la caserne ne voulaient pas manger les restes de ces repas !!
Face à cette situation, je décidais d’agir à ma manière.
Je profitais de ma corvée de nettoyage du bureau du commandant de l´école militaire, le Lieutenant Omar Bouh, pour écrire une longue lettre anonyme de 6 pages que je déposais sur la table de travail du Lieutenant.
Dans ma lettre je parlais de la nourriture avariée que l’on donnait aux soldats, de la baisse de leur moral à cause de cette négligence et du traitement inhumain affligé par un sergent alcoolique du camp qui était allé jusqu’à obliger un soldat à boire son urine pour le punir.
Une semaine après ma lettre, le lieutenant Omar Bouh s’est déguisé en soldat et il a fait la queue devant la cantine pour évaluer la qualité des repas servis aux soldats.
Le lieutenant Omar Bouh constata personnellement la véracité des faits que j’avais relaté dans ma lettre anonyme. Les repas étaient exagérément salés pour masquer leur mauvais goût et ils ne fournissaient pas les éléments nécessaires pour la bonne santé des soldats.
Le lieutenant Omar Bouh a pris aussitôt des décisions courageuses pour faire cesser cette situation. Il a mis aux arrêts de rigueur l’adjudant responsable de la cantine des soldats et il a changé l’ensemble du personnel de la cantine.
Une nouvelle équipe a investi la cantine et a servi des menus convenables aux soldats. Cela contribua bien entendu au redressement rapide du moral des troupes qui avait atteint un niveau inquiétant.
Le lieutenant Omar Bouh rétrogradera non seulement le sergent X mais il ira aussi loin et le mutera dans le Groupement de Commando des frontières – le GCF de Galafi pour le punir de son action de démoralisation de ses soldats, contraire à la loi des Armées.
En faisant cela le commandant Omar Bouh faisait tout simplement son devoir et faisait respecter les lois et règles en vigueur dans l´Armée nationale dont il est responsable aux yeux de la Loi. Aucun officier, sous officier ni homme du rang n’est au-dessus des Lois et encore moins des règlements précis des Armées..
Une question fondamentale.
Si je n´avais pas écrit cette lettre anonyme, le lieutenant Omar Bouh n´aurait jamais su ce qui se passait dans son camp et aurait peut-être eu à affronter des problèmes avec ses hommes. Le sergent aurait toujours continué à faire boire de l’urine à ses soldats et à piétiner leur dignité.
J’ai tenu à vous relater ce fait avant de vous expliquer et attirer votre attention sur ce qui est arrivé récemment à ma famille à Djibouti.. Car je propose une action simple mais efficace contre les agissements illégaux des fonctionnaires et pour évaluer les dysfonctionnements des services publique et pour y remédier.
Ma femme, djiboutienne et mes six enfants tous nés en Suède, sont rentrés à Djibouti le 10 juin 2004. Retour prévu le 02 août 2004. Je tenais à ce qu’il passe les vacances scolaires dans leur pays d’origine et qu’ils le découvrent pour la première fois. Qu’ils connaissent l’environnement dans lequel j’ai grandi.
Possédant tous des passeports suédois, ma femme déposa en prévision du retour, conformément aux règles en vigueur, aux services des Etrangers les 7 passeports suédois 14 jours avant leur départ pour avoir les autorisations de sortie nécessaires.
Chaque fois que ma femme se présentait au bureau d’un certain capitaine Mohamed Houssein Rabeh pour récupérer les passeports, celui-ci lui disait de revenir un autre jour sans jamais lui en donner la raison.
Les jours passaient et la réponse du capitaine restait pareille “reviens un autre jour “. Le jour J approchait et mes enfants commençaient à s’angoisser. Le capitaine Mohamed Houssein Rabeh était soit absent du bureau soit il leur disait de revenir sans explication.
Ma femme n´était pas la seule à subir les abus de pouvoir manifestes de ce jeune fonctionnaire. Chaque fois, elle croisait une cinquantaine de personnes djiboutiennes et étrangères qui faisaient la queue devant son bureau et qui attendaient aux guichets pour payer les frais et récupérer leur passeport selon les procédures légales.
Hélas, les jours se suivaient et se ressemblaient devant le service de l´immigration de Djibouti. Ma femme a même vu chaque jour des femmes avec des nourrissons et des vieillards qui passaient des journées entières pour tenter d’obtenir leurs papiers.
Le sort de tous ces gens dépendait uniquement du bon vouloir d’un seul individu qui ne respectait ni les lois de son pays ni les gens entassés chaque jour devant son bureau.
Pour que ma femme puisse obtenir les 7 passeports, il n’y avait plus qu’une alternative.
- La première était de corrompre le capitaine Mohamed Houssein Rabeh en lui donnant de l´argent. Vieille et triste méthode en Afrique.
- La seconde était de passer par l’intervention d’un supérieur à lui. Vieille et triste méthode en Afrique encore.
Bien entendu ma femme choisit la seconde solution, qui était la bonne à ce moment là. Dans un petit pays comme Djibouti, chaque djiboutien a toujours un ou plusieurs cousins bien placés dans l´appareil de l´Etat.
24 heures avant le départ de ma femme et mes enfants à destination de la Suède, ma femme est allée voir un Ministre qui chargea son proche collaborateur de téléphoner au capitaine Mohamed Houssein Rabeh.
Monsieur le Chef d´Etat-major de la police, le haut fonctionnaire du Ministère débloquera sur un simple coup de fil et en moins de deux minutes ce que ma femme avait essayé d’obtenir pendant 14 jours : les 7 passeport qui dormaient dans le tiroir du capitaine Mohamed Houssein Rabeh..
Ce jour-là heureusement ma femme avait eu cette chance d´avoir un cousin ministre.
- Mais vers qui peuvent se tourner les Djiboutiens ou les autres qui n´ont pas, dans leurs relations, un Ministre ou quelqu’un de haut placé dans l´appareil de l´État ?
- Comment peuvent-ils faire prévaloir leurs droits légitimes auprès de l’Administration quand elle est tenue par des individus sourds, insensibles et opposés au bon fonctionnement du service public?
- Est-il encore nécessaire, en 2004 á Djibouti, de solliciter l’intervention d´un Ministre de la République pour obtenir l’application des droits les plus élémentaires par les services publics de État. ?
- Si les Ministres doivent régler ces petites choses auprès des différents services de l´État, comment pourront-ils trouver le temps nécessaire pour gérer l´intérêt supérieur de la nation?
Toutes ces questions resteront probablement sans réponses.
Monsieur le Chef d´État Major de la police. le Président de la République á nommé un Médiateur de la République par le décret n°2000-0150/PRE du 11 juin 2000 pour faciliter le rapprochement des services de l´administration publique et de la population, afin que l´arbre ne cache plus la forêt.
Le père de ma femme est un des héros de la République et il est tombé sous les balles du colonialisme en libérant Djibouti en 1976 à Loyada. Vous comprenez très bien combien cela a fait mal au cœur ma femme, de voir les fruits de son père mal gérés aujourd´hui.
Monsieur le Chef d´État Major de la police, permettez-moi un conseil, en tant que citoyen de ce pays que j´aime toujours. Déguisez-vous un jour, en simple citoyen et adressez-vous aux différents services publics de l´État pour évaluer, comment vos droits seront ou ne seront pas bafoués pas des gens qui se croient investis d’un pouvoir absolu de nuisance, n’ayant aucune légitimité ni justification au regard de leur poste.
Précisément comme l’avait fait le lieutenant Omar Bouh Goudadé commandant de l´école militaire de Hol-Holl en 1981, en se déguisant en soldat pour se rendre compte de lui-même de la qualité des repas servis à ses hommes.
Pour montrer que le capitaine Houssein Mohamed Rabeh a détenu dans ses tiroirs sans motif ni raison valable les 7 passeports, ma femme a fait appel au Commandant Houssein qui est le supérieur direct du capitaine en question.
Le commandant est intervenu et il n’a eu qu’à dire à son subordonné : «cette femme est là devant ton bureau depuis plus de 10 jours et tu retiens ses passeports sans raison. Je t’ordonne de les signer et d’expédier cette affaire »
Le Capitaine Houssein Mohamed Rabeh lui a répondu que son supérieur faisait de la politique et que cela ne l’intéressait pas. Dans l’armée le refus d´obéir à un supérieur était puni de 30 jours d´arrêt.
Monsieur le Chef d’État Major de la police,
- La République de Djibouti est une et indivisible comme l´a dit le premier Ministre Monsieur Ahmed Dini dans sa déclaration de l´indépendance de la veille de l´indépendance le 26 juin 1977.
- Il y a une et une seule constitution qui s´applique à tout le monde dans le territoire national.
- Il n´y a pas deux catégories de Djiboutiens.
- Tous les djiboutiens quels que soient leur grade, leur fonction, leurs origines ou leur sexe sont soumis à la même Loi.
- Les fonctionnaires de l´Etat sont au service de la population et doivent respecter et appliquer la Loi, sans aucune autre considération.
Monsieur le Chef d´Etat Major de la police, cette lettre n´est pas pour vous demander de punir le capitaine Mohamed Houssein Rabeh mais tout simplement vous montrer pourquoi les Djiboutiens qui sont en colère face à cette maladie des services de État et à leur inefficacité, voire à leur nuisance dans certains cas.
Leur colère porte sur le plus haut responsable, qui est élu au suffrage universel direct : je désigne ici le Chef de l´Etat, qui est le garant de la Constitution selon l´article 22. Dans une véritable démocratie ce seraient les urnes qui parleraient et qui puniraient le Président en le renvoyant dans ses quartiers.
Nos trois enfants aînés, Aden né 1992, Elias né 1993 et Laila née 1994 ont décrit Djibouti, à leur retour, comme un pays sans loi et des hommes sans têtes. Cette histoire les a profondément affectés, car ils n’imaginaient même pas que ce soit possible auparavant.
Pour eux et à leur âge, un pays sans Loi est un pays où un seul individu accapare le fonctionnement d’un service administratif sans respect ni pour la Loi, ni pour son supérieur hiérarchique, ni les fils et filles des héros de la libération de la République, ni pour les hommes, les femmes et les enfants qui faisaient la queue devant son bureau.
Ce jeune capitaine parachuté par le Général Yacin Yabeh uniquement par son appartenance tribale, n´a ni la compétence, ni l´honneur, ni la qualité du poste qui lui est confié.
Pour eux, des hommes sans tête, c’est un pays où personne ne respecte les règles communes : prenons par exemple, le nombre des véhicules qui ne respectent pas le code de la route, les bus qui roulent à des allures exagérées et dangereuses dans les quartiers et dans le centre ville, des voitures garées n´importe où et n´importe comment.
Ils ont raconté tout cela à leur maître de l´école. C´est lui qui me l´a dit ensuite.
Le résultat est consternant : mes enfants ont décidé de ne plus jamais revenir à Djibouti, tant que tous ces problèmes ne seront pas solutionnés / normalisés.
Et comprenez combien cela me touche et m’attriste profondément: mes propres enfants rejettent la terre de mes ancêtres à cause des dérives de certains petits potentats de la fonction publique ! C’est affligeant et ça me fait mal au Coeur.
Ici en Suède, en Europe ou en Amérique du nord, l´Administration est au service de la population. Elle est neutre et objective et elle n’a pas le droit à l´erreur. Les heures d´ouverture ne dépendent pas des états d’âme des fonctionnaires, titulaires du bureau. Pour assurer la continuité du service de Etat, si le fonctionnaire est absent ou malade un collègue se substitue à lui.
Chaque citoyen a le droit d´obtenir une réponse à ses demandes dans les délais fixés par la Loi. Si le citoyen n´est pas satisfait de la réponse, il peut saisir le tribunal administratif de la Commune. Le citoyen et le fonctionnaire se présentent devant un juge qui examine la plainte. Si le fonctionnaire a tort, il aura un avertissement. Trois avertissements dans une année entraîne la révocation du fonctionnaire.
Si j’ai jugé utile d’attirer votre attention aujourd´hui, Monsieur le Chef État Major de la Police sur ce cas, c’est parce qu’il concerne des milliers de nos concitoyens.
Dans l´attente d´une réponse veuillez recevoir Monsieur le Chef d´Etat-major de la Police, mes salutations les plus respectueuses.
IBRAHIM DJAMA,
Gråvädersv. 4.J, 226 42 LUND
Tel : 46 705 14 83 90
Suède
Mise au point de M. Ali Mahamadé
Comme cela était prévisible, les médias gouvernementaux n’ont pas hésité à transgresser les lois en vigueur en refusant de diffuser la mise au point de M. Ali Mahamadé. Lequel avait été mis en cause par le ministre de l’Intérieur lors de son passage à l’émission “Gros Plan”, donnant à penser que l’opposition avait rendez-vous avec le régime dimanche dernier, pour négocier en cachette sa participation à la présidentielle programmée. Propagande d’intoxication étant incompatible avec devoir d’informer, voici le texte de ce démenti
MISE AU POINT
A
Monsieur le Directeur de la RTD
De
M. ALI MAHAMADE
Secrétaire à l’Information et porte-parole de l’ARD
Directeur de publication du journal « Réalité »
Monsieur le Directeur,
Ayant été nommément mis en cause dans l’émission « Gros Plan » de vendredi dernier, je vous saurais gré de bien vouloir diffuser le plus rapidement la mise au point suivante :
Lors de l’émission « Gros Plan » du vendredi 3 février 2005, monsieur le ministre de l’Intérieur a affirmé que régime et opposition gardaient le contact dans le cadre de la préparation de la présidentielle : pour preuve il aurait aujourd’hui dimanche rendez-vous avec moi. Ceci constitue une contrevérité absolue : ni mon Parti ni l’UAD ne m’ont désigné pour entretenir un quelconque contact avec le gouvernement. Il n’en a jamais été question, puisque ce dernier n’a pas daigné répondre à nos multiples courriers officiels.
Par contre, il est vrai que, dans le cadre de mes fonctions de Directeur de publication, j’avais demandé à voir le ministre de l’Intérieur mercredi dernier. Tôt ce jour-là, j’avais été informé de ce qu’une des revendeuses de « Réalité » avait été arrêtée par la police. Voyant dans cet acte une entrave à la libre diffusion de l’organe de presse de mon Parti, je me suis effectivement rendu au ministère de l’Intérieur pour exiger la libération de cette vendeuse.
Après m’avoir poliment écouté et assuré qu’il s’agissait d’une rafle de routine ne visant en rien mon journal, le Secrétaire Général de ce ministère m’a suggéré de m’entretenir aussitôt avec son ministre. Lequel, bien qu’au courant de l’objet de ma visite, n’a pas jugé cet entretien aussi urgent que je l’avais souhaité, puisqu’il s’agissait pour moi d’obtenir la libération rapide de la revendeuse. Par téléphone, il a demandé à sa secrétaire de bien vouloir m’inviter à repasser dans trois ou quatre jours. Ce que j’ai tout aussi poliment décliné, espérant bien que la revendeuse serait libérée d’ici là.
Il est regrettable que le ministre de l’Intérieur se soit servi de cette affaire pour désinformer les téléspectateurs en faisant croire que, par mon truchement, l’UAD négocierait secrètement sa participation à l’élection présidentielle qu’il prétend organiser. Une telle manœuvre d’intoxication cherchant à jeter le discrédit sur tout ou partie de l’opposition donne la mesure du désarroi du régime devant le mot d’ordre de boycott actif lancé par l’UAD.
Si monsieur le ministre de l’Intérieur a bien un rendez-vous, ce n’est nullement celui qu’il a prétendu avoir avec moi, lors de son passage à l’émission « Gros Plan ».
Ce serait plutôt celui que tout le régime auquel il appartient a avec l’ensemble de l’opposition regroupée au sein de l’UAD, à l’heure de vérité : pas d’élection sans nous !
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